Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus : DORS/2024-60

La Gazette du Canada, Partie II, volume 158, numéro 9

Enregistrement
DORS/2024-60 Le 12 avril 2024

LOI SUR LES MESURES ÉCONOMIQUES SPÉCIALES

C.P. 2024-286 Le 12 avril 2024

Attendu que la gouverneure en conseil juge que des violations graves et systématiques des droits de la personne ont été commises dans la République du Bélarus,

À ces causes, sur recommandation de la ministre des Affaires étrangères et en vertu de l’alinéa 4(1)(a)référence a et des paragraphes 4(1.1)référence b, (2)référence c et (3) de la Loi sur les mesures économiques spéciales référence d, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus, ci-après.

Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus

Modification

1 La partie 1 de l’annexe 1 du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus référence 1 est modifiée par adjonction, selon l’ordre numérique, de ce qui suit :

Antériorité de la prise d’effet

2 Pour l’application de l’alinéa 11(2)a) de la Loi sur les textes réglementaires, le présent règlement prend effet avant sa publication dans la Gazette du Canada.

Entrée en vigueur

3 Le présent règlement entre en vigueur à la date de son enregistrement.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)

Enjeux

Contexte

Le 9 août 2020, la République du Bélarus a organisé une élection présidentielle marquée d’irrégularités généralisées. Sous la direction du président sortant Alexander Lukashenko, le gouvernement du Bélarus a mené une campagne de répression systématique tout au long de la période précédant l’élection et pendant le scrutin. Il a également eu recours à la violence sanctionnée par l’État contre le peuple du Bélarus afin de réprimer les manifestations contre le gouvernement. Human Rights Watch, Amnistie internationale, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, le Viasna Human Rights Centre et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ont tous signalé des cas de violations des droits de la personne. Depuis, de nombreux organismes de défense des droits de la personne réputés, dont le Viasna Human Rights Centre, ont été contraints de fermer leurs portes.

Le Canada n’a pas reconnu les résultats de l’élection présidentielle de 2020, considérée comme frauduleuse et inconstitutionnelle. Le 28 septembre 2020, en réponse aux violations graves et systématiques des droits de la personne commises au Bélarus, la gouverneure en conseil a approuvé le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus (le Règlement visant le Bélarus), en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales (LMES). Ce règlement interdit de faire des opérations (ce qui entraîne dans les faits un gel des avoirs) avec des particuliers et des entités dont le nom figure sur la liste du Règlement, et interdit à toute personne se trouvant au Canada ou à tout Canadien se trouvant à l’étranger d’effectuer une opération portant sur un bien appartenant à un particulier dont le nom figure sur la liste, de conclure une transaction avec lui, de lui fournir des services ou de rendre disponibles des biens à ce particulier.

Depuis l’élection présidentielle de 2020, le gouvernement du Bélarus continue de commettre des violations graves et systématiques des droits de la personne. Ces violations comprennent des détentions arbitraires prolongées, des actes de brutalité, de l’intimidation et l’usage excessif de la force contre des manifestants pacifiques. Il y a également eu des allégations sérieuses selon lesquelles des actes de torture et de violence sexuelle seraient commis à l’égard des personnes injustement détenues. Des personnes sont injustement poursuivies et condamnées à de longues peines d’emprisonnement. De plus, les droits à la liberté d’expression, à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association font l’objet de restrictions excessives.

Les observateurs des droits de la personne ont remarqué une intensification des mesures de répression prises contre les journalistes indépendants en 2021, notamment les détentions arbitraires, l’imposition d’amendes et de peines d’emprisonnement, la perte d’accréditation des médias et des descentes de police. Rien n’indique que le gouvernement du Bélarus soit réellement disposé à négocier une solution avec les groupes d’opposition ni à faire en sorte que les responsables des violations graves et systématiques des droits de la personne rendent compte de leurs actes. Aucune mesure appropriée n’a été prise pour rétablir les droits démocratiques ou pour mettre fin aux violations des droits de la personne.

Les autorités ont condamné à des peines d’emprisonnement plusieurs militants biélorusses influents, y compris le lauréat du prix Nobel de la paix 2022 Ales Bialiatski et la chef de l’opposition en exil Sviatlana Tsikhanouskaya (jugée par contumace). Au cours des derniers mois, les autorités ont également mené un grand nombre de descentes dans des lieux liés à des militants de l’opposition (en novembre 2023), à des observateurs de l’élection de 2020 (en décembre 2023) et à d’anciens prisonniers politiques et à leurs familles (en janvier 2024).

Réponse internationale

La réponse de la communauté internationale à l’élection frauduleuse et aux violations graves et systématiques des droits de la personne comprenait l’imposition de restrictions en matière de visas pour les fonctionnaires bélarusses, la mise en place de sanctions ciblées, la collaboration avec l’opposition du Bélarus et l’offre d’un soutien financier à des organisations de l’opposition bélarusses. La Plateforme internationale de responsabilisation pour le Bélarus a été créée, et la communauté internationale a continué à se mobiliser par l’entremise d’organisations multilatérales comme le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies et l’OSCE.

