Décret modifiant l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril : DORS/2024-135

La Gazette du Canada, Partie II, volume 158, numéro 14

Enregistrement
DORS/2024-135 Le 17 juin 2024

LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL

C.P. 2024-713 Le 17 juin 2024

Sur recommandation du ministre de l’Environnement et en vertu du paragraphe 27(1) de la Loi sur les espèces en péril référence a, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Décret modifiant l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril, ci-après.

Décret modifiant l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril

Modifications

1 La partie 3 de l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril référence a est modifiée par adjonction, selon l’ordre alphabétique, sous l’intertitre « Mammifères », de ce qui suit :

Loup de l’Est (Canis sp. cf. lycaon)
Wolf, Eastern

2 La partie 4 de l’annexe 1 de la même loi est modifiée par suppression, sous l’intertitre « Mammifères », de ce qui suit :

Loup de l’Est (Canis lupus lycaon)
Wolf, Eastern

Entrée en vigueur

3 Le présent décret entre en vigueur à la date de son enregistrement.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Le présent résumé ne fait pas partie du Décret.)

Enjeux

Le loup de l’Est (Canis sp. cf. lycaon) a été inscrit à la partie 4 (Espèces préoccupantes) de l’annexe 1 (Liste des espèces en péril) de la Loi sur les espèces en péril (LEP) en 2003. En 2015, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canadaréférence 1 (COSEPAC) a transmis une réévaluation de l’espèce au ministre de l’Environnement (le ministre). Cette réévaluation faisait note d’une population de petite taille ayant une aire de répartition restreinte, ce qui rend peu probable une expansion de la population hors des aires protégées. Ainsi, le loup de l’Est est évalué comme une espèce menacée.

Le Décret modifiant l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril (le Décret) est nécessaire à la reclassification du loup de l’Est, dont le statut passerait d’« espèce préoccupante » à « espèce menacée ». Ce changement de statut vise à s’assurer que l’espèce bénéficie d’un niveau de protection proportionnel aux risques pesant sur sa survie. L’inscription de cette espèce en péril à l’annexe 1 de la LEP et les mesures de protection qui en découlent favorisent non seulement la protection de l’espèce, mais aussi la biodiversité globale et la productivité des écosystèmes.

Contexte

Le loup de l’Est est un canidé de taille moyenne dont les femelles pèsent en moyenne 24 kg et les mâles 29 kg. La couleur de la fourrure (pelage) est souvent décrite comme brun-roux ou fauve, mais elle est très variable. L’espèce se trouve principalement dans les paysages de forêt feuillue ou mixte. Elle aménage sa tanière près d’une source d’eau permanente dans des paysages dominés par des conifères ou des feuillus. Son territoire couvre souvent une superficie de près de 200 kmréférence 2. Le loup vit en meute familiale composée d’un couple de géniteurs et de leur progéniture de l’année en cours ou des années précédentes. La femelle donne naissance à cinq louveteaux en moyenne de la fin d’avril au début de mai, et les petits restent à la tanière durant les six à huit premières semaines. Les juvéniles se dispersent au bout de 37 semaines. L’alimentation du loup se compose généralement de cerfs de Virginie (Odocoileus virginianus), d’orignaux (Alces alces) et de castors (Castor canadensis).

On croit que l’aire de répartition du loup de l’Est est actuellement restreinte aux forêts du centre de l’Ontario et du sud-ouest du Québec, soit dans la région forestière des Grands Lacs et du Saint-Laurent. Le loup de l’Est est disparu de la plus grande partie de son aire de répartition d’origine en Amérique du Nord en raison de l’éradication des canidés de grande taille durant quatre siècles. On ignore la taille de la population, mais elle compte vraisemblablement moins de 1 000 individus matures. La population minimale estimée est de 236 individus matures, qui se trouvent pour la plupart dans des aires protégées. Le parc provincial Algonquin est presque le seul endroit pour lequel il existe des données sur la tendance de la population : la tendance est relativement stable.

En 1999, le COSEPAC a considéré le loup gris de l’Est (Canis lupus lycaon) comme une sous-espèce du loup gris (Canis lupus) et l’a classée dans la catégorie « données insuffisantes »référence 2. En 2001, son statut (à titre de loup de l’Est, Canis lupus lycaon) a été réexaminé, et l’espèce a été désignée « préoccupante ». Le statut taxonomique du loup gris est controversé, mais il y a maintenant un consensus, fondé sur des analyses génétiques, à savoir que le loup de l’Est n’est pas une sous-espèce du loup gris. En mai 2015, le loup de l’Est (Canis sp. cf. lycaon) a été réévalué par le COSEPAC comme nouvelle espèce sauvage, puis désigné comme « espèce menacée ». Dans l’Évaluation et le Rapport de situation de 2015 du COSEPAC, le loup de l’Est est considéré comme une espèce qui doit être protégée en raison de son caractère distinct, de sa persistance, de son importance comme grand carnivore, et parce qu’il s’agit sans doute d’une partie de la dernière population vestige de l’espèce de canidés de grande taille de l’est de l’Amérique du Nord.

Protections générales

La LEP est la principale loi fédérale régissant la protection des espèces en péril et prévenant la disparition, de la planète ou du paysréférence 3, des espèces terrestres. Environnement et Changement climatique Canada (le Ministère) joue un rôle de leadership en lien avec le mandat de la LEP, bien que la responsabilité en matière de conservation des espèces sauvages du Canada soit partagée entre les différents ordres de gouvernement. La LEP vise trois objectifs : prévenir la disparition des espèces sauvages du Canada ou de la planète; permettre le rétablissement des espèces sauvages désignées comme disparues du pays, en voie de disparition ou menacées; gérer les espèces préoccupantes afin d’éviter qu’elles ne deviennent des espèces en voie de disparition ou menacées. Lorsqu’une espèce terrestre est inscrite à l’annexe 1 de la LEP à titre d’espèce disparue du pays, en voie de disparition ou menacée, des interdictions générales en vertu des articles 32 et 33 de la Loi s’appliquent automatiquement sur le territoire domanialréférence 4. Ces interdictions générales rendent illégales de tuer un individu d’une espèce inscrite comme disparue du pays, en voie de disparition ou menacée, de lui nuire, de le harceler, de le capturer ou de le prendre, ou de posséder, de collectionner, d’acheter, de vendre ou d’échanger un individu — notamment une partie d’un individu ou un produit qui en provient. Il est également interdit d’endommager ou de détruire la résidence (par exemple nid ou terrier) de l’espèce.

L’inscription d’une espèce en tant qu’espèce en voie de disparition, menacée ou disparue du pays déclenche une planification obligatoire du rétablissement par le(s) ministre(s) compétent(s)référence 5 en coopération avec, entre autres, les gouvernements provinciaux ou territoriaux appropriés, d’autres ministres fédéraux dont relève le territoire domanial où se trouve l’espèce, et les conseils de gestion des ressources fauniques habilités par un accord sur des revendications territoriales. Si le rétablissement de l’espèce est jugé réalisable, le programme de rétablissement doit aborder les menaces à la survie de l’espèce, y compris toute perte d’habitat, et doit inclure, entre autres, la désignation de l’habitat essentiel, dans la mesure du possible, selon les meilleures données scientifiques disponibles.

Le programme de rétablissement doit également inclure l’échéancier prévu pour l’élaboration d’un ou de plusieurs plans d’action. Ceux-ci résument les projets et les activités nécessaires pour atteindre les buts et objectifs du programme de rétablissement. Les plans d’action comprennent de l’information sur l’habitat, des détails sur les mesures de protection et une évaluation des coûts et avantages socioéconomiques du programme de rétablissement.

Si de l’habitat essentiel est désigné sur le territoire domanial, le ministre compétent doit le protéger à l’aide des divers outils disponibles au titre de la LEP, incluant, mais sans s’y limiter, un décret de protection de l’habitat essentiel.

Menaces et facteurs limitatifs

La principale menace ou le principal facteur limitatif pesant sur le loup de l’Est hors des aires protégées est sans doute la mortalité d’origine humaine par chasse et piégeage, qui est facilitée par le réseau routier. D’après des recherches menées dans le parc provincial Algonquin, une mortalité excessive limiterait la dispersion et modifierait la dynamique de reproduction des meutes, entraînant une autre menace importante, soit l’introgression de gènes (hybridation) avec le coyote de l’Est (Canis latrans var.) en raison du manque de partenaires de la même espèce (c’est-à-dire les loups de l’Est). En outre, la perte et la fragmentation de l’habitat liées à l’expansion du réseau routier et à l’urbanisation devraient se poursuivre hors des aires protégées, ce qui empêchera sans doute l’expansion de la populationréférence 6.

Objectif

L’objectif du Décret modifiant l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril est d’appuyer la survie et le rétablissement du loup de l’Est au Canada.

Description

Le Décret modifie la Liste des espèces en péril (annexe 1 de la LEP) en classant le loup de l’Est dans une catégorie de risque plus élevé, soit de préoccupante à menacée.

Élaboration de la réglementation

Consultation

Le Ministère a publié la réponse du ministre pour le loup de l’Est dans le Registre public des espèces en péril le 23 décembre 2015, ce qui a marqué l’ouverture des consultations. Ces consultations ont été soutenues par le biais de la publication du document intitulé Consultation sur la modification de la liste des espèces en péril de la Loi sur les espèces en péril : espèces terrestres dans le Registre public en janvier 2016. Le loup de l’Est a été inclus dans cet ensemble avec une période de consultation prolongée de neuf mois, de janvier à octobre 2016. Le document de la consultation fournissait de l’information sur le loup de l’Est, dont la justification de la reclassification proposée, une description biologique et de l’emplacement de l’habitat. Il a été transmis directement à plus de 3 200 individus et organisations, dont des groupes autochtones, des gouvernements provinciaux et territoriaux, divers secteurs de l’industrie, des utilisateurs de ressources, des propriétaires fonciers et des organisations non gouvernementales environnementales (ONGE) ayant un intérêt envers cette espèce.

Bien que les consultations initiales remontent à 2016-2017, les commentaires reçus sont encore valides puisque le loup de l’Est fait face aux mêmes menaces qu’à ce moment (conclusion appuyée par le plan de gestion de l’espèce de 2021). Il n’y a pas eu de changements importants aux avantages et aux facteurs socioéconomiques depuis 2016-2017 concernant l’espèce. Ainsi, aucune consultation additionnelle, au-delà de la phase de consultation préalable à la publication dans la Partie I de la Gazette du Canada, avec des parties intéressées et des peuples autochtones (qui ont en grande partie appuyé la reclassification proposée) n’était justifiée.

Pour garantir des consultations exhaustives et inclusives, en 2016-2017, le Ministère a organisé des téléconférences et a défini des points de contact direct pour expliquer la proposition et aborder ses répercussions possibles, au besoin. Au total, le Ministère a reçu 2 627 commentaires d’ONGE, de groupes autochtones, d’une organisation industrielle, d’un gouvernement provincial, d’autres ministères fédéraux et de membres du public. La plupart appuyaient le classement du loup de l’Est dans une catégorie de risque plus élevé, soit de préoccupante à menacée, ou n’exprimait pas de position sur le sujet.

Des résumés des consultations initiales se trouvent dans le projet de Décret modifiant l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril, qui a fait l’objet d’une publication préalable dans la Partie I de la Gazette du Canada le 11 novembre 2023.

