Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant Haïti : DORS/2023-192
La Gazette du Canada, Partie II, volume 157, numéro 21
Enregistrement
DORS/2023-192 Le 20 septembre 2023
LOI SUR LES MESURES ÉCONOMIQUES SPÉCIALES
C.P. 2023-900 Le 20 septembre 2023
Attendu que la gouverneure en conseil juge qu’un national de la République d’Haïti, qui est un agent public étranger ou une personne qui est associée à un tel agent, est responsable ou complice d’avoir ordonné, supervisé ou dirigé d’une façon quelconque des actes de corruption à grande échelle,
À ces causes, sur recommandation de la ministre des Affaires étrangères et en vertu des paragraphes 4(1)référence a, (1.1)référence b, (2)référence c et (3) de la Loi sur les mesures économiques spéciales référence d, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant Haïti, ci-après.
Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant Haïti
Modification
1 La partie 2 de l’annexe du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant Haïti référence 1 est modifiée par adjonction, selon l’ordre numérique, de ce qui suit :
- 11 Carl Braun
- 12 Jean Marie Vorbe
- 13 Marc Antoine Acra
Antériorité de la prise d’effet
2 Pour l’application de l’alinéa 11(2)a) de la Loi sur les textes réglementaires, le présent règlement prend effet avant sa publication dans la Gazette du Canada.
Entrée en vigueur
3 Le présent règlement entre en vigueur à la date de son enregistrement.
RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION
(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)
Enjeux
Les élites haïtiennes utilisent leur position, leur influence, leurs ressources et leur association avec des personnalités politiques pour se livrer à des actes de corruption à grande échelle qui alimentent une crise multidimensionnelle marquée par une grave crise humanitaire.
Contexte
Depuis plusieurs années, Haïti est en proie à une crise multidimensionnelle caractérisée par une inflation galopante, une pauvreté chronique, une insécurité alarmante ainsi qu’une impasse politique qui paralyse la plupart des institutions publiques. Dans ce contexte, les Haïtiens subissent quotidiennement des agressions contre leurs droits de la personne fondamentaux.
Le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant Haïti (le Règlement) annoncé le 4 novembre 2022 et ses modifications subséquentes permettent au Canada de cibler des sanctions contre les membres de l’élite qui se livrent à des actes de corruption à grande échelle et d’autres comportements inacceptables qui alimentent l’instabilité.
Les gangs, qui terrorisent et subjuguent la population, opèrent sous la protection d’élites politiques et d’oligarques et ont délibérément tué, blessé et commis des actes de violence sexuelle pour étendre leur contrôle territorial. L’insécurité demeure avec les gangs gardant le contrôle sur une grande partie de la capitale.
La communauté internationale est saisie de la crise actuelle et prend des mesures pour limiter le flux de soutien financier à ceux qui perpétuent la violence en Haïti, comme en témoigne l’adoption unanime, le 21 octobre 2022, par le Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU), d’une résolution établissant un nouveau régime de sanctions. Le Canada a coordonné étroitement avec les États-Unis l’établissement du régime de sanctions autonomes visant à exercer une pression immédiate sur ceux qui soutiennent ou fomentent la violence en Haïti afin de mettre fin à la violence et de permettre aux autorités haïtiennes de rétablir la loi et l’ordre. Le Canada et les États-Unis ont continué de travailler en étroite collaboration pour renforcer ces mesures, notamment en identifiant des cibles supplémentaires.
Les modifications réglementaires s’alignent sur la politique et les objectifs existants pour faire face à la crise multidimensionnelle en Haïti. Les modifications font également progresser les objectifs politiques axés sur la promotion des droits de la personne et sur la lutte contre la corruption et l’impunité. Enfin, les modifications réglementaires sont fondées sur des mesures existantes et renforcent ainsi l’engagement indéfectible du Canada à promouvoir le développement, la paix et la sécurité de la région et à travailler en collaboration avec la communauté internationale pour aider les autorités haïtiennes à rétablir la loi et l’ordre.
Objectif
Ces sanctions visent à exercer une pression sur les élites politiques et économiques, qui se livrent à des actes de corruption à grande échelle qui contribuent à une culture d’impunité et alimentent l’instabilité.
