Vol. 148, no 27 — Le 31 décembre 2014

Enregistrement

TR/2014-105 Le 31 décembre 2014

LOI DONNANT SUITE À LA DÉCISION DE LA COUR SUPRÊME DU CANADA DANS L’AFFAIRE R. C. SHOKER

Décret fixant à la date qui tombe quatre-vingt-dix jours après la date d’enregistrement du présent décret la date d’entrée en vigueur de la loi

C.P. 2014-1449 Le 12 décembre 2014

Sur recommandation du ministre de la Justice et en vertu de l’article 14 de la Loi donnant suite à la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Shoker, chapitre 7 des Lois du Canada (2011), Son Excellence le Gouverneur général en conseil fixe à la date qui tombe quatre-vingt-dix jours après la date d’enregistrement du présent décret la date d’entrée en vigueur de cette loi.

NOTE EXPLICATIVE

(Cette note ne fait pas partie du Décret.)

Proposition

La Loi modifiant le Code criminel (Loi donnant suite à la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Shoker) [la Loi], anciennement connue comme le projet de loi C-30, vise à modifier le Code criminel en conférant le pouvoir de prélever des échantillons de substances corporelles en vue de permettre le contrôle efficace du respect des conditions interdisant la consommation de drogues illicites et d’alcool, qui figurent dans la majorité des ordonnances de probation, des ordonnances de sursis et des engagements de ne pas troubler l’ordre public prévus aux articles 810, 810.1 et 810.2.

Ce décret fixe à 90 jours après la date de l’enregistrement la date de l’entrée en vigueur de la Loi, sanctionnée le 23 mars 2011. Ce décret a été pris conformément à l’article 14 de la Loi.

Objectif

La Loi vise à garantir que les policiers et les agents de probation seront en mesure de surveiller les personnes qui, dans la collectivité, font l’objet d’une ordonnance d’interdiction de consommation de drogues illicites et d’alcool.

Contexte

Pendant de nombreuses décennies, les tribunaux de juridiction criminelle dans tout le Canada ont régulièrement prononcé des ordonnances visant à interdire à des personnes de consommer des drogues illicites et de l’alcool. Ces interdictions visaient à renforcer la sécurité publique en faisant en sorte que des personnes qui ont tendance à commettre des infractions criminelles lorsqu’elles sont sous l’effet de telles substances soient dissuadées, sous peine de sanctions criminelles, de consommer de telles substances. Dans le but d’assurer la surveillance et l’exécution efficaces de leurs ordonnances d’interdiction, les tribunaux imposaient également dans la plupart des cas une condition exigeant de la personne qu’elle fournisse sur demande un échantillon de substances corporelles, telles que l’haleine, l’urine, la salive, les cheveux et poils, ou le sang. Si l’individu refusait de fournir l’échantillon ou si l’échantillon révélait que la personne avait consommé des drogues illicites ou de l’alcool, le délinquant pouvait faire l’objet d’une poursuite pour violation d’une ordonnance.

En octobre 2006, la Cour suprême du Canada a statué qu’une condition de probation permettant qu’un échantillon de substances corporelles soit demandé dans le cadre d’une condition de s’abstenir de consommer des drogues illicites et de l’alcool était illégale parce que l’autorisation expresse de demander des échantillons de substances corporelles ne figurait pas dans les conditions énoncées dans la disposition du Code criminel relative aux ordonnances de probation (article 732.1).

La Loi vise à modifier les dispositions sur les ordonnances de probation, les ordonnances de sursis et les engagements de ne pas troubler l’ordre public, prévues au Code criminel, de manière à habiliter expressément le tribunal à imposer une condition requérant d’un délinquant qu’il fournisse un échantillon de substances corporelles à un policier ou à un agent de probation, sur demande ou à intervalles réguliers.

La Loi exige que le gouverneur en conseil désigne les types d’échantillons qui peuvent être prélevés. Le Règlement sur les échantillons de substances corporelles (le Règlement), qui entrera en vigueur en même temps que la Loi, prévoit que les types suivants d’échantillons de substances corporelles peuvent être prélevés : haleine, urine, sang, cheveux et poils, et salive. La Loi exige également que le Règlement prévoie les délais de destruction des échantillons de substances corporelles.

