Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (criminalité transfrontalière) : DORS/2024-128

La Gazette du Canada, Partie II, volume 158, numéro 13

Enregistrement
DORS/2024-128 Le 10 juin 2024

LOI SUR L’IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

C.P. 2024-661 Le 10 juin 2024

Attendu que le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, conformément au paragraphe 5(2)référence a de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés référence b, a fait déposer le projet de règlement intitulé Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (criminalité transfrontalière), conforme au texte ci-après, devant chaque chambre du Parlement,

À ces causes, sur recommandation du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration et en vertu du paragraphe 5(1) et des articles 43 et 53référence c de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés référence b, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (criminalité transfrontalière), ci-après.

Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (criminalité transfrontalière)

Modifications

1 L’article 19 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés référence 1 est remplacé par ce qui suit :

Criminalité transfrontalière

19 (1) Pour l’application du paragraphe 36(2.1) de la Loi, les infractions sont les suivantes :

Punissable par mise en accusation

(2) Pour l’application des alinéas (1)a) et b), l’infraction punissable par mise en accusation ou par procédure sommaire est assimilée à l’infraction punissable par mise en accusation, indépendamment du mode de poursuite effectivement retenu.

2 Le paragraphe 228(1) du même règlement est modifié par adjonction, après l’alinéa a), de ce qui suit :

3 L’alinéa 229(1)d) du même règlement est remplacé par ce qui suit :

Disposition transitoire

4 Dans le cas où, en vertu du paragraphe 44(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, un rapport a été établi à l’égard d’un étranger avant la date d’entrée en vigueur du présent règlement, l’article 19 et les paragraphes 228(1) et 229(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, dans leur version antérieure à la date d’entrée en vigueur du présent règlement, continuent de s’appliquer à l’égard de cet étranger en ce qui concerne l’affaire visée par le rapport.

Entrée en vigueur

5 Le présent règlement entre en vigueur à la date de sa publication dans la Partie II de la Gazette du Canada.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)

Enjeux

Le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (RIPR ou le Règlement) précise qui a le pouvoir de prendre des mesures de renvoi pour chaque interdiction de territoire. Le pouvoir est actuellement divisé entre la Section de l’immigration (SI) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR) et le délégué du ministre [c’est-à-dire un fonctionnaire de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) ou d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC)]. La SI devrait avoir compétence pour des motifs d’interdiction de territoire plus complexes, tandis que le délégué du ministre devrait avoir compétence pour des motifs d’interdiction de territoire relativement simples. En vertu du cadre actuel, l’exécution de la loi en matière d’immigration dans le cadre de cas de criminalité transfrontalière nécessite un renvoi à la SI pour enquête, quelles que soient les circonstances ou la complexité de l’infraction criminelle. Il s’agit de criminalité transfrontalière lorsqu’un étranger commet une infraction criminelle désignée au point d’entrée et cela comprend des cas comme la contrebande d’armes et d’armes à feu au Canada. La nécessité de renvoyer des dossiers concernant des motifs d’interdiction de territoire simples comme ceux-ci est trop complexe et lourde par rapport aux affaires qui peuvent être traitées entièrement aux points d’entrée.

En outre, le cadre actuel de la criminalité transfrontalière intègre un plus large éventail d’infractions criminelles qu’il n’est nécessaire, comme des infractions qui ne peuvent être commises dans un point d’entrée. Le cadre de réglementation actuel permet également l’exécution de la loi en matière d’immigration, y compris l’interdiction à vie d’entrer au Canada, même pour les personnes qui commettent des infractions relativement mineures (comme la non-déclaration de produits alimentaires). Le raffinement de la liste des infractions criminelles désignées et l’harmonisation de la compétence pour la prise de mesures de renvoi en fonction de la complexité de l’infraction permettent d’accroître la précision, la transparence et l’uniformité en ce qui a trait à l’application de la disposition relative à l’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière.