Publication préalable dans la Partie I de la Gazette du Canada

Le projet de décret a été publié dans la Partie I de la Gazette du Canada le 11 novembre 2023, et la publication a été suivie d’une période de consultation publique de 30 jours. Le lien vers cette période de consultation a été publié sur le site du Registre public, et une campagne dans les médias sociaux a été lancée afin de sensibiliser les parties intéressées et d’encourager leur participation. À la demande de ces parties, la date limite pour soumettre des commentaires au sujet du projet de décret a été repoussée au 26 janvier 2024.

Au total, 406 commentaires ont été reçus.

Il y a eu 18 commentaires à l’appui du projet de décret, dont 11 personnes, trois Premières Nations et/ou groupes autochtones, deux organisations non gouvernementales (ONG), une ONGE et une organisation gérée par un entrepreneur appartenant au gouvernement. Les intervenants ont souligné l’impact important du loup de l’Est sur l’écosystème, y compris l’importance de l’habitat essentiel et des corridors sécuritaires pour faciliter la dispersion des meutes. Un groupe des Premières Nations a fait part de son expertise en matière de loup de l’Est et a offert d’entreprendre des tests d’analyse dans son pays. Un intervenant a suggéré que la chasse et le piégeage de tous les animaux soient interrompus.

Trois commentaires formaient des observations générales concernant les populations de loups de l’Est, mais ne donnaient pas de position sur le projet de décret.

Au total, 385 commentaires se sont opposés au projet de décret.

De ce nombre, 339 commentaires provenaient d’une campagne d’envoi de courriels ou de lettres organisée par la Fédération ontarienne des gestionnaires d’animaux à fourrure. La lettre type de la campagne a identifié trois points principaux :

Dans les lettres types, 49 personnes ont fourni des renseignements supplémentaires et les raisons de leur opposition au projet de décret. Les détails sont inclus ci-dessous.

En dehors de la campagne d’envoi de lettres, 46 commentaires en opposition à l’inscription ont été reçus de la part de 32 intervenants, de 11 ONG, d’une administration municipale, d’une administration provinciale et d’un membre d’une Première Nation. Les commentaires portaient sur un éventail de sujets, mais étaient généralement liés à l’un des six thèmes suivants:

Commentaires sur l’analyse du résumé de l’étude d’impact de la réglementation (REIR)

Le Ministère a reçu des commentaires de particuliers, d’ONG et d’une administration municipale qui ont fait part de leurs préoccupations à l’égard de l’analyse effectuée dans le REIR initial, notamment :

Les espèces sauvages dépendent des écosystèmes pour leur habitat et sont également essentielles à la création et à la modification des écosystèmes. La présence de prédateurs au sommet peut aider à contrôler les populations et les activités des petits prédateurs et des proiesréférence 7. La disparition des prédateurs au sommet des écosystèmes a été liée à une augmentation du nombre de prédateurs plus petits, comme les coyotes, ce qui peut entraîner une pression accrue sur les proies. Bien que le Ministère n’ait pas de position officielle sur les impacts de la façon dont les espèces vivent ensemble dans un écosystème et dépendent les unes des autres, les impacts positifs et le soutien d’une plus grande biodiversité observés lors de la relocalisation et de la libération des loups dans le parc national de Yellowstone, aux États-Unisréférence 8, suggèrent que le reclassement du loup de l’Est pourrait améliorer les écosystèmesréférence 9.

Les coûts socioéconomiques potentiels pour des groupes tels que les agriculteurs, les gestionnaires de fourrures et les chasseurs/trappeurs découlant de la prédation accrue du loup de l’Est sur le bétail et les espèces proie sont abordés dans la section « Coûts » de la section « Analyse de la réglementation » ci-dessous.

Le Ministère a entrepris une analyse coûts-avantages du Décret, qui a tenu compte de tous les changements prévus au cours des 10 prochaines années découlant de l’application directe des interdictions générales de la LEP sur le territoire domanial, qui sont déclenchées avec l’inscription de l’espèce. Le Ministère a déterminé qu’il s’agissait d’une proposition peu coûteuse. Les détails se trouvent dans la section « Analyse de la réglementation » ci-dessous.

Répercussions sur les droits de récolte des Autochtones

Une personne et un membre d’une Première Nation se sont dits préoccupés par le fait que la proposition a une incidence sur les droits des Autochtones de récolter l’espèce.

Le Ministère reconnaît que les peuples autochtones ne pourront pas chasser ou piéger le loup de l’Est sur les terres fédérales lorsque le Décret entrera en vigueur. D’après les consultations menées à l’étape de l’inscription préalable à l’inscription et les commentaires formulés par les groupes des Premières Nations au cours de la période de commentaires de la Partie I de la Gazette du Canada, les groupes des Premières Nations touchés n’ont pas soulevé de préoccupations quant à la capacité de chasser ou de piéger le loup de l’Est. D’après les commentaires préliminaires recueillis dans le cadre des consultations, le loup de l’Est n’est généralement pas une espèce récoltée. Les groupes des Premières Nations qui ont pris position sur la proposition l’ont appuyée.

Protections provinciales existantes de l’Ontario déjà en place

Dans les commentaires qu’ils ont formulés, des particuliers et des ONG ont souligné les vastes protections provinciales déjà en place en Ontario, ce qui laisse entendre que les protections fédérales pourraient être redondantes et lourdes. Les commentateurs se sont également dits préoccupés par le fait qu’il n’y aura plus d’endroit où chasser et piéger le loup de l’Est en Ontario une fois que les nouvelles interdictions seront mises en œuvre.

Les interdictions prévues aux articles 32 et 33 de la LEP qui sont édictées par le Décret ne s’appliquent qu’aux terres fédérales. Les terres fédérales sont distinctes des terres provinciales et ne font donc pas double emploi avec les protections déjà en place en Ontario. La protection des espèces en péril est une compétence partagée à l’échelle du Canada. Le Ministère a la responsabilité essentielle de protéger, de conserver et de rétablir les espèces terrestres en péril et leur habitat essentiel. Le Ministère travaille en collaboration avec les provinces et les territoires, les groupes autochtones, d’autres ministères et organismes fédéraux et d’autres partenaires et intervenants afin de prendre des mesures de conservation pour rétablir les espèces en péril et protéger la biodiversité en général. Pour s’acquitter de ses obligations et engagements en vertu de la LEP, le Ministère poursuivra ses efforts en vue de la protection des espèces en péril. Le Ministère continuera de collaborer avec ses partenaires à l’exécution des activités de la LEP.

Identification du loup de l’Est

De nombreuses personnes, des ONG et une administration municipale ont souligné l’incapacité de faire la différence entre le loup de l’Est, le loup gris et le coyote sans tests génétiques. Des inquiétudes ont été soulevées quant au fait que l’incapacité de distinguer le loup de l’Est pourrait entraîner l’arrêt de toute chasse au canidé.

Le Ministère reconnaît qu’il peut être difficile de distinguer un loup de l’Est d’autres espèces de loups et d’hybrides coyote-loup à vue. Le Ministère, avec le concours de Parcs Canada, collaborera avec les gestionnaires des terres fédérales afin de mieux faire connaître l’existence de l’espèce sur le territoire domanial et contribuera à favoriser la promotion de la conformité pour les intervenants et les peuples autochtones potentiellement touchés, en utilisant du matériel éducatif qui aidera les trappeurs et les chasseurs à mieux identifier le loup de l’Est là où il se trouve sur le territoire domanial. Des avis seront envoyés aux gestionnaires des terres fédérales et au personnel de Parcs Canada afin de les sensibiliser aux nouvelles protections accordées au loup de l’Est où il se trouve sur le territoire domanial. Des avis seront envoyés aux gestionnaires des terres fédérales et au personnel de Parcs Canada afin de les sensibiliser aux nouvelles protections accordées au loup de l’Est avec l’entrée en vigueur du Décret, et le Ministère publiera un résumé du Décret dans le Registre public. D’autres documents, tels qu’une foire aux questions, peuvent être élaborés. Tous les documents de promotion de la conformité seront disponibles dans le Registre public.

Évaluation du COSEPAC

Des particuliers, des ONG et une administration municipale n’étaient pas d’accord avec l’évaluation du COSEPAC, soulignant qu’elle était désuète, qu’elle manquait de données et qu’elle faisait référence à une population stable dans le parc Algonquin. Plusieurs individus ont fait part de leur observation de la stabilité ou de l’augmentation des populations de loups de l’Est dans leur région et n’étaient pas d’accord avec le fait que la chasse et le piégeage constituaient une menace principale pour l’espèce.

Bien que le COSEPAC ait noté que la population de loups de l’Est était stable dans certaines régions (par exemple la population du parc provincial Algonquin), l’évaluation globale a révélé que le loup de l’Est était menacé. Le Ministère a recommandé l’inscription en se fondant sur les meilleures données scientifiques disponibles au moment de l’évaluation du COSEPAC et reflétant l’application du principe de précaution : les menaces à la survie ou au rétablissement du loup de l’Est devraient être prises en compte et les mesures rentables visant à prévenir la réduction ou la perte de l’espèce ne devraient pas être reportées en raison d’un manque de certitude scientifique totale. Le COSEPAC procède à une réévaluation d’une espèce sauvage précédemment désignée dans une catégorie de risque tous les 10 ans, ou plus tôt si nécessaire.

Restrictions futures sur le territoire non domanial

Deux ONG et une administration municipale se sont dites préoccupées par les restrictions potentielles qui pourraient être imposées à l’avenir sur le territoire non domanial.

Le relèvement du loup de l’Est sur la liste des espèces menacées en vertu de la LEP entraîne une série d’obligations pour le Ministère, y compris la préparation d’un programme de rétablissement qui comprend la désignation, dans la mesure du possible, de l’habitat essentiel nécessaire à sa survie et à son rétablissement. Le Ministère a pris note des préoccupations des intervenants, et la LEP offre la possibilité de tenir compte de ces facteurs dans les activités de planification du rétablissement, de délivrance de permis et de promotion de la conformité. Dans le cas où le ministre est d’avis que l’habitat essentiel sur le territoire non domanial n’est pas protégé efficacement par les lois d’une province ou d’un territoire, par une autre mesure en vertu de la LEP (y compris les accords conclus en vertu de l’article 11) ou par l’entremise de toute autre loi fédérale, le ministre doit recommander au gouverneur en conseil de prendre un décret pour qu’il applique les interdictions de destruction de l’habitat essentiel sur le territoire non domanial prévues par la LEP. Avant de faire une telle recommandation, le Ministère consulterait les ministres provinciaux ou territoriaux concernés, les intervenants et les groupes autochtones. Dans tous les cas, c’est le gouverneur en conseil qui prend la décision finale d’aller de l’avant. Tant qu’un programme de rétablissement n’est pas finalisé et que l’habitat essentiel n’est pas désigné, les coûts ou les impacts associés à un futur décret de protection de l’habitat essentiel ou à d’autres moyens nécessaires de protection de l’habitat essentiel sont incertains.

Autres commentaires reçus

Un gouvernement provincial a réitéré les commentaires qu’il avait formulés lors des consultations préalables à l’inscription, soulignant que le loup de l’Est n’est pas reconnu comme une espèce distincte dans sa province et qu’il pourrait y avoir des conséquences économiques négatives potentielles pour la province si l’espèce est reclassée.