De plus, la Loi donne aux provinces et aux territoires le pouvoir d’établir, sous réserve des règlements, des règles particulières (désignations) sur la façon dont certains types d’échantillons doivent être prélevés, manipulés, entreposés, analysés et détruits en vertu des paragraphes 732.1(8), 742.3(6) et 810.3(1) du Code criminel, tel qu’ils ont été modifiés par la Loi. Ces désignations visent notamment les lieux où irait un délinquant pour fournir, par exemple, un échantillon d’haleine; les modalités de prélèvement des échantillons; le niveau de mesures de protection de la vie privée accordé au délinquant lors du prélèvement de l’échantillon; et les modalités applicables aux échantillons après le prélèvement.

Aucun échantillon de substances corporelles ne peut être prélevé ou utilisé en vertu de la Loi dans une administration jusqu’à ce que ces désignations aient été faites. Certaines administrations ont indiqué qu’elles étaient disposées à procéder aux désignations dès l’entrée en vigueur de la Loi; toutefois, d’autres ont mentionné qu’elles retarderont l’établissement de ces désignations jusqu’à ce qu’elles aient la capacité d’administrer un régime d’échantillons.

Répercussions

Si un délinquant omet, sans excuse légitime, de fournir un tel échantillon ou si un échantillon révèle la présence de drogues illicites ou d’alcool, le délinquant peut faire l’objet d’une poursuite pour violation de l’ordonnance de probation ou de l’engagement de ne pas troubler l’ordre public. Ces infractions sont passibles d’un emprisonnement maximal de deux ans. Dans le cas des ordonnances d’emprisonnement avec sursis, le tribunal peut révoquer cette peine et exiger que la personne purge le reste de sa peine en prison.

Consultation

En 2007, le Groupe de travail sur les délinquants à risque élevé du Comité de coordination fédéral-provincial-territorial (FPT) des hauts fonctionnaires (CCHF), composé de représentants du système de justice, des services correctionnels et des services de police, qui relève des sous-ministres FPT responsables de la justice, a entrepris de vastes consultations au sujet de l’arrêt R. c. Shoker, en vue de cerner les options législatives qui permettraient de rétablir dans le Code criminel l’autorité légitime d’imposer des conditions relatives au prélèvement d’échantillons de substances corporelles, tout en répondant aux préoccupations en matière de respect de la vie privée soulevées par la Cour.

À la suite de ces consultations, le Groupe de travail a présenté au gouvernement du Canada des recommandations demandant la rédaction de dispositions législatives visant à prévoir explicitement le pouvoir d’ordonner le prélèvement d’échantillons de substances corporelles afin de garantir le respect de l’interdiction de consommer de l’alcool ou des drogues dont peut être assortie une ordonnance de probation, une ordonnance de sursis ou en engagement de ne pas troubler l’ordre public.

Les recommandations ont également mis l’accent sur l’établissement de garanties suffisantes en matière de protection de la vie privée, tout en garantissant que les provinces et les territoires conservent un pouvoir discrétionnaire approprié pour gérer adéquatement le nouveau régime dans leur ressort respectif. Le projet de loi, déposé à la Chambre des communes en 2010, était compatible avec les recommandations FPT et il a été pleinement appuyé par l’ensemble des provinces et des territoires et les forces de l’ordre dans le cadre du débat au Parlement.

Après la sanction royale de la Loi le 23 mars 2011, les consultations FPT à l’intérieur du cadre du CCHF se sont poursuivies au sujet de la teneur du projet de règlement et de la forme des désignations opérationnelles par les provinces et les territoires en vertu des paragraphes 732.1(8), 742.3(6) ou 810.3(1) du Code criminel, tel qu’ils ont été modifiés par la Loi. En vertu de la Loi, le Règlement et les désignations doivent être établis avant qu’une administration ne puisse commencer à demander le prélèvement d’échantillons de substances corporelles en vertu du nouveau pouvoir.

Personne-ressource du ministère

Doug Hoover
Avocat
Section de la politique en matière de droit pénal
Ministère de la Justice
Téléphone : 613-954-1658