Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant l’Ukraine : DORS/2022-30
La Gazette du Canada, Partie II, volume 156, numéro 6
Enregistrement
DORS/2022-30 Le 24 février 2022
LOI SUR LES MESURES ÉCONOMIQUES SPÉCIALES
C.P. 2022-176 Le 24 février 2022
Attendu que la gouverneure en conseil juge que la situation en Ukraine constitue une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales qui a entraîné ou est susceptible d’entraîner une grave crise internationale,
À ces causes, sur recommandation de la ministre des Affaires étrangères et en vertu des paragraphes 4(1) référence a, (1.1) référence b, (2) et (3) de la Loi sur les mesures économiques spéciales référence c, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant l’Ukraine, ci-après.
Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant l’Ukraine
Modification
1 La partie 1 de l’annexe du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant l’Ukraine référence 1 est modifiée par adjonction, après l’article 202, de ce qui suit :
- 203 Taras Romanovych KOZAK
- 204 Volodymyr Mykolayovich OLIYNYK
- 205 Oleg Anatoliyovych VOLOSHYN
- 206 Vladimir Leonidovich SIVKOVICH
Antériorité de la prise d’effet
2 Pour l’application de l’alinéa 11(2)a) de la Loi sur les textes réglementaires, le présent règlement prend effet avant sa publication dans la Gazette du Canada.
Entrée en vigueur
3 Le présent règlement entre en vigueur à la date de son enregistrement.
RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION
(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)
Enjeux
La Fédération de Russie continue de violer la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.
Contexte
En novembre 2013, le refus du président ukrainien Viktor Ianoukovytch de signer un accord d’association historique avec l’Union européenne (UE) a entraîné d’énormes manifestations à Kyïv qui ont provoqué la chute de son gouvernement. En février 2014, les forces russes ont occupé la péninsule de Crimée en Ukraine. Après le « référendum » inconstitutionnel du 16 mars 2014, le président russe Vladimir Poutine a signé un traité visant à intégrer la Crimée à la Fédération de Russie le 18 mars 2014. Le Canada, de concert avec la communauté internationale, continue de condamner cette occupation illégale et cette tentative d’annexion de la Crimée.
Après l’annexion, des militants soutenus par la Russie ont rapidement pris le contrôle de parties importantes des régions de Donetsk et de Louhansk dans l’est de l’Ukraine, déclarant la création des soi-disant « Républiques populaires » de Donetsk et de Louhansk. Des « référendums d’indépendance » frauduleux, organisés par des séparatistes prorusses, ont eu lieu le 11 mai 2014, mais la communauté internationale ne les a pas reconnus. Des accords de paix ont été conclus lors de pourparlers tenus à Minsk, au Bélarus, en septembre 2014 et en février 2015 (les accords de Minsk). Depuis l’annexion illégale de la Crimée, la Russie a continué à soutenir les groupes séparatistes violents prorusses dans les régions ukrainiennes de Donetsk et de Louhansk.
Dans le cadre d’une action coordonnée avec les États-Unis et l’UE, le Canada a conclu que l’occupation illégale de la Crimée par la Fédération de Russie constitue une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales, et cette annexion est susceptible d’entraîner ou a déjà entraîné une grave crise internationale. Par conséquent, le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant l’Ukraine (le Règlement visant l’Ukraine) et le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie (le Règlement visant la Russie) ont été adoptés le 17 mars 2014. Ces deux règlements imposent une interdiction de transactions (un gel des avoirs) à l’endroit des particuliers ou des entités désignés. Ils interdisent ainsi aux personnes au Canada et aux Canadiens à l’étranger d’effectuer une opération portant sur un bien détenu par une personne désignée, de conclure une transaction avec une personne désignée, de fournir des services à une personne désignée ou d’autrement mettre de la marchandise à la disposition d’une personne désignée. Des modifications ont été apportées au Règlement visant la Russie les 19 et 21 mars, le 28 avril, les 4 et 12 mai, le 21 juin, le 24 juillet, le 6 août, le 16 septembre et le 19 décembre 2014; le 17 février et le 29 juin 2015; le 18 mars 2016; le 15 mars 2019; le 21 et 29 mars 2021. Le 21 mars 2021, le Règlement visant la Russie a été modifié pour ajouter, pour la première fois, des désignations supplémentaires liées aux violations flagrantes et systématiques des droits de la personne en Russie. Des modifications ont été apportées au Règlement visant l’Ukraine le 19 mars, le 12 avril, le 12 mai, le 21 juin, les 11 et 24 juillet, le 6 août et le 19 décembre 2014; le 17 février et le 29 juin 2015; le 18 mars et le 28 novembre 2016; les 4 et 15 mars, le 25 juin 2019; le 29 janvier 2020; le 29 mars 2021.