Le statut taxonomique du loup de l’Est a fait l’objet de débats, mais les progrès récents de la recherche génétique ont permis de mieux comprendre les origines de plusieurs espèces et hybrides du genre Canis en Amérique du Nord. Les analyses génétiques ont indiqué que le loup de l’Est n’est pas une sous-espèce du loup gris, et tout indique que le loup de l’Est est une espèce distincte en vertu de la LEP. En ce qui concerne les préoccupations liées aux répercussions socioéconomiques de l’inscription à la cote supérieure, conformément à la Directive du Cabinet sur la réglementation, le Ministère a entrepris une analyse coûts-avantages du Décret. Les détails de cette analyse se trouvent dans la section « Analyse de la réglementation » ci-dessous.

Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones

Conformément à la Directive du cabinet sur l’approche fédérale pour la mise en œuvre des traités modernes, une évaluation des répercussions des traités modernes a été réalisée dans le contexte du Décret. La zone d’occurrence du loup de l’Est ne chevauche aucune terre autochtone visée par des ententes issues de traités modernes. Par conséquent, aucune répercussion sur les traités modernes n’est prévue.

L’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît et confirme les droits existants ancestraux ou issus de traités des peuples autochtones du Canada, y compris les droits liés aux activités, aux pratiques et aux traditions des peuples autochtones qui font partie intégrante de leur culture distincte.

La zone d’occurrence du loup de l’Est recoupe plusieurs réserves des Premières Nations, dont 11 réserves en Ontario et 3 au Québec. Pour assurer que des consultations exhaustives ont été entreprises, le Ministère a envoyé des courriels ou des lettres ciblés à des organisations des Premières Nations pour les inviter à formuler des commentaires lors des consultations initiales en 2016-2017. Cette correspondance a établi l’approche de consultation et a offert des sources d’information additionnelles sur les processus d’inscription et de consultation concernant les espèces terrestres. De plus, le Ministère a offert l’occasion de mener de plus amples discussions avec tout groupe qui en fait la demande lors de séances de consultation par téléphone ou par téléconférence. Cinq Premières Nations, soit quatre de l’Ontario et une du Québec, ont participé à de telles séances de consultation.

Durant les séances de consultation additionnelles, une Première Nation a indiqué que certains membres de la communauté piégeaient le loup gris et le coyote. Des préoccupations ont été soulevées au sujet de la difficulté d’identifier les espèces de canidés et les hybrides et des répercussions sur les activités de piégeage. Des membres se demandaient si la reclassification du loup de l’Est limiterait le piégeage dans certaines régions, étant donné que le loup de l’Est peut être accidentellement capturé dans des pièges ciblant d’autres espèces. Ces commentaires sont abordés à la section « Analyse coûts-avantages » du présent document.

Une Première Nation a mentionné qu’il n’y a que deux trappeurs dans sa communauté, et qu’elle ne sait pas s’ils ont déjà observé un loup de l’Est. Il a été proposé que la communauté reçoive plus de ressources éducatives et d’occasions d’améliorer sa perception des espèces en péril et d’encourager l’intendance. De l’information et de l’expertise provenant des communautés des Premières Nations seront demandées lors de la phase de la planification du rétablissement pour s’assurer d’inclure les connaissances et l’expertise scientifique autochtones dans les documents de rétablissement.

Des représentants de deux Premières Nations ont souligné l’importance sociale et culturelle du loup de l’Est dans leurs communautés. Ils ont proposé que des ressources supplémentaires soient attribuées pour favoriser la sensibilisation et la conservation du loup de l’Est dans leur communauté respective. Ils ont mentionné également leur intérêt à prélever des échantillons d’ADN sur les peaux récoltées pour permettre de mieux désigner l’aire de répartition de l’espèce. Les représentants ont aussi proposé que des ressources éducatives soient transmises aux chasseurs pour les aider à identifier le loup de l’Est.

Une Première Nation a souligné qu’elle n’a jamais ciblé les loups lors de ses activités de piégeage, et que seulement trois loups ont été récoltés par des membres de la communauté. Des questions ont été formulées au sujet des droits autochtones de récolter les espèces inscrites à l’annexe 1 de la LEP à des fins cérémonielles et médicinales. Le Ministère a indiqué que la récolte du loup de l’Est hors des réserves relève de la compétence des provinces. Toutefois, la possession d’individus récoltés sur des terres de réserve à des fins cérémonielles et médicinales ne serait pas assujettie à l’application des interdictions générales fédérales de la LEP. Un commentaire a également été fait indiquant que les restrictions ou la réglementation ciblant le loup de l’Est toucheront la communauté puisque l’espèce se trouve dans le territoire traditionnel de la communauté. En outre, il a aussi été mentionné que la communauté appuie de façon générale la protection des espèces en péril, mais que le Chef et le Conseil aimeraient assurer l’intégrité de leurs droits.

Une Première Nation a exprimé des préoccupations au sujet de la mobilisation, et a mentionné qu’elle nécessite davantage de temps pour le processus de consultation afin d’examiner les documents et de formuler des commentaires. Elle a souligné également un manque d’engagement de la part du gouvernement auprès des personnes qui détiennent des connaissances approfondies de l’espèce. Un membre de la communauté de la même Première Nation s’inquiétait également de la reclassification du loup de l’Est en raison des répercussions sur la concession de piégeage du castor. Il a mentionné que les chasseurs et les trappeurs seront touchés si une augmentation de la prédation par le loup de l’Est entraîne une réduction des populations d’orignaux, de cerfs et de castors. De plus, on a demandé si le Ministère dédommagerait les trappeurs pour leur aide concernant l’échantillonnage de l’ADN des espèces de canidés.

De nombreux commentaires soulignaient le besoin de matériel éducatif supplémentaire pour accroître la sensibilisation au loup de l’Est et pour aider les communautés à identifier cette espèce. Le Ministère élabore des documents sur la conformité et la promotion pour aider le public sur ce sujet. Le Ministère a évalué les répercussions socioéconomiques potentielles (ainsi que les avantages) que la proposition pourrait avoir sur les peuples autochtones en particulier. L’analyse est présentée ci-dessous, dans la section « Analyse coûts-avantages » du présent document. En ce qui concerne la durée de la période de consultation, les consultations initiales ont été entreprises sur une période de neuf mois (de janvier à octobre 2016), qui est la durée prévue pour les espèces terrestres faisant l’objet de consultations prolongées. Des séances de suivi avec les groupes autochtones et les parties intéressées ont été organisées après la période de consultation publique, jusqu’en 2017. Le Ministère ne ménage aucun effort pour s’assurer que les communautés autochtones ont le temps et les ressources nécessaires pour participer au processus de consultation.

Choix de l’instrument

La LEP précise qu’après avoir reçu une évaluation du COSEPAC sur la situation d’une espèce sauvage, le gouverneur en conseil peut examiner l’évaluation et peut, sur recommandation du ministre compétent :

La LEP précise également que si le gouverneur en conseil n’a pas pris de décision dans les neuf mois qui suivent la réception de l’évaluation du COSEPAC, le ministre modifiera la liste par décret, conformément à l’évaluation du COSEPAC. Dans le cas du loup de l’Est, le gouverneur en conseil a reçu l’évaluation du COSEPAC le 8 novembre 2023.

La protection des espèces en péril est une responsabilité que partagent le gouvernement fédéral et les provinces et territoires. Par conséquent, le gouvernement fédéral doit respecter ses responsabilités en matière de protection des espèces sur le territoire domanial, ou partout au Canada en ce qui concerne les oiseaux migrateurs et les espèces aquatiques.

Bien que la Loi comprenne des articles qui appuient les approches d’intendance volontaire en matière de conservation en collaboration avec tout autre gouvernement ou toute autre organisation ou personne au Canada, et que ces articles peuvent permettre d’obtenir des résultats positifs concernant une espèce, ils ne constituent pas une solution de remplacement aux dispositions de la Loi concernant la décision du gouverneur en conseil ou le décret ministériel.

Analyse de la réglementation

Cette analyse présente les conséquences supplémentaires, tant les avantages que les coûts, du Décret. Les conséquences supplémentaires sont définies comme étant la différence entre la situation de référence et la situation dans laquelle le Décret est mis en œuvre au cours de la même période. La situation de référence comprend les activités en cours sur le territoire domanial où se trouve une espèce et tient compte de tout changement prévu au cours des 10 prochaines années qui surviendrait sans l’adoption du Décret. Le scénario selon lequel le Décret est mis en œuvre comprend les répercussions qui devraient découler des interdictions générales, ainsi que tout possible décret de protection de l’habitat essentiel sur le territoire domanial. Puisque l’habitat essentiel est seulement désigné dans un programme de rétablissement après l’inscription à l’annexe 1 de la LEP, l’étendue de la désignation de l’habitat essentiel (et donc des mesures de protection connexes) est inconnue pour l’instant. Par conséquent, l’analyse est fondée sur les meilleures informations disponibles au moment de la publication.

Une période d’analyse de 10 ans a été retenue, car le statut de l’espèce doit être réévalué par le COSEPAC tous les dix ans. Les coûts présentés selon leur « valeur actualisée » ou « valeur sur plus de dix ans » ont été calculés à un taux d’actualisation de 3 %référence 10 pour la période de 2024 à 2033, pour l’année de référence de 2023. Sauf indication contraire, toutes les valeurs monétaires indiquées dans la présente analyse sont en dollars constants de 2023.

Le Décret devrait déclencher des mesures de protection et des actions coordonnées pour soutenir le rétablissement du loup de l’Est, ce qui aidera à préserver et à améliorer, à long terme, les valeurs socioéconomiques associées et l’importance culturelle pour les peuples autochtones, de même que les occasions économiques, récréatives et culturelles pour les Canadiens (par exemple le piégeage, l’observation des espèces sauvages, l’existence continue d’une espèce emblématique du Canada). Les avantages pour la biodiversité ne sont pas tous associés à des modèles précis d’attribution des valeurs. La valeur monétaire est l’un de ces éléments qui peuvent être quantifiés, mais cela ne représente pas le tableau complet de la valeur de la conservation d’une espèce. Les coûts supplémentaires entraînés par le Décret devraient être faibles.

Certains trappeurs des Premières Nations pourraient subir des pertes monétaires découlant de l’interdiction sur les réserves des Premières Nations d’activités pouvant blesser le loup de l’Est, comme le piégeage. Ces pertes seraient de zéro à une valeur actuelle de 1,2 million de dollars sur 10 ans, selon le scénario de conformité adopté. Aucune autre partie intéressée ne devrait subir de pertes liées au respect des interdictions générales, bien que certaines puissent devoir faire une demande de permis en vertu de la LEP pour effectuer des activités précises. Pour toutes les demandes de permis prévues, le coût additionnel combiné pour les demandeurs (c’est-à-dire les Premières Nations, d’autres ministères fédéraux, des chercheurs et des scientifiques) est estimé à environ 80 000 $ lors de la première année seulement. Il est supposé que les demandeurs n’auraient besoin de demander chaque permis requis qu’une seule fois au cours de la période de 10 ans et que les demandes seront soumises au cours de la première année suivant l’inscription. Les coûts administratifs pour le gouvernement liés au Décret devraient être faibles et découler de l’élaboration du programme de rétablissement et du plan d’action, de l’examen des demandes de permis et des activités de promotion de la conformité et d’application de la loi. Ces coûts sont estimés entre 800 000 et 1,1 million de dollars sur 10 ans. Par conséquent, le coût global pour la société serait d’environ 900 000 à 2,4 millions de dollars sur 10 ans.