Contexte

Au cours des dernières années, l’ASFC, en consultation avec IRCC, a présenté un éventail de propositions visant à simplifier les processus de constat d’interdiction de territoire pour certains motifs d’interdiction de territoire relativement simples en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) et du RIPR. Ces travaux stratégiques ont été réalisés dans le cadre d’un engagement financé dans la Stratégie de renvois, qui faisait partie du budget de 2019.

Interdiction de territoire

La LIPR comprend un certain nombre de motifs d’interdiction de territoire, qui peuvent entraîner la prise d’une mesure de renvoi. En vertu de la LIPR, les motifs d’interdiction de territoire comprennent, sans s’y limiter, la sécurité, les atteintes aux droits de la personne ou aux droits internationaux, la criminalité et la criminalité organisée. Lorsqu’une mesure de renvoi devient exécutoire, les étrangers sont tenus de quitter le Canada. En général, un étranger touché par une mesure de renvoi peut soit partir volontairement, soit être renvoyé du Canada par l’ASFC.

Une mesure de renvoi peut être prise lorsqu’une personne a été jugée interdite de territoire au titre de la LIPR. Sur le plan procédural, la première étape pour demander la prise d’une mesure de renvoi est la préparation d’un rapport d’interdiction de territoire par un agent de l’ASFC ou d’IRCC. Ce rapport est ensuite examiné par un délégué du ministre afin de déterminer si l’allégation d’interdiction de territoire énoncée dans le rapport est fondée. L’examen du délégué du ministre est une forme d’examen par les pairs, qui est effectué par un autre agent de l’ASFC ou d’IRCC ou par un superviseur ou un gestionnaire. Bien que la compétence pour la prise d’une mesure de renvoi par la SI ou le délégué du ministre soit prescrite par le RIPR, le niveau du fonctionnaire qui peut agir à titre de délégué du ministre pour tout motif particulier d’interdiction de territoire est défini dans l’Instrument de désignation et de délégation. Un délégué du ministre qui détermine que le rapport est fondé peut soit prendre une mesure de renvoi, comme le prescrit le règlement, soit déférer le rapport d’interdiction de territoire à la SI de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié pour qu’une enquête soit tenue.

En règle générale, la LIPR et le RIPR ont été structurés de manière à ce que les cas concernant des motifs d’interdiction de territoire qui sont simples et fondés sur des faits (comme les étrangers qui ont été reconnus coupables d’une infraction criminelle au Canada) relèvent de la compétence du délégué du ministre, tandis que les cas concernant des motifs d’interdiction de territoire qui sont plus complexes (comme les étrangers interdits de territoire en raison d’atteintes aux droits humains ou internationaux ou de crimes de guerre) doivent être déférés à la SI pour une enquête au terme de laquelle une mesure de renvoi peut être prise si l’étranger est jugé interdit de territoire au Canada.

Régime actuel d’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière

À l’heure actuelle, le pouvoir de prendre une mesure de renvoi pour les étrangers interdits de territoire en raison d’une infraction criminelle désignée commise au point d’entrée, également connue sous le nom de criminalité transfrontalière, relève uniquement de la SI. Si un étranger commet une infraction criminelle transfrontalière, il doit être autorisé à entrer au Canada pour assister à une enquête devant la SI.

À un point d’entrée, si un agent des services frontaliers (ASF) détermine qu’un étranger a commis un crime transfrontalier, l’ASF communiquera d’abord avec la police locale pour voir si elle souhaite porter des accusations. Si la police décide de porter des accusations, l’ASF ne rédigera pas de rapport d’interdiction de territoire. Si la police ne porte pas d’accusations, l’ASF peut rédiger le rapport d’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière. Toutes les infractions punissables par mise en accusation sous le régime du Code criminel, de la LIPR, de la Loi sur les armes à feu, de la Loi sur les douanes, de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (LDAS) et de la Loi sur le cannabis sont actuellement des infractions désignées en vertu du RIPR.