Le Décret concernant l’autorisation, par permis, à procéder à certaines opérations (mesures économiques spéciales - Ukraine) et le Décret concernant l’autorisation, par permis, à procéder à certaines opérations (mesures économiques spéciales - Russie), entrés en vigueur le 17 mars 2014, confèrent au ministre des Affaires étrangères le pouvoir d’autoriser, par permis, une personne se trouvant au Canada ou un Canadien se trouvant à l’étranger de réaliser une activité ou une transaction, ou une catégorie d’activités ou de transactions, qui fait l’objet d’une interdiction ou d’une restriction au titre du Règlement visant l’Ukraine et du Règlement visant la Russie.
En novembre 2021, la Russie a commencé à accumuler des troupes (environ 100 000) et des équipements militaires en Crimée et le long de la frontière avec l’Ukraine; de facto encerclant ainsi le pays sur trois côtés (nord, est et sud). Du côté nord, la Russie a déplacé 30 000 troupes militaires additionnelles ainsi que de l’équipement militaire au Bélarus en vue d’exercices militaires entre la Russie et le Bélarus (du 10 au 20 février 2022). Le secrétaire général de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), Jens Stoltenberg, a appelé l’opération russe au Bélarus le plus grand déploiement russe dans la région depuis la Guerre froide et a ajouté que les missiles Iskander à capacité nucléaire faisaient partie de l’exercice. L’Ukraine a rapporté que la Russie a déplacé 10 000 troupes additionnelles en Crimée.
Malgré les efforts diplomatiques pour résoudre la crise, la Russie a maintenant lancé une nouvelle action militaire contre l’Ukraine. Des négociations diplomatiques prennent place sur plusieurs fronts, dont (1) les discussions bilatérales en la Russie et les États-Unis (par exemple le Dialogue stratégique sur la stabilité entre les États-Unis et la Russie); (2) l’OTAN; (3) l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE); (4) le Format Normandie (Ukraine, Russie, Allemagne, France) afin de mettre de l’avant les accords de Minsk. Les discussions ont échoué à résoudre la crise et la Russie a maintenant lancé une nouvelle action militaire contre l’Ukraine. L’implication militaire directe de la Russie en Ukraine et ses violations claires de la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine restent des préoccupations sérieuses pour la communauté internationale.
Depuis 2014, le Canada a fourni à l’Ukraine plus de 890 millions de dollars en assistance multiforme afin de soutenir la sécurité, la prospérité et les objectifs de réforme en Ukraine. Le Canada considère actuellement un nombre d’options de réponse afin d’appuyer l’Ukraine et de dissuader l’agression russe, et ce, en collaboration étroite avec les alliés et partenaires du Canada.
Le 27 janvier 2022, le Canada a annoncé l’agrandissement et l’extension de l’opération UNIFIER; la mission de formation militaire non combattante et de renforcement des capacités du Canada visant à soutenir l’Ukraine. Le renouvellement de cette mission jusqu’en mars 2025 soutient le renforcement des capacités en cours des forces de sécurité ukrainiennes, et a la capacité de doubler l’empreinte de la mission de 200 à 400 formateurs des Forces armées canadiennes. Dans le cadre de l’extension de l’opération UNIFIER, Canada a aussi annoncé une augmentation des ressources au sein d’Affaires mondiales Canada et de l’ambassade canadienne à Kyïv afin de soutenir une Ukraine résiliente et démocratique. De plus, le Canada a annoncé 50 millions de dollars additionnels pour l’assistance internationale en Ukraine, dont 35 millions de dollars en développement et 15 millions de dollars en assistance humanitaire. Ces fonds sont en addition au prêt souverain jusqu’à 120 millions de dollars offerts à l’Ukraine le 21 janvier 2022 afin de soutenir sa résilience économique et les efforts de réforme du gouvernement.