À deux reprises, les États participants de l’OSCE ont invoqué le mécanisme de Moscou de l’OSCE (le mécanisme), ce qui a entraîné la mise sur pied d’une mission ponctuelle pour enquêter sur les violations des droits de la personne au Bélarus. Le mécanisme a été invoqué en septembre 2020 en réponse aux rapports sérieux faisant état de violations des droits de la personne liées à l’élection présidentielle de 2020 et en mars 2023 en réponse à l’augmentation des mesures de répression contre les voix de l’opposition et de la société civile. Les rapports qui ont suivi ont confirmé les préoccupations ayant mené à la mise sur pied de la mission ponctuelle et comprenaient plusieurs recommandations qui ont permis de mettre en évidence les atteintes aux droits de la personne commises, notamment en ce qui concerne les lacunes judiciaires, les détentions arbitraires, l’élimination de la société civile et la répression de la liberté d’expression.

Réponse du Canada

Le Canada a mobilisé directement le gouvernement du Bélarus et la communauté internationale en vue de mettre fin aux actes de répression et aux violations des droits de la personne en cours au Bélarus, notamment dans le cadre de forums multilatéraux comme l’OSCE, la Coalition pour la liberté des médias, la Coalition pour la liberté en ligne et la Plateforme internationale de responsabilisation pour le Bélarus. Depuis septembre 2020, le Canada impose des sanctions à des personnes et à des entités bélarusses et s’efforce de le faire en étroite coordination avec ses partenaires. Ces sanctions ciblent les personnes et les entités qui commettent des violations graves et systématiques des droits de la personne à l’encontre de Bélarusses rejetant l’élection frauduleuse de 2020 et s’opposant au régime de Lukashenko.

Objectif

  1. Faire pression sur le gouvernement du Bélarus pour qu’il change de comportement.
  2. Faire clairement savoir au gouvernement du Bélarus que le Canada n’acceptera pas que des violations graves et systématiques des droits de la personne continuent d’être commises par l’État en toute impunité.
  3. Harmoniser les mesures prises à celles des partenaires internationaux pour souligner le maintien d’un front uni dans la réponse aux violations graves et systématiques des droits de la personne commises par le Bélarus.

Description

Les modifications ajoutent 21 particuliers à l’annexe 1 du Règlement visant le Bélarus en réponse aux violations graves et systématiques des droits de la personne commises au Bélarus. Ces particuliers sont de hauts fonctionnaires, actuels ou anciens, impliqués dans les affaires internes, notamment des membres des forces de sécurité, des procureurs, des membres de l’appareil judiciaire et des administrateurs de colonies pénitentiaires et « éducatives ». Ces personnes ont été impliquées dans la répression de manifestations, les détentions arbitraires, les arrestations, les poursuites contre les Bélarusses qui protestaient contre les élections frauduleuses et les mauvais traitements que ces derniers ont subis lorsqu’ils ont été jugés, condamnés et emprisonnés à tort.

Élaboration de la réglementation

Consultation

Affaires mondiales Canada consulte régulièrement les intervenants pertinents, notamment des organisations de la société civile, des communautés culturelles et des représentants d’autres gouvernements d’optique commune pour discuter de la démarche suivie par le Canada pour appliquer des sanctions.

En ce qui concerne les modifications, il n’est pas approprié de mener des consultations publiques, étant donné le risque de fuite des actifs.

Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones

Une évaluation initiale de la portée géographique des modifications au Règlement visant le Bélarus a été effectuée et n’a révélé aucune obligation découlant des traités modernes, puisque les modifications ne prendront pas effet dans une région visée par un traité moderne.

Choix de l’instrument

Les règlements constituent la seule méthode pour promulguer des sanctions au Canada. Aucun autre instrument ne pourrait être pris en compte.

Analyse de la réglementation

Avantages et coûts

Les coûts supplémentaires que doit assumer le gouvernement du Canada pour administrer et appliquer ces interdictions à l’égard des 2 900 personnes déjà visées par des sanctions en Russie, au Bélarus, en Ukraine et en Moldavie depuis 2014 sont minimes. Les sanctions visant des entités et des particuliers précis ont moins d’incidence sur les entreprises canadiennes que les sanctions économiques habituelles à grande échelle, et ont un effet limité sur les citoyens du pays des entités et particuliers visés. D’après une évaluation initiale des renseignements disponibles de source ouverte, il y a lieu de croire que les personnes nouvellement inscrites sur la liste ont des liens limités avec le Canada et n’ont, par conséquent, pas d’activités commerciales importantes qui sont notables pour l’économie canadienne.

Compte tenu des échanges limités avec le Bélarus et des sanctions déjà en place, il est peu probable que des sanctions supplémentaires visant de hauts fonctionnaires, actuels ou anciens, impliqués dans les affaires internes aient une incidence notable sur les Canadiens, les entreprises canadiennes ou les intérêts commerciaux du Canada dans leur ensemble.

Les banques et les institutions financières canadiennes sont tenues de se conformer aux sanctions. Elles le feront en ajoutant les nouvelles entités et les nouveaux particuliers désignés à leurs systèmes de surveillance existants, ce qui pourrait entraîner un coût de mise en conformité.