Une fois que l’ASF a préparé le rapport d’interdiction de territoire, il le transmet au délégué du ministre aux fins d’examen. Si le délégué du ministre est d’avis que le rapport est fondé, l’affaire sera alors déférée à la SI pour enquête. Si la SI est convaincue que l’étranger est interdit de territoire, elle prend la mesure de renvoi. La mesure de renvoi applicable en l’espèce est une mesure d’expulsion, qui est assortie d’une interdiction à vie d’entrer au Canada, à moins que le ministre n’autorise à nouveau l’entrée de la personne.

Les agents disposent également d’autres pouvoirs pour gérer les infractions pour criminalité transfrontalière potentielles. Dans le cas des infractions mineures, comme une personne qui apporte par inadvertance de petites quantités de cannabis au point d’entrée ou qui laisse accidentellement un fusil de chasse dans sa voiture, les ASF ont la possibilité de permettre à une personne de retirer sa demande d’entrée au Canada. Ainsi, les étrangers peuvent quitter immédiatement le Canada et de ne pas risquer d’être visés par une mesure de renvoi, ce qui les interdirait de façon permanente d’entrer au Canada à l’avenir sans autorisation préalable. Ces modifications n’ont aucune incidence sur l’option permettant à une personne de retirer sa demande d’entrée au Canada.

Engagement à revoir les pouvoirs relatifs aux constats d’interdiction de territoire et à la prise de mesures de renvoi

Le 13 avril 2017, le gouvernement du Canada a déposé sa réponse au rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, intitulé Vigilance, reddition de comptes et sécurité aux frontières du Canada (PDF). Dans son rapport, entre autres choses, le Comité a souligné que le renvoi des personnes interdites de territoire est un processus long et coûteux et a énoncé une orientation générale vers l’idée selon laquelle les personnes interdites de territoire ne devraient pas, en premier lieu, être tenues d’entrer physiquement au Canada uniquement aux fins d’une enquête devant la SI de la CISR et d’un renvoi ultérieur du Canada par l’ASFC. Dans sa réponse, le gouvernement du Canada a souligné son engagement à mettre en œuvre un programme équilibré, efficace et rentable d’exécution de la loi en matière d’immigration, ainsi qu’à répondre à ces préoccupations sous-jacentes soulevées par le Comité. Dans le cadre de la réponse, l’ASFC s’est engagée à explorer des options stratégiques afin d’améliorer l’efficacité du processus de constat d’interdiction de territoire. Par conséquent, un vaste examen pluriannuel des divers motifs d’interdiction de territoire a été effectué en ce qui a trait aux pouvoirs de la SI ou du délégué du ministre de prendre des mesures de renvoi visant des personnes interdites de territoire. Il s’agit du premier examen exhaustif de ces pouvoirs depuis l’entrée en vigueur de la LIPR et du RIPR en 2002.

Rapport de 2020 du vérificateur général — Renvoi d’immigrants refusés

Le rapport de 2020 du Bureau du vérificateur général (BVG) sur le renvoi d’immigrants refusés souligne l’importance d’un renvoi rapide du Canada de la personne interdite de territoire. Il a été noté que les renvois sont également l’un des moyens les plus efficaces de dissuader ceux qui pourraient autrement chercher à exploiter le système d’immigration. Dans la mesure où les modifications présentées ci-dessous permettent d’établir plus rapidement les cas d’interdiction de territoire, augmentent la vitesse à laquelle les mesures de renvoi peuvent être prises et augmentent la capacité de l’ASFC à procéder à un plus grand nombre de renvois aux points d’entrée, plutôt que d’exiger un renvoi physique au Canada pour une enquête devant la SI, elles contribueront à l’objectif global de veiller à ce que les renvois soient effectués le plus rapidement possible.