Avantages

L’évaluation des avantages associés à la protection du loup de l’Est suit le cadre de la valeur économique totale (VET)référence 11. L’existence continue du loup de l’Est sera probablement assurée par une combinaison de mesures de protection et de rétablissement prises par les gouvernements fédéral et provinciaux, les peuples des Premières Nations et les parties intéressées. Les avantages décrits ci-dessous sont associés à la réussite du rétablissement des populations de loups de l’Est et ne découlent pas directement du Décret. Le niveau actuel de connaissances scientifiques au sujet des tendances de la population demeure faible, mais l’inscription de l’espèce à une catégorie de risque plus élevée pourrait permettre plus d’occasions de financement de recherches scientifiques ou de projets de rétablissement qui auraient des avantages pour l’espèce dans le cadre de programmes de financement existants dédiés à la conservation et au rétablissement des espèces en péril. De nouvelles recherches scientifiques pourraient permettre de déterminer les facteurs qui pourraient aider au rétablissement de l’espèce à long terme.

Importance culturelle pour les peuples des Premières Nations

En tant qu’espèce de loup, le loup de l’Est a de nombreuses significations pour les peuples des Premières Nations et est important dans les façons de vivre de nombre de communautés. Les terres sur lesquelles réside le loup de l’Est ont également une grande importance pour les communautés des Premières Nations en raison des nombreuses espèces de la flore et de la faune qui font partie de l’écosystème forestier, mais également des nombreuses pratiques traditionnelles qui ont encore lieu sur ces terres.

Dans le but de recueillir des connaissances sur le loup de l’Est, certains membres des Premières Nations ont fait part au ministère de l’importance des loups et de leurs tanières dans leur culture et leurs traditionsréférence 12. Des recherches réalisées par une Première Nation en collaboration avec des universitaires ont également permis de noter une importante interdépendance entre le loup de l’Est et la loi Anishinaabeg, mais également avec la façon de vivre des Algonquins. Selon ces recherches, les loups continuent à ce jour d’être considérés comme « équivalents aux humains » par quelques peuples autochtonesréférence 13. Des histoires et des enseignements relatifs aux loups existent dans de nombreuses communautés des Premières Nations. Pour celles consultées, les loups partagent de nombreuses caractéristiques spirituelles de l’être humain (par exemple vivre en groupes familiaux et prendre soin les uns des autres), et sont un modèle d’interaction avec la nature (par exemple chasse, durabilité ou maintien d’un équilibre naturel). Les loups vivent des relations semblables à celles que nous connaissons avec un frère ou un autre être humain. Certaines personnes ont fait part de diverses expériences avec des loups, telles que marcher avec eux, dormir près d’eux, se sentir protégées par eux et vivre des expériences spirituelles avec eux dans la natureréférence 14.

Certaines communautés des Premières Nations au Canada font état d’une cohabitation avec les loups. Dans certaines communautés, le fait de dire que quelqu’un « chasse comme un loup »référence 15 est un compliment. Les loups, considérés comme des « esprits puissants de la forêt » par certaines Premières Nations de l’est du Canada, représentent les vertus suivantes : protection, loyauté, humilité et modestieréférence 12. Les nations athabascanes considèrent aussi le loup comme un être aussi important qu’un frère. La désignation traditionnelle de certains clans matrilinéaires comme des « clans du Loup » dans les cultures huronne, mohawk, oneida et onondaga remonte à une adaptation précoce à un mode de vie axé sur l’agricultureréférence 16. Dans ces systèmes de clans, les différents clans sont représentés par des animaux et des oiseauxréférence 17; les clans de loups étaient parmi les plus courants. Les membres d’un clan essaient de vivre selon les valeurs attribuables à l’animal de leur clan, qui est considéré comme un parent et un ancêtre des membres du clanréférence 18.

Comme le décrit McIntyre (1995), si un loup est piégé accidentellement et gravement blessé, on lui explique la situation avant de le tuer, et ses restes sont traités avec dignité pour empêcher les mauvais esprits d’avoir une incidence sur la chasse dans l’avenirréférence 19. Des membres de la Nation des Pieds-Noirs décrivent le loup comme un animal médicinal sacréréférence 13. Certains sont d’avis que la « nation » de loups mérite les mêmes droits que l’être humain. De plus, de nombreuses histoires et légendes des Premières Nations dressent un portrait positif du loup, le considérant comme un Aîné, un professeur, un mentor ou un bienfaiteur.

Utilisation directe par les peuples des Premières Nations par le biais de la chasse

Les peuples des Premières Nations chassent les loups pour diverses raisons depuis des siècles. Par exemple, des parties du loup ont déjà été utilisées dans les communautés des Premières Nations des forêts de l’Est, des plaines et de la côte ouest à des fins rituelles et cérémonielles. Dans certains cas, des bourses en peau de loup servaient durant les cérémonies à conserver des articles ou des objets de grande importanceréférence 20. De façon plus générale, les os, le poil, les dents, la peau et les organes du loup ont déjà été utilisés lors de cérémoniesréférence 21. Dans certaines communautés des Premières Nations, des peaux de loup étaient utilisées pour invoquer l’esprit du loup durant des cérémoniesréférence 13. Bien que les détails des cérémonies sacrées impliquant le loup ne puissent pas être communiqués hors des diverses communautés des Premières Nations, certaines cérémonies mohawks et des Premières Nations de la côte ouest incluent encore des parties du loupréférence 22.

Les peuples des Premières Nations des forêts de l’Est chassent le loup pour les peaux et les parties du corps afin de fabriquer des vêtements ou des ustensiles, et à des fins décoratives, récréatives et commerciales. Ils ont aussi à l’occasion chassé le loup pour la vianderéférence 23,référence 13. Toutefois, hors des périodes de pénuries alimentaires, le loup est rarement chassé pour sa vianderéférence 21. En d’autres termes, le loup est seulement considéré comme une source de nourriture de dernier recours.

Piégeage non autochtone

Les loups et les coyotes sont récoltés principalement par le biais du piégeage afin de vendre les fourrures et les cuirs. D’après les résultats de ventes aux enchères de fourrures au Canada de 2016 à 2021référence 24, un examen des offres sur le marché et les données anecdotiques, la valeur moyenne d’une fourrure de loup de l’Est est de 65 à 204 $, selon les caractéristiques physiques telles que la taille et la couleurréférence 25.

Avantages fonctionnels

Les loups structurent les écosystèmes dans lesquels ils évoluent. Certaines Premières Nations soulignent que le loup de l’Est peut contrôler les populations de cerfs qui sont trop nombreuses ou qui sont atteintes de maladiesréférence 12. La surpopulation de cerfs entraîne une hausse des probabilités de collisions avec des voitures, ce qui a des coûts en termes de matériel et de santé pour la société.

Valeur récréative

Les loups présentent une valeur récréative pour les Canadiens et les touristes, car de nombreuses personnes aiment les observer dans la nature. Un indicateur de la valeur récréative des loups réside dans le fait qu’on en trouve dans la plupart des zoos commerciaux au Canada, dans lesquels les visiteurs paient pour observer la fauneréférence 26.

Dans le parc national de Yellowstone, aux États-Unis, le rétablissement d’une population de loups a contribué à des revenus de tourisme additionnels de 69 millions de dollars par année pour les économies localesréférence 27. Le parc provincial Algonquin, qui abrite le plus d’occurrences connues du loup de l’Est, organise des activités de « hurlement des loups », où les visiteurs et les gardes du parc essaient d’imiter les hurlements pour encourager une réponse de la meute de loups située dans le parcréférence 28. La dernière activité réussie de ce genre avait attiré 1 204 personnes dans le parc nationalréférence 29.

Valeur existante

De nombreuses personnes tirent leur bien-être du simple fait de savoir qu’une espèce existe maintenant ou existera dans le futur. Bien qu’il n’existe pas d’estimations quantitatives de la valeur de l’existence du loup de l’Est, de multiples études indiquent que la société accorde une valeur substantielle aux espèces vulnérables, et en particulier aux espèces charismatiques, symboliques ou emblématiquesréférence 30,référence 31,référence 32. Les loups sont une espèce sauvage emblématique au Canada, comme le prouve leur présence dans la plupart des zoosréférence 33, de même que leur proéminence dans les noms d’équipes sportivesréférence 34. De plus, de multiples évaluations effectuées avant 2009 aux États-Unis permettent d’estimer une volonté de payer (moyenne de 115 $ par ménage sous forme de paiement unique) pour réintroduire le loup gris dans les espaces naturels locaux ou éviter sa disparition à l’échelle localeréférence 35. Bien que la volonté de payer pour empêcher la disparition du loup de l’Est au Canada puisse être différente, cela démontre l’intérêt du grand public pour la conservation du loup.

Valeur d’option

Le public et les entreprises du Canada peuvent valoriser la préservation de l’information génétique qui pourrait être utilisée à des fins biologiques, médicinales, de génie génétique et autres. Puisque le loup de l’Est est génétiquement distinct des autres espèces de canidés, comme le loup gris et le coyote de l’Est, il peut avoir une valeur d’option liée à la recherche, à la prévention de maladies et à de possibles mesures de conservation dans l’avenir.

De plus, une décision au sujet des mesures à prendre pour empêcher la disparition de l’espèce comprend plusieurs enjeux touchant l’incertitude et l’irréversibilité. Notamment, l’irréversibilité possible d’une décision de ne pas protéger l’espèce crée un déséquilibre dans le coût de la prise d’une « mauvaise » décision. La théorie économique donne également à penser qu’il y a un avantage à éviter un résultat irréversible, soit la disparition de l’espèceréférence 36. Ainsi, même dans des situations où les coûts prévus entourant la protection dépassent les avantages quantifiés, les avantages globaux de la protection pourraient être plus importants que les coûts malgré les facteurs d’incertitude et d’irréversibilité.

Coûts

Les coûts pour les membres des Premières Nations, les ministères fédéraux et les autres intervenants devraient augmenter en raison des mesures de conformité aux interdictions générales, y compris les demandes de permis et la conformité à tout décret éventuel de protection de l’habitat essentiel sur le territoire domanial. Les coûts pour le gouvernement du Canada comprendraient ceux liés à l’élaboration du programme de rétablissement et du plan d’action, au traitement des demandes de permis, ainsi qu’aux activités d’application de la loi et de promotion de la conformité. Ces coûts sont abordés ci-dessous.

Coûts pour les membres des Premières Nations de se conformer aux interdictions générales

Les membres des Premières Nations qui piègent des canidés dans les réserves pourraient possiblement être touchés par le décret, puisque les interdictions générales ne permettront plus cette activité sur le territoire domanial, peu importe la raison. Le piégeage constitue la plus grande menace anthropique au rétablissement du loup de l’Estréférence 37.Selon certains indicateurs, on piège le loup et le coyote dans la zone d’occurrenceréférence 38 du loup de l’Est, et certains membres de réserves de Premières Nations possiblement touchées pourraient participer à cette activité. Cependant, il est difficile d’estimer le niveau de piégeage du loup de l’Est par rapport à celui d’autres espèces de canidés et, plus précisément, d’estimer l’étendue du piégeage du loup de l’Est dans les réserves des Premières Nations par rapport au reste du territoire. Seules 3 des 14 réserves de Premières Nations où se trouve le loup de l’Est n’ont pas les conditions adéquates pour le piégeage.

Analyse des pertes liées au piégeage commercial par les trappeurs des Premières Nations

Étant donné le manque de données sur le piégeage par les Premières Nations dans les réserves et les incertitudes quant à la manière dont les trappeurs modifieraient leur comportement pour se conformer au Décret, trois scénarios ont été élaborés pour estimer les répercussions possibles du Décret sur le piégeage commercial. Les scénarios n’offrent pas de conseils sur la manière dont les trappeurs devraient effectuer leurs activités de piégeage ou sur l’emplacement de celles-ci; ils ont plutôt été créés à des fins d’analyse d’impact. Les scénarios sont présentés en ordre croissant de coûts estimés pour les trappeurs des Premières Nations.