Lentille des petites entreprises

En ce qui concerne les personnes nommées dans le Règlement visant le Bélarus, l’analyse effectuée sous la lentille des petites entreprises a permis de conclure que le Règlement pourrait avoir une incidence sur les petites entreprises canadiennes. Les modifications interdisent aux entreprises canadiennes de traiter avec les personnes inscrites sur la liste, de leur fournir des services ou de mettre des biens à leur disposition, mais ne créent pas d’obligations administratives directes à l’égard des entreprises. Même si les entreprises canadiennes peuvent demander des permis en vertu du Règlement, Affaires mondiales Canada ne prévoit pas de demandes découlant de l’inscription de ces personnes sur la liste, si bien qu’il n’y aurait pas de fardeau administratif supplémentaire découlant de cette exigence. Les petites entreprises canadiennes sont également assujetties à l’obligation de divulgation en vertu du Règlement, ce qui constituerait une obligation de conformité directe. Cependant, comme les personnes nouvellement inscrites sur la liste ont des liens limités avec le Canada, Affaires mondiales Canada ne prévoit aucune divulgation découlant des modifications.

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s’applique pas, car il n’y a pas de changement progressif du fardeau administratif pour les entreprises. Le processus de délivrance de licences pour les entreprises correspond à la définition de « fardeau administratif » dans la Loi sur la réduction de la paperasse; toutefois, bien que des permis puissent être accordés, à titre exceptionnel, en vertu du Règlement, étant donné le niveau minimal des échanges commerciaux avec le Bélarus, Affaires mondiales Canada ne prévoit pas de demandes de permis découlant des modifications.

Coopération et harmonisation en matière de réglementation

Bien que les modifications ne soient pas liées à un plan de travail ou à un engagement dans le cadre d’un forum officiel de coopération en matière de réglementation, elles correspondent aux mesures prises par les partenaires internationaux du Canada. Les sanctions sont les plus efficaces lorsqu’elles sont appliquées d’une manière coordonnée.

Évaluation environnementale stratégique

Les modifications ne sont pas susceptibles d’entraîner des effets importants sur l’environnement. Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a permis de conclure qu’une évaluation environnementale stratégique n’était pas nécessaire.

Analyse comparative entre les sexes plus (ACS+)

Les effets des sanctions économiques sur le genre et la diversité ont déjà fait l’objet d’évaluation. Bien qu’elles visent à faciliter un changement de comportement en exerçant des pressions économiques sur des particuliers et des entités dans des États étrangers, les sanctions prévues par la LMES peuvent néanmoins avoir des répercussions imprévues sur certains groupes et personnes vulnérables. Plutôt que de toucher le Bélarus dans son ensemble, ces sanctions ciblées ont des répercussions sur les personnes soupçonnées de commettre des violations graves et systématiques des droits de la personne. Par conséquent, il est peu probable que ces sanctions aient une incidence importante sur les groupes vulnérables, par rapport aux sanctions économiques traditionnelles de grande ampleur visant un État.

Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service

Les modifications entrent en vigueur le jour de leur enregistrement.

À la suite de leur inscription sur la liste du Règlement visant le Bélarus, et conformément à l’application de l’alinéa 35.1b) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, les personnes inscrites sur la liste seraient interdites de territoire au Canada.

Les noms des particuliers inscrits seront accessibles en ligne pour que les institutions financières puissent en prendre connaissance et seront ajoutés à la Liste consolidée des sanctions autonomes canadiennes. Cela contribuera à faciliter le respect du Règlement visant le Bélarus. Au titre de la LMES, les agents de la Gendarmerie royale du Canada et de l’Agence des services frontaliers du Canada peuvent imposer des sanctions en vertu des pouvoirs qui leur sont conférés par la Loi sur les douanes, la Loi sur l’accise ou la Loi de 2001 sur l’accise, ainsi que par les articles 487 à 490, 491.1 et 491.2 du Code criminel.

Conformément à l’article 8 de la LMES, quiconque contrevient sciemment au Règlement est passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’une amende maximale de 25 000 $ ou d’une peine d’emprisonnement maximale d’un an, ou d’une combinaison des deux; ou encore, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d’une peine d’emprisonnement maximale de cinq ans.

À Affaires mondiales Canada, le Service des délégués commerciaux (SDC), que ce soit à l’étranger ou au Canada, continue d’aider les gens d’affaires clients à comprendre les règlements sur les sanctions du Canada et notamment leurs effets sur les activités que peuvent mener les Canadiens. Le Ministère intensifie aussi ses campagnes d’information dans tout le pays, y compris auprès des entreprises, des universités et des gouvernements provinciaux et territoriaux, pour faire mieux connaître les sanctions appliquées par le Canada et favoriser le respect de celles-ci.

Personne-ressource

Andreas Weichert
Directeur
Direction de l’Europe de l’Est et de l’Eurasie
Affaires mondiales Canada
125, promenade Sussex
Ottawa (Ontario)
K1A 0G2
Téléphone : 613‑203‑3603
Courriel : Andreas.Weichert@international.gc.ca