Lien avec le projet de loi C-21

Un projet de loi relatif aux armes à feu (projet de loi C-21) a reçu la sanction royale le 15 décembre 2023. Des dispositions transférant la responsabilité stratégique en matière d’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière du ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté au ministre de la Sécurité publique sont entrées en vigueur. Le Règlement appuie certains des objectifs du projet de loi C-21 en renforçant l’exécution de la loi pour des infractions liées aux armes à feu directement à la frontière, au lieu d’exiger que la personne soit admise au Canada pour une enquête.

Objectif

Ces modifications visent à simplifier la prise de décisions relatives à l’interdiction de territoire pour les infractions simples commises au moment de l’entrée au Canada, ainsi qu’à améliorer la précision, la clarté et la transparence des décisions relatives à l’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière.

Ces modifications réglementaires :

Description

Cette approche comporte deux éléments principaux. Premièrement, des modifications sont apportées afin d’énumérer des infractions précises dans le RIPR. Les infractions prévues sont seulement celles qui pourraient se produire à un point d’entrée et seulement celles qui sont suffisamment graves pour justifier une conclusion d’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière. Les infractions au RIPR qui ne se produisent pas à la frontière (par exemple la production de drogues) et les infractions qui sont moins graves (par exemple l’omission de déclarer des produits alimentaires) sont alors éliminées. En outre, cette approche offre aux agents davantage de précision et de clarté lorsqu’ils prennent des décisions relatives à l’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière. Deuxièmement, le RIPR est modifié afin de transférer le pouvoir de prendre des mesures de renvoi de la SI au délégué du ministre pour les infractions simples commises au moment de l’entrée. Les cas d’interdiction de territoire découlant de la perpétration d’infractions plus complexes seraient renvoyés à la SI pour enquête.

Plus de précision, de clarté et de transparence

Les modifications précisent les infractions transfrontalières qui pourraient rendre les personnes interdites de territoire si elles sont commises à la frontière. Le nombre d’infractions applicables prévues à la Loi sur les armes à feu, à la Loi sur les douanes, à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et à la Loi sur le cannabis est réduit. Ces modifications garantissent que seules les infractions transfrontalières les plus graves sont applicables. Par exemple, l’omission de déclarer des marchandises personnelles, comme des produits alimentaires, en vertu de la Loi sur les douanes n’est plus un motif suffisant pour demander une mesure de renvoi. Les modifications permettent également de préciser les infractions prévues afin de s’assurer qu’elles se limitent à celles qui peuvent raisonnablement survenir à un point d’entrée. Par exemple, la Loi sur le cannabis comprend des infractions liées à la promotion qui, bien que graves, ne sont pas susceptibles d’être pertinentes dans un contexte de point d’entrée.

Les infractions pour lesquelles une personne pourrait être interdite de territoire pour criminalité transfrontalière comprennent : la falsification de permis aux termes de la Loi sur les armes à feu; l’omission de déclarer des marchandises et des substances comme les armes à feu et les munitions prohibées; la possession illégale de documents vierges susceptibles d’être remplis pour les déclarations de marchandises importées; la contrebande de marchandises ou de substances réglementées, prohibées ou contrôlées aux termes de la Loi sur les douanes; la possession, le trafic et l’importation de substances aux termes de la LDAS; et la possession en vue de la distribution ou de la vente aux termes de la Loi sur le cannabis.