Scénario 1 : Les trappeurs des Premières Nations choisissent de piéger des canidés hors des réserves et du territoire domanial, plutôt que dans les réserves

Le premier scénario est fondé sur des données anecdotiques et sur la préférence du loup de l’Est à éviter les zones occupées par l’humain. L’une des principales hypothèses est que le piégeage des canidés dans les réserves situées dans la zone d’occurrence du loup de l’Est est actuellement absent ou minime. Dans les cas où quelques trappeurs des Premières Nations s’adonnent au piégeage des canidés dans les réserves, ce scénario présume qu’ils choisiraient de piéger des canidés hors des réserves pour se conformer aux interdictions générales prévues par la LEP de tuer des individus. L’hypothèse est qu’ils ne pourraient pas piéger d’autres loups sans risque important de piéger accidentellement des loups de l’Est. On présume aussi que le piégeage ciblé de coyotes présenterait toujours un risque, quoique modéré, de prendre accidentellement des loups de l’Est. Des coûts pourraient être associés à la relocalisation des pièges hors des réserves et à la nécessité de se déplacer sur de plus grandes distances pour relever les pièges, ainsi que pour demander un permis de chasse provincial qui est requis hors réserve. On suppose cependant que, dans la plupart des cas, compte tenu de la taille relativement limitée des réserves des Premières Nations, les trappeurs autochtones opérant dans les réserves possèdent probablement déjà un permis de piégeage provincial. Une analyse géospatiale montre que les réserves des Premières Nations où des activités de piégeage des canidés peuvent se produire chevauchent moins d’un pour cent de la zone d’occurrence du loup de l’Est, et que les terres environnant la plupart des réserves des Premières Nations conviennent probablement au loup de l’Est, ce qui signifie que la distance à parcourir pour atteindre de nouveaux sites de piégeage serait relativement courte, dans la plupart des cas.

Selon ce scénario, d’après la distance parcourue pour déplacer les activités de piégeage à l’extérieur de l’aire de répartition du loup de l’Est, les pertes nettes estimées des Premières Nations pourraient se situer entre zéro et quelques milliers de dollars par année. Cependant, on présume que les revenus perdus seraient compensés par des prix plus élevés visant à maintenir les profits de la vente de canidés piégés hors des réserves (sur le territoire non domanial).

Scénario 2 : Les trappeurs des Premières Nations dans les réserves remplacent leur équipement de piégeage des loups pour de l’équipement ciblant d’autres espèces

Bien qu’il ne soit pas nécessairement convenable d’un point de vue culturel, ce scénario présume qu’une proportion de trappeurs des Premières Nations choisiraient de remplacer leur équipement de piégeage pour cibler d’autres espèces dans les réserves (par exemple le coyote ou le castor). Ce scénario repose sur deux hypothèses. La première suppose que certains trappeurs des Premières Nations pourraient trouver plus facile de poursuivre leurs activités de piégeage dans les réserves plutôt que de changer d’emplacement, ou préférer cette option. La deuxième suppose que les pièges et les méthodes ciblant les coyotes sont jugés suffisamment différents de ce qui est utilisé pour le piégeage des loups, de manière à empêcher en tout ou en majorité la prise accidentelle de loups de l’Estréférence 39. Les trappeurs qui choisiraient de remplacer leur équipement devraient en acheter du nouveau, en plus de modifier leurs méthodes pour cibler et capturer d’autres animaux que les loups.

Même s’il peut s’agir d’une option plus coûteuse pour les trappeurs des Premières Nations, on ne s’attend pas à ce qu’ils subissent des pertes importantes selon ce scénario, qui pourrait être un choix plus viable dans les cas où le piégeage des loups sur les terres entourant les réserves ne serait pas l’option retenue. Dans ce scénario, on suppose qu’aucun autre facteur ne vient empêcher une augmentation du piégeage d’autres espèces (par exemple la viabilité des populations) équivalente à la diminution du piégeage des canidés.

Scénario 3 : Les trappeurs des Premières Nations cessent toutes leurs activités de piégeage des canidés dans les réserves des Premières Nations et sur le territoire domanial

Même si les données anecdotiques semblent indiquer un piégeage minime dans les réserves, on ignore pour l’instant dans quelle mesure le piégeage a lieu dans les réserves. Par conséquent, par souci de prudence, ce scénario plus coûteux présume que 100 % des canidés récoltés par les Premières Nations le sont sur le territoire de réserves fédérales. On présume donc qu’un nombre de canidés relativement plus élevé qu’en réalité est capturé chaque année dans les réserves des Premières Nations. Selon ce scénario, les trappeurs des Premières Nations cesseraient toutes leurs activités de piégeage des canidés dans les réserves afin de se conformer aux interdictions générales prévues par la LEP de tuer des loups de l’Est. Cela suppose qu’ils ne pourraient plus piéger d’autres loups sans un risque élevé de prendre accidentellement des loups de l’Est et qu’à leur avis, le loup de l’Est risquerait encore de se prendre accidentellement dans les pièges ciblant les coyotes. Certains trappeurs pourraient opter pour le piégeage hors des réserves (sur le territoire non domanial) et pour le piégeage d’autres espèces que les canidés. Toutefois, selon les hypothèses de ce scénario, on présume que ces options ne suffiraient pas à compenser entièrement les pertes entraînées en raison du nombre relativement élevé de trappeurs pratiquant le piégeage de canidés.

De plus, ce scénario présume qu’aucune substitution n’a lieu. Ainsi, les pertes subies par les communautés des Premières Nations sont estimées à partir d’une approximation du nombre de canidés récoltés par les trappeurs des Premières Nations, laquelle est multipliée par le prix moyen d’une fourrure selon le prix courant. Environ 50 % des trappeurs au Canada s’identifient comme Autochtonesréférence 40. On présume donc que 50 % des loups de l’Est piégés le sont par des personnes autochtones. Cette proportion est multipliée par le nombre de peaux de coyote et de loup récoltées dans la zone d’occurrence du loup de l’Est d’après les statistiques provinciales publiées, ce qui donne pour résultat le nombre approximatif de canidés récoltés par les trappeurs des Premières Nations. Les prix des fourrures et des peaux varient beaucoup en fonction de plusieurs facteurs, dont les caractéristiques physiques (par exemple la taille et la couleur). La présente analyse suppose que la valeur moyenne d’une fourrure de canidé correspond à la plage de 77 $ à 248 $, d’après les rapports de ventes d’importants encans de fourruresréférence 41. Comme on ne dispose d’aucun moyen d’estimer les dépenses moyennes associées au piégeage des loups et à la vente de peaux, les pertes pour les trappeurs des Premières Nations sont basées sur les recettes.

En s’appuyant sur ces hypothèses et les données disponibles, les pertes estimées des trappeurs des Premières Nations selon ce scénario seraient de 50 000 $ à 150 000 $ par année, ou de 400 000 $ à 1 240 000 $ sur dix ans. Ces estimations sont considérées comme des surestimations, étant donné la nature prudente des hypothèses posées.

On s’attend à ce que les scénarios 1 ou 2 soient moins susceptibles de se produire que le scénario 3, selon le comportement le plus rationnel qui devrait être adopté par les trappeurs des Premières Nations qui piègent des canidés dans les réserves.

Analyse du piégeage et de la possession à des fins non commerciales dans les réserves des Premières Nations

Conformément à la LEP, la possession de parties de loup de l’Est ou de produits dérivés à des fins cérémonielles ou médicinales serait encore autorisée dans les réserves des Premières Nations après la mise en œuvre du Décret. D’après les résultats des consultations, rien n’indique que des parties de loup de l’Est soient gardées dans les réserves à des fins autres que cérémonielles et médicinales. Même si la possession à ces fins faisait l’objet d’une exemption au titre de la LEP, il serait tout de même interdit de tuer un loup de l’Est dans les réserves des Premières Nations. Ainsi, en plus des coûts associés à l’interdiction du piégeage commercial, les Premières Nations pourraient subir d’autres coûts en lien avec ces autres usages, lesquels ne sont pas pris en considération dans les trois scénarios précédents.

Il est fort probable que, pour se conformer aux interdictions générales, les trappeurs des Premières Nations remplaceraient cette activité par le piégeage hors des réserves et du territoire domanial. Ces trappeurs subiraient des coûts correspondant à la distance qu’ils auraient à parcourir pour atteindre un nouveau site de piégeage hors de la réserve. En supposant que le piégeage à des fins non commerciales est relativement peu fréquent, ces trappeurs des Premières Nations subiraient vraisemblablement des coûts minimes.

Il est aussi possible que certains trappeurs cesseraient complètement leurs activités de piégeage de canidés. Même si les coutumes des peuples et communautés des Premières Nations dans la zone d’occurrence du loup de l’Est ne sont pas tout à fait connues, on présume que si les trappeurs cessaient le piégeage de canidés, ils pourraient perdre la possibilité de profiter des usages traditionnels des peaux et autres parties de loup. Il pourrait s’agir de cérémonies, lesquelles peuvent être au cœur de l’identité de nombreux membres des Premières Nationsréférence 21,référence 22, et de l’utilisation à des fins décoratives ou récréatives, ou comme artéfactréférence 42. Les Autochtones perdraient aussi la possibilité de se servir de cette expérience spéciale comme une occasion de transmettre des connaissances et d’enseigner des compétences particulières aux plus jeunes membres de leur famille ou de profiter des interactions inhérentes à cette activité, comme la création de liens entre les personnes, dont la famille et les amis. Une partie de ces pertes pourrait être remplacée à un coût modéré par l’achat de peaux sur le marché de la fourrure, mais les utilisations qui dépendent de l’expérience de piégeage proprement dite ne pourraient pas être remplacéesréférence 43.

En outre, certains trappeurs des Premières Nations ciblent possiblement les canidés dans les réserves pour réduire la prédation sur d’autres espèces qui font partie des principales espèces ciblées pour tirer un revenu du piégeage ou pour la consommation. Le Décret, en interdisant le piégeage des canidés dans les réserves des Premières Nations, pourrait avoir une incidence sur la productivité des autres lignes de piégeage des trappeurs des Premières Nations, entraînant ainsi des pertes de revenus dont l’ampleur n’a pas été estimée en raison d’une importante incertitude.

Analyse des autres impacts directs possibles sur le piégeage par des non-Autochtones

Puisque le piégeage et la chasse des canidés ne sont actuellement pas autorisés dans les dix propriétés administrées par le gouvernement fédéral qui sont touchées par le décret (voir le tableau 1 ci-dessous), il n’y aura pas d’impact pour les chasseurs et les trappeurs sur ces propriétés.

Durant les consultations suivant la publication préalable dans la Partie I de la Gazette du Canada, certains trappeurs ont soulevé des inquiétudes quant au fait que le fardeau administratif occasionné par la gestion des espèces sauvages (par exemple le contrôle des populations de coyotes), comme les demandes de permis, deviendra encore plus chronophage, notamment en Ontario où le loup de l’Est profite déjà d’une protection provinciale importante. Cependant, puisque les interdictions générales déclenchées par le Décret sur le territoire domanial ne toucheront pas directement les trappeurs non autochtones, le fardeau administratif pesant sur ceux-ci devrait demeurer inchangé.