En décembre 2021, les ministres des Affaires étrangères du G7 ont publié une déclaration condamnant le renforcement militaire de la Russie en Ukraine et dans les environs et ont réaffirmé leur engagement inébranlable en faveur de la souveraineté de l’Ukraine et de son intégrité territoriale. Les ministres des Affaires étrangères du G7 ont également réaffirmé leur soutien à l’implémentation intégrale des accords de Minsk pour mettre fin au conflit dans l’est de l’Ukraine. Les ministres des Affaires étrangères ont également affirmé qu’ils étaient prêts à prendre des mesures qui auraient de lourdes conséquences et un coût élevé pour la Russie en cas d’une nouvelle agression militaire contre l’Ukraine. Ces engagements ont été réitérés en janvier 2022 lors d’une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’OTAN, ainsi que lors de réunions de la Commission OTAN-Ukraine et du Conseil OTAN-Russie. Cette année marque le 8e anniversaire de l’invasion illégale et de la tentative d’annexion de la Crimée par la Russie, ainsi que le soutien russe au conflit dans l’est de l’Ukraine. Le Canada, en coordination avec plusieurs pays aux vues similaires (dont le Royaume-Uni et les États-Unis), a émis des déclarations au nom du ministre des Affaires étrangères condamnant l’occupation illégale russe et leur militarisation de la Crimée.
La durée des sanctions imposées par le Canada et ses partenaires aux vues similaires a été explicitement liée à la mise en œuvre complète des accords de Minsk par toutes les parties, et au respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières telles qu’elles sont reconnues par la communauté internationale; ces frontières incluent la Crimée et les zones maritimes limitrophes de l’Ukraine. Les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Australie et l’UE continuent aussi à mettre à jour leurs régimes de sanctions à l’encontre de particuliers et d’entités en Ukraine et en Russie.
Objectifs
- Démontrer l’engagement du Canada envers une politique de non-reconnaissance de l’occupation illégale de la Crimée par la Russie, ainsi que sa préoccupation constante à l’égard des violations de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine par la Russie.
- Maintenir l’alignement des mesures canadiennes avec celles prises par les partenaires internationaux du Canada pour démontrer la détermination et l’unité des pays alliés et partenaires dans la réponse aux actions de la Russie en Ukraine.
Description
Le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant l’Ukraine (les modifications) ajoute de quatre particuliers à la partie 1 de l’annexe du Règlement visant l’Ukraine.
Élaboration de la réglementation
Consultation
Affaires mondiales Canada mobilise régulièrement les intervenants pertinents, qui incluent des organisations de la société civile, des communautés culturelles, et des représentants d’autres gouvernements qui partagent des vues similaires pour discuter de l’approche du Canada relative à la mise en œuvre de sanctions.
Pour ce qui est du processus de modifications aux listes de sanctions, il n’est pas approprié d’y inclure des consultations publiques puisque la diffusion des noms des personnes visées par les sanctions pourrait entraîner la fuite de capitaux avant l’entrée en vigueur des modifications.
Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones
Une évaluation initiale de la portée géographique des modifications a été effectuée et n’a révélé aucune obligation découlant des traités modernes, puisque les modifications ne prendront pas effet dans une région visée par un traité moderne.
Choix de l’instrument
Au Canada, les règlements sont le seul instrument permettant d’appliquer des sanctions. Aucun autre instrument ne pourrait être considéré.
Analyse de la réglementation
Avantages et coûts
Les sanctions visant des personnes spécifiques ont moins d’impact sur les entreprises canadiennes que les sanctions économiques traditionnelles à grande échelle, et les modifications auront un impact limité sur les citoyens des pays des personnes inscrites sur la liste. Il est probable que les particuliers et entités désignés ont des liens limités avec le Canada et n’ont donc pas d’activités commerciales importantes pour l’économie canadienne.
Les banques et les institutions financières canadiennes sont tenues de se conformer aux sanctions. Elles le feront en ajoutant les nouvelles personnes désignées à leurs systèmes de surveillance existants, ce qui pourrait entraîner un coût de mise en conformité mineur.