Description
Les modifications au Règlement comprendront trois particuliers qui seront soumis à une interdiction générale de faire des affaires et seront inadmissibles au Canada. Il existe des motifs raisonnables de croire que les trois particuliers désignés sont des entrepreneurs qui se sont livrés à des actes de corruption à grande échelle en exploitant leur influence et leurs ressources, notamment par le biais du blanchiment d’argent, de l’entrave à la justice et du détournement de fonds publics.
Il est interdit à tout particulier et à toute entité au Canada ainsi qu’aux Canadiens et Canadiennes et aux entités canadiennes à l’étranger d’effectuer des opérations sur les biens des personnes inscrites sur la liste, de conclure des transactions avec elles, de leur fournir des services financiers ou de nature financière ou de mettre des biens à leur disposition. De plus, comme ces particuliers sont inscrits sur la liste du Règlement en réponse à des actes de corruption importante, elles sont également interdites au Canada en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.
Élaboration de la réglementation
Consultation
Affaires mondiales Canada s’entretient régulièrement avec les intervenants concernés en Haïti, y compris les organisations de la société civile et d’autres gouvernements aux vues similaires, au sujet de l’approche du Canada en matière d’aide internationale en Haïti, y compris pour la mise en œuvre des sanctions. À titre d’exemple, le Canada préside le Groupe consultatif ad hoc sur Haïti du Conseil économique et social (ECOSOC) et utilise cette tribune pour élaborer et discuter avec ses alliés des réponses internationales coordonnées aux défis économiques et de développement auxquels le pays est confronté.
En ce qui concerne les modifications visant les particuliers, une consultation publique n’aurait pas été appropriée, étant donné l’urgence d’imposer des mesures en réponse à la détérioration de la situation sécuritaire et à la crise humanitaire.
Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones
Une évaluation initiale de la portée géographique de l’initiative a été effectuée et n’a permis de cerner aucune obligation découlant des traités modernes, puisque les modifications n’entrent pas en vigueur dans une zone de traité moderne.
Choix de l’instrument
Les règlements sont la seule méthode pour promulguer des sanctions au Canada. Aucun autre instrument ne pourrait être envisagé.
Analyse de la réglementation
Avantages et coûts
Les sanctions visant des personnes spécifiques ont moins d’incidence sur les entreprises canadiennes que les sanctions économiques traditionnelles à grande échelle, et ont une incidence limitée sur la population du pays d’origine des personnes inscrites sur la liste. Les banques et institutions financières canadiennes sont tenues de se conformer aux sanctions. Elles le feront en ajoutant les particuliers nouvellement inscrits à leurs systèmes de surveillance existants, ce qui pourrait entraîner un coût de conformité mineur.
Lentille des petites entreprises
Il est possible que les modifications entraînent des coûts supplémentaires pour les entreprises qui cherchent à obtenir des permis qui les autoriseraient à mener des activités ou des transactions spécifiques qui sont autrement interdites.
Dans l’ensemble, on s’attend à ce que l’impact sur les entreprises canadiennes soit minime. Puisque les sanctions visent des particuliers, il est peu probable qu’elles entraînent des coûts pour les entreprises.
Règle du « un pour un »
Le processus de délivrance de permis pour les entreprises répond à la définition de « fardeau administratif » au sens de la Loi sur la réduction de la paperasse; le coût de ce fardeau devrait donc être calculé et compensé dans un délai de 24 mois. Cependant, puisque les modifications portent sur une situation d’urgence, elles sont exemptées de l’obligation de compenser le fardeau administratif et réglementaire en application de la règle du « un pour un ».
Coopération et harmonisation en matière de réglementation
Bien que les modifications ne soient pas liées à un plan de travail ou à un engagement dans le cadre d’un forum officiel de coopération réglementaire, elles s’harmonisent avec les mesures prises par les alliés du Canada.
Évaluation environnementale stratégique
Il est peu probable que les modifications entraînent des effets importants sur l’environnement. Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a permis de conclure qu’une évaluation environnementale stratégique n’est pas nécessaire.