Analyse des autres impacts indirects possibles du piégeage par des non-Autochtones

Lors des consultations suivant la publication préalable dans la Partie I de la Gazette du Canada, de nombreux intervenants ont soulevé des inquiétudes au sujet des impacts indirects possibles d’une protection supplémentaire pour le loup de l’Est sur des terres administrées par le gouvernement fédéral et dans des réserves des Premières Nations. Par exemple, de nombreux chasseurs et associations de chasse ont fait part de leurs inquiétudes en lien avec une augmentation des populations de canidés découlant de ces protections supplémentaires, populations qui pourraient se déplacer au-delà des frontières du territoire domanial et des réserves des Premières Nations et avoir des effets sur les activités de chasse en territoire non domanial. En théorie, une augmentation des populations de canidés au-delà des propriétés du gouvernement fédéral pourrait entraîner une hausse de la prédation d’espèces proie telles que le castor, le cerf et l’orignal, qui sont chassées à des fins commerciales. Une telle augmentation mènerait également à une plus forte compétition avec des prédateurs ne se situant pas au sommet du réseau trophique (par exemple le renard, le vison, la martre), également chassés à des fins commerciales, ce qui les rendra moins fréquents dans la nature. Les chasseurs et les trappeurs exerçant leurs activités près des zones qui obtiendraient une protection supplémentaire assumeraient les coûts d’une réduction des récoltes et des ventes de fourrures, à moins qu’ils n’augmentent leurs activités dans ces régions. Quelques agriculteurs et associations agricoles ont également soulevé des préoccupations semblables au sujet d’une augmentation possible des populations de canidés à proximité des propriétés du gouvernement fédéral, ce qui pourrait mener à une hausse de la prédation du bétail. Pour limiter les conséquences de cette hausse, les agriculteurs pourraient devoir adopter plus de mesures préventives, dont la mise en œuvre peut être coûteuse (par exemple l’installation de clôtures, l’élevage d’animaux gardiens, la main-d’œuvre). Toutefois, puisque le piégeage des canidés n’est pas actuellement autorisé dans les dix propriétés administrées par le gouvernement fédéral qui sont touchées par le Décret (voir le tableau 1 ci-dessous), le Décret ne devrait pas entraîner de hausse du nombre de canidés dans les zones entourant ces propriétés, puisqu’il n’entraîne pas de changement important du régime de délivrance de permis de chasse et de piégeage. Pour ce qui est de la question de l’augmentation des populations suivant la protection des 11 réserves de Premières Nations ciblées où le loup peut se trouver et où le piégeage serait considéré comme sans danger pour l’humain (c’est-à-dire loin des établissements humains), on s’attend à ce que les fluctuations des populations de canidés autour des réserves attribuables au Décret demeurent minimales. En effet, les interdictions générales cibleraient peu de nouvelles zones (c’est-à-dire environ 0,7 % de la zone d’occurrence du loup de l’Est), et on considère que le piégeage des canidés n’est vraisemblablement pas effectué régulièrement dans 11 réserves.

Analyse des coûts pour les autres ministères gouvernementaux

Dix propriétés administrées par le gouvernement fédéral, relevant de cinq ministères et organismes différents, pourraient être touchées par le Décret parce qu’elles sont situées dans la zone d’occurrence du loup de l’Est et qu’elles renferment de l’habitat convenable à celui-ci. Le piégeage n’est actuellement pas autorisé dans ces propriétés. On s’attend à ce que les répercussions du Décret soient minimes pour l’ensemble de ces propriétés, à l’exception des Laboratoires de Chalk River (LCR), où des coûts plus élevés pourraient être supportés. Les propriétés en question figurent dans le tableau ci-dessous.

Tableau 1 : Liste des propriétés administrées par le gouvernement fédéral susceptibles d’être touchées par le Décret
Nom de la propriété Ministère fédéral propriétaire Région
Site d’entraînement militaire de Burwash Défense nationale Nord de l’Ontario
BFC Petawawa Défense nationale Est de l’Ontario
Laboratoires de Chalk River Énergie atomique du Canada limitée Est de l’Ontario
Parc national du Canada des Îles-de-la-Baie-Georgienne Parcs Canada Centre de l’Ontario
Aéroport de Killaloe/Bonnechere Transports Canada Nord de l’Ontario
Site de démonstration nucléaire Énergie atomique du Canada limitée Est de l’Ontario
BFC Valcartier Défense nationale Capitale-Nationale (Québec)
Lieu historique national du Canada des Forges-du-Saint-Maurice Parcs Canada Mauricie (Québec)
Parc de la Gatineau Commission de la capitale nationale Outaouais (Québec)
Parc national du Canada de la Mauricie Parcs Canada Mauricie (Québec)

Deux propriétés détenues par Énergie atomique du Canada limitée (EACL), soit les LCR et un site désigné comme le site de démonstration nucléaire, sont exploitées par les Laboratoires Nucléaires canadiens (LNC), une entreprise appartenant au gouvernement et exploitée par un entrepreneur. Le piégeage n’est pas autorisé sur les terrains d’EACL, et les LNC ont adopté un programme de gestion de l’environnement et des espèces sauvages qui aide à assurer la conformité à la LEP et qui, de manière générale, limite les effets négatifs de ses activités sur la faune et la flore locales. Cependant, à la suite des préoccupations soulevées par les LNC durant les consultations de 2017 en lien avec la surveillance, la définition d’habitat et la désignation des menaces, le Ministère a de nouveau consulté l’entreprise en 2022 pour obtenir des précisions quant aux répercussions possibles sur ses plans et ses activités. L’un de ces plans est le projet de construction d’une installation de gestion des déchets près de la surface sur la propriété des LCR afin d’y entreposer des déchets nucléaires solides de faible intensité, comme les vêtements et l’équipement de protection individuelle et les matériaux de construction principalement produits dans les LCR, mais également dans d’autres propriétés d’EACL ou d’autres sources commerciales (par exemple les hôpitaux et les universités du Canada)référence 44. Le projet a été autorisé par la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) le 8 janvier 2024. Dans une lettre envoyée au Ministère dans le cadre des consultations de 2023 dans la Partie I de la Gazette du Canada, les LNC ont confirmé, après des analyses génétiques, la présence de loups de l’Est et d’hybrides du loup de l’Est sur la propriété des LCR. Les LNC ont également observé des tanières et des lieux de rencontre de loups dans la région, loin du site proposé pour l’installation de gestion des déchets près de la surface, qui fait l’objet d’une surveillance au moyen de caméras de surveillance de sentiers depuis 2021.

La phase de construction de l’installation de gestion des déchets près de la surface commencerait par le dégagement d’une parcelle de forêt pour préparer le site. Les relevés menés par les LNC n’ont révélé aucune tanière de loups active (considérée comme une résidence en vertu de la LEP) sur le chantier de construction potentiel. Cependant, une analyse complète des impacts de l’activité de construction sur les individus du loup de l’Est sur le site devrait être menée dans l’optique des permis de la LEP afin de déterminer l’impact du Décret sur le projet. Les tanières de loups observées sur la propriété des LCR sont situées dans une zone différente, à quelques kilomètres du site on l’on prévoit construire l’installation de gestion des déchets près de la surface. La section « Répercussions potentielles des futurs règlements pris en vertu de la LEP », ci-dessous, fournit plus de renseignements à propos de possibles mesures réglementaires au titre de la Loi. Le Ministère a estimé les coûts de divers scénarios de mesures réglementaires possibles à l’avenir. À l’exception du scénario le moins probable, les coûts seraient négligeables pour les LNC. Dans un scénario où le projet ne pourrait aller de l’avant, les LNC estiment que les coûts seraient de 160 millions de dollars, ce qui correspond à l’annulation du projet actuelréférence 45.

Deux bases militaires et un champ de tir détenus par le ministère de la Défense nationale (MDN) renferment de l’habitat convenable pour le loup de l’Est : la BFC Petawawa, la BFC Valcartier, et le site d’entraînement militaire de Burwash. Les incidences du Décret devraient être limitées pour le MDN, car le piégeage n’est pas autorisé sur ses propriétés et il a mis en place des programmes de gestion des espèces sauvages pour assurer la conformité à la LEP et aux autres lois environnementales. Toutefois, lorsque les activités sont liées à la sécurité nationale ou autorisées sous le régime d’une autre loi fédérale, ces propriétés ou des parties de celles-ci peuvent être exemptées des interdictions générales et de la protection de l’habitat essentiel au titre de la LEP.

Trois terres administrées par Parcs Canada renferment de l’habitat convenable pour le loup de l’Est, mais il n’y a que dans le parc national du Canada de la Mauricie que l’espèce a des chances d’être présente. Comme ce parc renferme de l’habitat intact pour le loup de l’Est, la probabilité que de l’habitat essentiel soit désigné sur cette propriété est élevée. Toutefois, les espèces et leur habitat sont déjà protégés dans les parcs nationaux et les lieux historiques nationaux sous le régime de la Loi sur les parcs nationaux du Canada. Ainsi, Parcs Canada ne subirait aucune répercussion supplémentaire si elle devait se conformer aux interdictions générales ou à un décret visant la protection de l’habitat essentiel découlant du Décret. On s’attend toutefois à ce que la mise à niveau des permis de Parcs Canada pour les rendre conformes à la LEP soit nécessaire pour réaliser certaines activités dans le parc, comme il est précisé plus loin.

Une propriété détenue par Transports Canada (TC) fait actuellement l’objet d’un processus de transfert à une Première Nation. En raison du processus en cours, TC a cessé toutes ses activités sur la propriété et n’est donc plus concerné par le Décret.

Le parc de la Gatineau, qui est sous la responsabilité de la Commission de la capitale nationale (CCN) et gérée par celle-ci, renferme de l’habitat convenable pour le loup de l’Est. Toutefois, selon les analyses génétiques réalisées par la CCN, les canidés sauvages locaux ne sont pas des loups de l’Estréférence 46.

Coûts associés aux demandes de permis

Des permis seraient nécessaires pour les activités qui seraient autrement interdites par la LEP. Même si l’on ne peut conclure sur l’octroi ou non d’un permis avant le dépôt et l’examen d’une demande, la présente analyse tient compte des coûts en main-d’œuvre associés à la préparation d’une demande de permis en conséquence du Décret et présume qu’il n’y aurait pas d’autres coûts pour les demandeurs en lien avec les interdictions (c’est-à-dire que le permis serait octroyé). On présume que les demandeurs ne devraient demander les permis nécessaires qu’une seule fois au cours de la période d’analyse de dix ans.

D’après l’analyse des projets à venir, il est peu probable qu’un grand nombre de demandes de permis seraient soumises pour des activités touchant l’espèce de manière incidente. Par contre, des permis de recherche et des permis pour des activités qui profitent à l’espèce ou qui sont nécessaires pour augmenter ses chances de survie à l’état sauvage seront probablement demandés. En plus des consultations sur le changement de statut de l’espèce, des consultations en continu ont eu lieu sur l’élaboration du plan de gestion. Les consultations du Ministère et les activités de mobilisation sur le rétablissement ont montré qu’au moins quelques communautés des Premières Nations ont déjà participé ou participent activement à des activités de recherche visant le rétablissement du loup de l’Est, dont certaines dans le cadre de divers programmes de financement de la conservation. Certaines Premières Nations ont aussi manifesté, au cours des consultations préalables, leur intérêt à collaborer avec le gouvernement fédéral pour la conservation et le rétablissement du loup de l’Est.