Les modifications entraîneront des coûts supplémentaires pour les entreprises qui cherchent à obtenir des permis qui les autoriseraient à effectuer des activités ou des transactions spécifiques qui sont autrement interdites.
Lentille des petites entreprises
Les modifications pourraient entraîner des coûts de conformité supplémentaires pour les petites entreprises qui chercheront à obtenir des permis qui les autoriseraient à effectuer des activités ou des transactions spécifiques qui sont autrement interdites. Cependant, les coûts seront probablement faibles, car il est peu probable que les petites entreprises canadiennes aient ou auront des relations avec les particuliers et les entités nouvellement inscrits. Aucune perte significative d’opportunité pour les petites entreprises n’est prévue en raison des modifications.
Règle du « un pour un »
Puisque les modifications réglementaires n’entraîneront pas de coûts administratifs, la règle du « un pour un » ne s’applique pas.
Coopération et harmonisation en matière de réglementation
Bien que les modifications ne soient pas liées à un plan de travail ou à un engagement dans le cadre d’un forum officiel de coopération réglementaire, elles s’alignent sur les mesures prises par des partenaires aux vues similaires.
Évaluation environnementale stratégique
Il est peu probable que les modifications entraînent des effets importants sur l’environnement. Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a permis de conclure qu’une évaluation environnementale stratégique n’est pas nécessaire.
Analyse comparative entre les sexes plus (ACS+)
Le sujet des sanctions économiques a déjà fait l’objet d’une analyse des effets sur le genre et la diversité dans le passé. Bien qu’elles visent à encourager un changement de comportement en exerçant une pression économique sur des personnes à l’étranger, les sanctions prises en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales peuvent néanmoins avoir une incidence involontaire sur certains groupes et certaines personnes vulnérables. Les sanctions ciblées n’auront pas d’effet sur la Russie dans son ensemble, mais plutôt sur des personnes soupçonnées de mener des activités qui soutiennent, facilitent ou financent, directement ou indirectement, une violation de la souveraineté ou de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, ou y contribuent. Par conséquent, ces sanctions économiques n’auront probablement pas d’incidence importante sur les groupes vulnérables, en comparaison aux larges sanctions traditionnelles, et leurs effets collatéraux se limiteront aux personnes qui dépendent des personnes ciblées.
Justification
Les particuliers ajoutés à la partie 1 de l’annexe du Règlement visant l’Ukraine sont liés à l’annexion illégale et l’occupation continue de la Crimée par la Russie, ainsi qu’à la violation continue de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine. La Russie continue de consolider son contrôle illégal sur la Crimée, notamment par la construction d’un pont et de voies ferrées reliant la Russie et la péninsule de Crimée occupée par la Russie. Ces actions contribuent en outre à l’insécurité en Ukraine et à la déstabilisation de la région en appliquant les lois russes et en exerçant la souveraineté russe sur le territoire ukrainien sans l’autorisation du Gouvernement ukrainien. Cela comprend la conscription militaire forcée et illégale des résidents de Crimée, les violations des droits de la personne et les perturbations du trafic maritime et du commerce dans la mer d’Azov à travers le détroit de Kertch, entre autres actions. Les inscriptions à l’annexe envoient le signal que le Canada condamne fermement le comportement persistant de la Russie.
Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service
Les noms des particuliers et entités inscrits seront disponibles en ligne pour que les institutions financières puissent les examiner et seront également ajoutés à la Liste consolidée des sanctions autonomes canadiennes. Cela contribuera à faciliter la conformité aux modifications.
Les règlements de sanctions canadiennes sont appliqués par la Gendarmerie royale du Canada et l’Agence des services frontaliers du Canada. Conformément à l’article 8 de la Loi sur les mesures économiques spéciales, quiconque contrevient sciemment au Règlement sur les mesures économiques spéciales visant l’Ukraine est passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’une amende maximale de 25 000 $ ou d’une peine d’emprisonnement maximale d’un an, ou une combinaison des deux; ou encore, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d’une peine d’emprisonnement maximale de cinq ans.
Personne-ressource
Andrew Turner
Directeur
Direction de l’Europe de l’Est et de l’Eurasie
Affaires mondiales Canada
125, promenade Sussex
Ottawa (Ontario)
K1A 0G2
Téléphone : 343‑203‑3603
Courriel : Andrew.Turner@international.gc.ca