Renforcer le pouvoir de prendre des mesures de renvoi aux points d’entrée

En améliorant la précision des infractions prévues, le cadre modifié accorde aux délégués du ministre un plus grand pouvoir de prendre des mesures de renvoi pour les infractions les plus simples commises au moment de l’entrée. Le règlement transfère le pouvoir de prendre des mesures de renvoi de la SI au délégué du ministre pour diverses infractions prévues au Code criminel, à la LIPR, à la Loi sur les armes à feu et à la Loi sur les douanes. Citons comme exemples d’infractions susceptibles d’être transmises au délégué du ministre en vue de la prise d’une mesure de renvoi le port d’une arme dissimulée ou la possession non autorisée d’une arme à feu, qui sont des infractions prévues au Code criminel. Les infractions comme celles-ci sont simples à déterminer : la personne cache l’arme ou n’est pas autorisée à posséder cette arme, ou bien elle ne la cache pas ou est autorisée à la posséder. Les faits sont discernables et la preuve n’est pas complexe, il n’est donc pas nécessaire de se présenter devant la SI aux fins d’enquête. Parmi les autres infractions pour lesquelles une mesure de renvoi peut être prise qui seront transférées au délégué du ministre, mentionnons l’évasion ou la tentative d’échapper à la garde légale, prévue à la LIPR, le fait de contrevenir à une condition d’un permis ou d’un enregistrement, prévue à la Loi sur les armes à feu, et l’omission de signaler des armes ou des armes à feu, ou la contrebande d’armes ou d’armes à feu, prévue à la Loi sur les douanes. La prise de mesures de renvoi dans des cas plus complexes, comme ceux liés aux stupéfiants, à la conduite avec les facultés affaiblies ou aux infractions qui nécessitent des tests en laboratoire, est toujours traitée par la SI.

Élaboration de la réglementation

Consultation

Des consultations ciblées ont été tenues en novembre 2020. Les principaux intervenants suivants ont été avisés du processus de consultation :

En se fondant sur les commentaires reçus, l’Agence a révisé l’approche. Par exemple, certaines infractions criminelles, comme celles liées aux substances contrôlées et à la conduite avec les facultés affaiblies, ont été retirées de la proposition de transfert du pouvoir au délégué du ministre au motif qu’elles peuvent comprendre des éléments de preuve complexes (par exemple des tests en laboratoire) et qu’il est préférable de les examiner dans le cadre d’une enquête. Un autre changement apporté en fonction des commentaires des intervenants a été de laisser à la SI le pouvoir de prendre des mesures de renvoi pour des infractions liées à des documents frauduleux. La proposition initiale recommandait de transférer ce pouvoir au délégué du ministre. Toutefois, compte tenu des préoccupations soulevées au sujet des personnes qui fuient la persécution, on a convenu de laisser à la SI la responsabilité relative à ce type d’infraction.

D’autres commentaires formulés par les intervenants étaient liés au droit à un avocat et au fait que les préjugés inconscients à l’égard des personnes noires, autochtones et de couleur peuvent avoir une incidence sur les résultats en matière d’exécution de la loi. Une analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) a été menée relativement à ce projet de règlement et il a été déterminé qu’aucun groupe ne serait touché de façon disproportionnée par la proposition (pour en savoir plus, voir la section sur l’ACS+). Bien que l’on ne s’attende pas à ce que le Règlement ait une incidence sur les résultats en matière d’exécution de la loi, l’ASFC a élaboré des lignes directrices opérationnelles réitérant que les procédures normales concernant le droit à un avocat demeureront en place lorsque la personne est détenue.

En outre, les intervenants craignaient que les modifications réglementaires donnent lieu à un manque de garanties procédurales, mettant en danger les populations vulnérables. L’ASFC a des mesures de protection et une formation en place pour répondre à ces préoccupations. Par exemple, les agents reçoivent une formation sur la manière d’identifier les personnes vulnérables, telles que les mineurs non accompagnés, les victimes présumées ou connues de la traite des personnes et de la violence fondée sur le sexe ainsi que les personnes qui ne sont pas en mesure de comprendre la nature des procédures. En outre, le Règlement ne modifie pas les voies de recours ou de contrôle judiciaire actuellement disponibles ni n’a d’incidence sur celles-ci.

Publication préalable

Les modifications proposées ont été publiées préalablement dans la Partie I de la Gazette du Canada le 16 décembre 2023 pour une période de commentaires du public de 30 jours. Deux intervenants ont formulé un total de dix commentaires, dont seulement deux faisaient partie de la portée de cette proposition.