En présumant qu’une bande de Première Nation demanderait les permis au nom de toutes les réserves des Premières Nations auxquelles elle est associée, on estime que les bandes présenteraient 12 demandes de permisréférence 47. Parmi ces 12 permis, on s’attend à un maximum de 2 concernant des activités touchant l’espèce de manière incidente, et l’on présume que les autres concerneraient des recherches sur la conservation de l’espèce ou des activités qui profitent à l’espèce. Les coûts estimés de ces permis pour les Premières Nations s’élèvent à 18 000 $ (non actualisés) en frais administratifs.

Les ministères fédéraux devraient demander jusqu’à 10 permis au total, dont un maximum de 6 concernerait des activités touchant l’espèce de manière incidente, 1 serait demandé à des fins de recherche ou d’activités qui profitent à l’espèce, et 3 pour rendre conformes à la LEP les permis de Parcs Canada obtenus sous le régime de la Loi sur les parcs nationaux du Canada. Étant donné la forte présence de loups, qui seront probablement identifiés comme des loups de l’Est, sur les propriétés des LNC, cette entreprise estime que les coûts par demande de permis seraient supérieurs à la moyenne. Ainsi, les ressources supplémentaires potentielles requises pour la préparation des demandes de permis et des lettres d’avis représenteraient environ 48 000 $ (non actualisés) en coûts de main-d’œuvre. D’après les coûts de permis moyens prévus, on estime que le coût des permis pour toutes les autres propriétés fédérales pourrait atteindre 15 000 $ (non actualisés) en frais administratifs.

On estime que le total des coûts supplémentaires que devra assumer le gouvernement du Canada pour l’examen de ces 22 possibles demandes de permis, dont 19 seraient de nouveaux permis et 3 seraient des mises à niveau de permis existants pour les rendre conformes à la LEP, pourrait s’élever à 65 000 $ (non actualisés) dans les 10 ans suivant l’inscription.

Tableau 2a : Coûts moyens des demandes de permis au titre de la LEP pour les demandeurs
Type de demande de permis Coût par permis note a du tableau b2 Nombre de demandes
Permis pour activité ayant un effet incident 2 700 $ 8
Permis de recherche 1 300 $ 11
Parcs Canada sur les terres de Parcs Canada 800 $ 3

Note(s) du tableau b2

Note a du tableau b2

Avec exceptions. Les coûts estimés ont été arrondis.

Retour à la note a du tableau b2

Tableau 2b : Coûts moyens des demandes de permis au titre de la LEP pour le gouvernement
Type de demande de permis Coût par permis note a du tableau b3 Nombre de demandes
Nouveau permis – le Ministère 3 400 $ 19
Modification de permis pour conformité à la LEP – le Ministère 700 $ 3

Note(s) du tableau b3

Note a du tableau b3

Avec exceptions. Les coûts estimés ont été arrondis.

Retour à la note a du tableau b3

Coûts administratifs pour le gouvernement du Canada

Le coût estimé pour le gouvernement du Canada de l’élaboration du programme de rétablissement du loup de l’Est et du plan d’action associé est de 160 000 $ à 400 000 $ (non actualisés).

Les implications en matière de promotion de la conformité pour le loup de l’Est sont incertaines à l’heure actuelle, mais, en se fondant sur les activités prévues et les documents qui devraient être élaborés, on présume que les coûts s’élèveraient à 15 000 $ la première année de mise en œuvre du Décret.

Le Décret devrait entraîner des coûts associés à l’application de la loi pour le gouvernement du Canada. Le coût des efforts préopérationnels d’application de la loi (par exemple l’élaboration stratégique et la mobilisation des Autochtones et des intervenants) est évalué à environ 48 000 $. Les coûts d’application de la loi pendant la première année de la mise en œuvre sont évalués à environ 100 000 $. Cette somme comprend 34 000 $ pour la mobilisation et l’analyse, 48 000 $ pour des inspections et 18 000 $ pour la prise de mesures en cas d’infraction présumée (y compris les avertissements). Le total pour chaque année d’activité subséquente est estimé à 55 000 $, ce qui donne un coût total de 600 000 $ sur 10 ans.

Incidences sur les évaluations d’impact

Il pourrait y avoir des incidences sur les projetsréférence 48 devant faire l’objet d’une évaluation d’impact (EI) sous le régime d’une loi fédérale. Toutefois, les coûts devraient être minimes par rapport au total des coûts de l’exécution d’une EI. Une fois qu’une espèce est inscrite à l’annexe 1 de la LEP, quelle que soit sa désignation, des exigences supplémentaires au titre de l’article 79 de la LEP s’appliquent aux promoteurs de projets et aux représentants du gouvernement qui entreprennent une EI. Ces exigences incluent l’identification de tous les effets néfastes que le projet pourrait avoir sur l’espèce et son habitat essentiel et, si le projet est réalisé, l’assurance que des mesures sont prises afin d’éviter ou d’atténuer ces effets et de les surveiller. Toutefois, le Ministère recommande toujours aux promoteurs dans les lignes directrices de l’EI (au début du processus d’EI) d’évaluer les effets sur les espèces déjà évaluées par le COSEPAC susceptibles d’être inscrites à l’annexe 1 de la LEP dans un avenir rapproché, ce qui fait en sorte que ces coûts sont déjà probablement intégrés dans le scénario de base.

Répercussions potentielles des futurs règlements pris en vertu de la LEP

L’inscription d’une espèce sauvage à la LEP en tant qu’espèce menacée, en voie de disparition ou disparue du pays entraîne une série d’obligations pour le gouvernement, dont tout d’abord la préparation d’un programme de rétablissement qui comprend la désignation, dans la mesure du possible, de l’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement de l’espèce (habitat essentiel), et ensuite les obligations concernant la protection de cet habitat essentiel. La protection de l’habitat essentiel sur le territoire domanial est requise aux termes de la LEP et pourrait nécessiter des mesures réglementaires, comme un décret de protection de l’habitat essentiel. Si le ministre est d’avis que l’habitat essentiel sur le territoire non domanial n’est pas efficacement protégé ou qu’il existe une menace imminente pour l’espèce, d’autres mesures réglementaires pourraient également être prises en vertu de la LEP. Les répercussions socioéconomiques de chaque mesure réglementaire seraient alors évaluées si cette mesure de protection supplémentaire devenait nécessaire.

Résumé des incidences de l’analyse coûts-avantages

Incidences sur les Premières Nations touchées

Étant donné l’importante valeur culturelle et spirituelle associée aux loups, y compris le loup de l’Est, dans les traditions de nombreuses Premières Nations au Canada, celles-ci bénéficieraient probablement plus que tout autre groupe démographique au Canada de toute mesure contribuant à la protection et à la conservation de cette espèce.

Les interdictions générales peuvent avoir une incidence sur les peuples autochtones s’ils pratiquent le piégeage de canidés dans les réserves des Premières Nations situées dans la zone d’occurrence du loup de l’Est. Comme les trappeurs ne seraient plus autorisés à blesser ou à tuer un loup de l’Est sur le territoire domanial, ils pourraient devoir modifier leurs activités de piégeage pour se conformer au Décret. Il y a des indications que le piégeage de loups et de coyotes est pratiqué dans la zone d’occurrence du loup de l’Est, notamment par des membres de ces réserves de Premières Nations. Toutefois, seule une petite proportion de ces personnes pratique le piégeage de canidés, et la proportion des personnes qui le pratique dans des réserves est probablement beaucoup plus petite.

Tableau 3 : Résumé des coûts non monétaires pour les Premières Nations qui seraient touchées par le Décret
Activité touchée Description des coûts
Piégeage par des membres de Premières Nations à des fins non commerciales Il pourrait y avoir des incidences sur les peuples autochtones qui pratiquent occasionnellement le piégeage de canidés dans des réserves à des fins non commerciales (par exemple fins culturelles ou cérémonielles). Bien que l’on puisse s’attendre à des incidences disproportionnées sur ces personnes, on suppose qu’elles pourraient continuer à pratiquer le piégeage non commercial hors des réserves, sur du territoire non domanial, où il y a probablement beaucoup plus d’habitats propices aux canidés et vraisemblablement plus de canidés. Cela permettrait d’atténuer quelque peu les effets négatifs sur ces personnes.
Tableau 4 : Résumé des coûts monétaires pour les Premières Nations qui seraient touchées par le Décret
Activité touchée Description des coûts Valeur monétaire totale actuelle (sur 10 ans)
Piégeage par des membres de Premières Nations à des fins non commerciales Évitement du piégeage de canidés dans les réserves des Premières Nations 0 – 1,24 million $ note a du tableau b5
Activité entraînant des prises accidentelles de loups de l’Est Demandes de permis par des bandes de Premières Nations 18 000 $

Note(s) du tableau b5

Note a du tableau b5

Calculée à un taux d’actualisation de 3 %.

Retour à la note a du tableau b5

Autres avantages du Décret

Outre sa contribution au maintien de la valeur culturelle et spirituelle du loup de l’Est pour les Premières Nations, comme on l’a mentionné plus haut, le Décret devrait déclencher des protections et des mesures coordonnées pour soutenir le rétablissement du loup, ce qui contribuera à préserver et à améliorer des possibilités économiques, récréatives et culturelles pour la population canadienne (par exemple l’observation de la faune ou le maintien de l’existence d’une espèce emblématique du Canada).

Coûts monétisés pour le gouvernement du Canada
Tableau 5 : Résumé des coûts pour le gouvernement du Canada
Ministère/organisme touché Description des coûts Valeur monétaire totale actuelle (sur 10 ans) note a du tableau b6
Autres ministères et organismes Demandes de permis 65 000 $
Ministère de l’Environnement Traitement des demandes de permis 65 000 $
Élaboration et publication du programme de rétablissement et du plan d’action 150 000 $ à 380 000 $
Promotion de la conformité 15 000 $
Application de la loi 600 000 $

Note(s) du tableau b6

Note a du tableau b6

Calculée à un taux d’actualisation de 3 %.

Retour à la note a du tableau b6

Le total des coûts monétaires supplémentaires du Décret pour la société devrait être faible puisqu’il est estimé entre 900 000 dollars et 2,4 millions de dollars sur 10 ans.

Tableau 6 : Résumé des coûts monétisés totaux pour la société
Ministère/organisme touché Description des coûts Valeur monétaire totale actuelle (sur 10 ans) note a du tableau b7
Peuples autochtones et Premières Nations Coûts d’atténuation pour éviter le piégeage des canidés et coûts de demande de permis pour les activités entraînant des prises accidentelles 18 000 $ à 1,24 million $
Gouvernement du Canada Tous les coûts 895 000 $ à 1,13 million $
Coûts monétaires totaux pour la société ~900 000 $ à 2,4 million $ note b du tableau b7

Note(s) du tableau b7

Note a du tableau b7

Calculée à un taux d’actualisation de 3 %.

Retour à la note a du tableau b7

Note b du tableau b7

Les coûts estimés ont été arrondis.

Retour à la note b du tableau b7

Lentille des petites entreprises

L’analyse effectuée selon la lentille des petites entreprises a permis de conclure que le Décret toucherait certaines petites entreprises canadiennes. Le Décret pourrait toucher les trappeurs des Premières Nations qui pratiquent le piégeage commercial de canidés dans les réserves des Premières Nations. En effet, il pourrait les obliger à réduire leurs activités pour éviter de capturer des loups de l’Est, ce qui pourrait entraîner des coûts supplémentaires pour ces trappeurs. Toutefois, d’après l’analyse de plusieurs scénarios présentée plus haut, on s’attend à ce que les trappeurs choisissent les deux scénarios les plus probables, qui n’entraîneraient pas de coûts significatifs pour eux. Dans le cas improbable où ils décideraient de cesser complètement le piégeage des canidés et de ne pas le remplacer par le piégeage d’autres espèces, ou de piéger des canidés hors des réserves, sur le territoire non domanial, ils pourraient devoir assumer des coûts plus élevés.