Analyse comparative entre les sexes plus (ACS+)
Le sujet des sanctions économiques a déjà fait l’objet d’une analyse des effets sur le genre et différentes catégories de personnes dans le passé. Bien qu’elles visent à encourager un changement de comportement en exerçant une pression économique sur des entités et des particuliers à l’étranger, les sanctions prises en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales (LMES) peuvent néanmoins avoir une incidence imprévue sur certains groupes et certaines personnes vulnérables. Les sanctions ciblées ont un effet non pas sur la population haïtienne dans son ensemble, mais bien sur les personnes et entités soupçonnées de participer à des actes de corruption à grande échelle attisant la crise humanitaire en Haïti. Par conséquent, ces sanctions n’auront probablement pas de conséquences majeures sur les groupes vulnérables comme c’est le cas des sanctions économiques traditionnelles à grande échelle contre un État, et leurs effets collatéraux se limiteront aux personnes qui dépendent des personnes ciblées. En outre, ces sanctions sont adoptées en vue d’aider les populations vulnérables, en particulier les femmes et les filles, qui continuent de voir quotidiennement leurs droits fondamentaux bafoués par les gangs criminels, notamment par des actes de violence sexuelle et fondée sur le genre.
Justification
Les gangs soutenus par l’élite haïtienne et d’autres ont étendu leur contrôle territorial sur le pays. Plusieurs missions des Nations Unies ont été déployées au fil des années pour tenter de soutenir les efforts des autorités haïtiennes pour rétablir l’ordre. Une lacune majeure des interventions internationales à ce jour a été la mise en place de mesures visant à identifier et à exercer des pressions sur ceux qui fournissent un soutien financier et des armes aux gangs criminels ou qui capitalisent sur la corruption et le blanchiment d’argent endémiques qui existent dans le pays, afin de promouvoir leurs propres intérêts financiers et politiques. Les sanctions, annoncées par le Canada de novembre 2022 à juin 2023, visaient les élites économiques ainsi qu’un certain nombre de politiciens actuels et anciens. Il y a des raisons de croire que les individus désignés utilisent leur position de chefs de gangs criminels ainsi que de membres de l’élite politique et économique pour infliger des violences gratuites à la population haïtienne, y compris des violences sexuelles, au mépris total des normes et standards internationaux relatifs aux droits de la personne.
Les présentes modifications complètent et renforcent les mesures précédentes en désignant trois personnes supplémentaires. Une réponse canadienne soutenue vise à exercer des pressions sur ces individus afin qu’ils changent de comportement et cessent de soutenir les gangs. Les rapports de la mission canadienne en Haïti, ainsi que les réponses positives de la population locale et des partenaires internationaux, confirment que les sanctions ont été efficaces jusqu’à présent. Ils ont modifié la dynamique et contraint diverses parties prenantes à s’engager dans un dialogue politique. On s’attend à ce que les modifications continuent à avoir un effet dissuasif sur d’autres personnes engagées ou envisageant un comportement criminel similaire.
Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service
Les modifications entrent en vigueur à la date de leur enregistrement.
Les noms des particuliers inscrits seront disponibles en ligne pour que les institutions financières puissent les examiner et seront ajoutés à la Liste consolidée des sanctions autonomes canadiennes. Cela contribuera à faciliter le respect du Règlement.
La Gendarmerie royale du Canada est chargée de l’application des règlements sur les sanctions. Conformément à l’article 8 de la LMES, quiconque contrevient au Règlement est passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’une amende maximale de 25 000 $ ou d’un emprisonnement maximal d’un an, ou des deux; ou, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d’un emprisonnement maximal de cinq ans.
L’Agence des services frontaliers du Canada a également des pouvoirs d’application de la LMES et de la Loi sur les douanes et jouera un rôle dans l’application des sanctions.
Personne-ressource
Sébastien Sigouin
Directeur exécutif
Direction d’Haïti
Affaires mondiales Canada
125, promenade Sussex
Ottawa (Ontario)
K1A 0G2
Téléphone : 343‑548‑7620
Courriel : sebastien.sigouin@international.gc.ca