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s’applique pas, car il n’y a pas de changement venant accroître le fardeau administratif pour les entreprises et qu’aucun règlement ne sera abrogé ou ajouté.

Les Laboratoires Nucléaires canadiens (LNC), une entreprise gouvernementale exploitée par un entrepreneur, sont susceptibles d’engager des frais administratifs en raison des nouvelles demandes de permis requises pour rendre leurs activités conformes à la LEP une fois que le statut du loup de l’Est sera sur la liste des espèces menacées. Étant donné que les LNC opèrent au nom du gouvernement du Canada, dans ce rôle, ils ne répondent pas à la définition d’une entreprise aux fins de cette analyse.

Coopération et harmonisation en matière de réglementation

En tant qu’organisme de réglementation fédéral pour la désignation des espèces en péril au Canada, le gouvernement fédéral joue un rôle de premier plan. Toutefois, la protection des espèces sauvages est une responsabilité partagée entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.

Dans la province d’Ontario, le loup de l’Est est inscrit comme espèce menacée sur la liste de la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition de l’Ontario. En Ontario, les loups sont protégés contre la chasse et le piégeage dans le parc provincial Algonquin, dans les cantons entourant le parc et dans toutes les réserves fauniques de la Couronne provinciale. Les loups de l’Est sont également protégés de la chasse, mais pas du piégeage, dans le parc provincial Rivière des Français. Dans la province de Québec, les loups sont considérés comme des animaux à fourrure, et la chasse et le piégeage de l’espèce sont réglementés sous le régime de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Ils ne sont toutefois pas protégés par la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables. Au moment de la publication du rapport d’évaluation du COSEPAC en 2015, le loup de l’Est n’était pas officiellement reconnu comme une espèce distincte par le Québec. La situation n’avait pas changé en février 2024.

Les gouvernements provinciaux et territoriaux ont indiqué leur engagement à protéger et à rétablir les espèces en péril en signant l’Accord pour la protection des espèces en péril en 1996. Dans cet esprit de coopération, les gouvernements de l’Ontario et du Québec ont transmis leurs commentaires au cours de l’élaboration du plan de gestion du loup de l’Est en 2021. Ce type de collaboration de la part des provinces devrait se poursuivre dans le cadre de l’élaboration future du programme de rétablissement et des plans d’action. L’élaboration de ces programmes de rétablissement et plans d’action, qui découlerait de la modification du statut de l’espèce visée par le Décret, nécessiterait la participation de différentes autorités d’aménagement du territoire, comme les autres ordres de gouvernement et les communautés autochtones, ainsi que la coordination des travaux avec ces intervenants.

Évaluation environnementale stratégique

Une évaluation environnementale stratégique a permis de conclure que le Décret aura des effets positifs importants sur l’environnement. Plus précisément, elle démontre que la protection des espèces sauvages en péril contribue à la biodiversité nationale et protège la productivité, la santé et la résilience des écosystèmes.

Le Décret aide aussi le Canada à respecter les engagements qu’il a pris aux termes de la Convention sur la diversité biologique. Étant donné l’interdépendance des espèces, une perte de biodiversité peut entraîner une diminution des fonctions et des services écosystémiques. Ces services sont importants pour la santé des Canadiens et ont des liens importants avec l’économie canadienne. Le loup de l’Est est considéré comme une importante espèce clé qui fournit d’importants services écosystémiques, comme la participation au cycle des nutriments, qui aide à maintenir la productivité des écosystèmes, et la régulation des populations animales, qui contribue à maintenir un habitat optimal pour les autres espèces animales et végétales. De petits changements au sein d’un écosystème entraînant la perte d’individus et d’espèces peuvent avoir des effets négatifs, irréversibles et de grande portée.

Le Décret va dans le sens de l’objectif de la Stratégie fédérale de développement durable (SFDD) de 2022 à 2026 de « protéger et rétablir les espèces, [et de] conserver la biodiversité canadienne » en soutenant directement la protection et le rétablissement du loup de l’Est, contribuant ainsi à la conservation de la biodiversité canadienne. Le Décret appuie cet objectif en aidant à garantir que le loup de l’Est bénéficie d’une protection appropriée, en phase avec les recommandations du COSEPAC, et de mesures de rétablissement, le cas échéant. Il contribuerait aussi indirectement à l’objectif de la SFDD de « prendre des mesures relatives aux changements climatiques » par l’entremise de la conservation de la biodiversité, car les écosystèmes forestiers occupés par le loup de l’Est jouent un rôle clé dans l’atténuation des répercussions des changements climatiques en agissant comme puits de carbone. Le décret proposé va aussi dans le sens des objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies qui concernent la vie terrestre (objectif 15) et les mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques (objectif 13).

Le Décret est également en phase avec le Cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréalréférence 49, récemment adopté, et l’objectif général selon lequel « la biodiversité est utilisée et gérée de manière durable et les contributions de la nature aux populations sont valorisées, maintenues et renforcées ».

Analyse comparative entre les sexes plus

Une analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) a été effectuée pour cette proposition afin de déterminer si des caractéristiques comme le sexe, le genre, l’âge, la race, l’orientation sexuelle, le revenu, le niveau de scolarité, la situation d’emploi, la langue, le statut de minorité visible, le handicap ou la religion influencent la façon dont une personne est touchée par le Décret.

La conclusion de l’analyse est que, d’une manière générale, les Canadiens tirent un bénéfice de la protection des espèces en péril et du maintien de la biodiversité. En revanche, les membres des Premières Nations, particulièrement les hommes trappeurs, pourraient subir de manière disproportionnée les effets négatifs du Décret, puisqu’ils s’adonnent généralement plus que tout autre groupe démographique au Canada à des activités de piégeage. Il pourrait être difficile pour ces trappeurs de compenser la perte de revenus résultant de la réduction ou de la cessation de leurs activités de piégeage de canidés afin d’éviter les prises accidentelles de loups de l’Est et de trouver une autre source de revenus. L’Enquête régionale sur la santé des Premières Nations de 2015-2016 a révélé que 4,3 % des adultes des Premières Nations de l’ensemble du Canada (6,9 % des hommes et 1,6 % des femmes) s’étaient adonnés à des activités de piégeage au cours des trois mois précédant l’enquêteréférence 50. Sur les quelque 50 000 trappeurs actifs au Canada, on estime que la moitié sont des Autochtonesréférence 51.

Même si le nombre de trappeurs autochtones qui pratiquent le piégeage de canidés dans les réserves des Premières Nations concernées ainsi que leur profil sociodémographique ne sont pas connus, une enquête provinciale au Québec a déterminé qu’en 2016, environ 95 % de tous les trappeurs étaient des hommes, 70 % étaient âgés de plus de 44 ans et 45 % avaient reçu un enseignement secondaire ou d’un niveau moins élevéréférence 52.

Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service

Mise en œuvre

Le Décret entre en vigueur le jour de son enregistrement.

Le Ministère est responsable de la préparation du programme de rétablissement du loup de l’Est, à titre d’espèce nouvellement inscrite comme espèce menacée à l’annexe 1 de la LEP. Le programme de rétablissement sera préparé en coopération avec les provinces d’Ontario et de Québec, Parcs Canada, des groupes autochtones et toute personne ou tout organisme que le Ministère juge appropriés. Si le rétablissement est jugé réalisable, le programme de rétablissement ciblera les menaces à la survie du loup de l’Est et désignera l’habitat essentiel, dans la mesure du possible. Un énoncé est également requis lorsqu’au moins un plan d’action en lien avec le programme de rétablissement est préparé. Le programme de rétablissement doit être ajouté au Registre public dans les deux ans suivant l’inscription de l’espèceréférence 53,référence 54.

Conformité et application

Le Ministère et Parcs Canada mettront en œuvre un plan de promotion de la conformité. Les initiatives de promotion de la conformité sont des mesures proactives qui encouragent la conformité volontaire à la loi par des activités d’éducation et de sensibilisation, afin de susciter une prise de conscience à l’égard des interdictions et d’en approfondir la compréhension. Les initiatives de promotion de la conformité visent à :

Ces objectifs peuvent être réalisés, le cas échéant, au moyen de la diffusion, aux Autochtones et aux intervenants, de produits d’information expliquant les nouvelles interdictions concernant le loup de l’Est sur le territoire domanial en lien avec le Décret. Ces produits seraient publiés dans le Registre public de la LEP. Des envois postaux et des présentations à des publics ciblés pourraient aussi être envisagés, au besoin.

Dans le réseau des lieux patrimoniaux protégés de Parcs Canada, on transmet aux employés de première ligne les renseignements appropriés concernant les espèces en péril présentes sur leur site afin qu’ils puissent informer les visiteurs des mesures de prévention et les inciter à prendre part à la protection et à la conservation des espèces en péril.

La LEP prévoit des sanctions en cas de contravention à la Loi, y compris des amendes ou des peines d’emprisonnement, la saisie d’objets et la confiscation de ces objets ou des produits de leur aliénation. Des accords sur des mesures de rechange peuvent aussi être conclus avec des contrevenants dans certaines conditions. La LEP prévoit également des inspections et des opérations de fouille et de saisie par les agents d’application de la loi désignés sous le régime de la LEP. Les infractions et les peines sont établies dans la LEPréférence 55.

Permis délivrés au titre de la LEP et normes de service

En vertu de l’article 73 de la LEP, le ministre compétent peut conclure avec une personne un accord l’autorisant à exercer une activité touchant une espèce sauvage inscrite, tout élément de son habitat essentiel ou la résidence de ses individus, ou lui délivrer un permis à cet effet. L’article 74 permet au ministre compétent de délivrer des permis en application d’une loi fédérale (par exemple la Loi sur les parcs nationaux du Canada), lesquels ont le même effet que ceux délivrés au titre de l’article 73. La LEP définit les conditions et les facteurs que le ministre doit prendre en compte avant de délivrer un permis.

Selon ce que prévoit le Règlement sur les permis autorisant une activité touchant une espèce sauvage inscrite, le Ministère doit normalement rendre une décision relative à une demande dans un délai de 90 jours. Le délai de 90 jours commence à la date de l’avis indiquant au demandeur que le Ministère a reçu une demande complète. Si une demande est incomplète, le Ministère en avisera le demandeur, et le délai sera suspendu jusqu’à ce que la totalité des renseignements manquants soit reçue. Le règlement prévoit des exceptions à la norme de service de 90 jours. L’objectif des normes de service est de contribuer à la cohérence, à la prévisibilité et à la transparence du processus de délivrance de permis au titre de la LEP en fournissant aux demandeurs des normes de service claires et mesurables. Le Ministère mesure chaque année son rendement à l’égard des normes de service, et l’information sur le rendement pour l’exercice précédent est publiée sur le site Web du Ministère au plus tard le 1er juin.

Personne-ressource

Paula Brand
Directrice
Division des politiques de la Loi sur les espèces en péril
Service canadien de la faune
Environnement et Changement climatique Canada
351, boulevard Saint-Joseph, 15e étage
Gatineau (Québec)
K1A 0H3
Téléphone : 1‑800‑668‑6767
Courriel : LEPreglementations-SARAregulations@ec.gc.ca