En ce qui concerne le cannabis, deux intervenants ont partagé l’opinion que les ressortissants étrangers ne devraient pas être interdits de territoire sous motif d’importation de cannabis. Comme décrit ci-dessus, aux termes de la Loi sur le cannabis, il est illégal d’importer ou d’exporter du cannabis au Canada sans permis ou exemption valides délivrés par Santé Canada. De plus, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances établit un cadre qui réglemente la possession, l’importation, l’exportation, la distribution et la vente de substances désignées, incluant le cannabis.

Ces recommandations n’ont pas été retenues puisque les deux Lois ont des dispositions en place qui font que l’importation et l’exportation illégales de cannabis sont une infraction, en dehors de ces modifications réglementaires. Il s’agit d’infractions criminelles graves en vertu de la loi fédérale canadienne. Les modifications incluent donc les infractions actuelles visées par la Loi sur le cannabis comme des motifs d’interdiction de territoire selon la disposition relative à la criminalité transfrontalière dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

Aucun changement n’a été fait au Règlement à la suite de la période de commentaires publics de la publication préalable.

Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones

La proposition a été soumise à une évaluation des répercussions des traités modernes, conformément à la Directive du Cabinet sur l’approche fédérale pour la mise en œuvre des traités modernes. L’évaluation a porté sur la zone géographique et l’objet de l’initiative en lien avec les traités modernes en vigueur, et n’a pas conclu à l’existence de répercussions ou d’obligations potentielles liées à des traités modernes.

Comme il est mentionné dans la section « Contexte » ci-dessus, les modifications n’élargissent pas la portée de l’interdiction de territoire pour criminalité (à savoir qui pourra se voir refuser l’entrée). Plutôt que de demander la prise d’une mesure de renvoi, les agents des services frontaliers auront toujours l’option de permettre aux voyageurs, notamment autochtones, de retirer leur demande d’entrée au Canada s’ils jugent qu’il est approprié de le faire, en ayant pris en considération les circonstances de l’infraction commise.

Indépendamment de ce règlement, l’ASFC travaille avec IRCC et des partenaires autochtones pour régler les problèmes complexes liés au passage de la frontière et à la migration auxquels se heurtent les peuples autochtones divisés par les frontières internationales du Canada. On envisage notamment, pour ce faire, de modifier la disposition sur le droit d’entrée au Canada, de même que les exigences des permis d’études et de travail. Le ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord mène également des travaux distincts sur l’incidence de la décision de la Cour suprême dans l’arrêt Desautel (2021), selon laquelle, des groupes autochtones localisés hors du Canada peuvent être des peuples autochtones du Canada et peuvent avoir des droits ancestraux au Canada comme la chasse dans certaines circonstances. La Cour suprême n’a pas décidé s’il en découlait un droit d’entrée au Canada. Comme indiqué dans le plan d’action de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le gouvernement du Canada propose de poursuivre des modifications législatives à la LIPR et des modifications réglementaires au RIPR pour régler les problèmes complexes liés au passage de la frontière auxquels sont confrontés les peuples autochtones divisés par les frontières internationales du Canada (Plan d’action priorités — mesure 52 des priorités partagées).

Choix de l’instrument

Le RIPR est lié à la disposition sur l’interdiction de territoire prévue par la LIPR relativement à la perpétration d’une infraction à l’entrée au Canada (c’est-à-dire la criminalité transfrontalière). Cette disposition législative fait référence à la mention « précisée par règlement »; la modification du Règlement est donc le seul instrument possible pour atteindre l’objectif de la politique. La politique opérationnelle n’est pas suffisante à elle seule à apporter les changements nécessaires.

Analyse de la réglementation

Scénario de référence

Le cadre de réglementation actuel sur la criminalité transfrontalière englobe un large éventail d’infractions criminelles, y compris des infractions qui ne peuvent être commises à un point d’entrée. Dans le cadre actuel, les infractions moins graves (par exemple l’omission de déclarer des articles achetés) ont les mêmes conséquences que les infractions plus graves (par exemple la contrebande de drogue). De plus, tous ces cas doivent être transférés à la SI à des fins d’enquête, et il peut s’écouler des mois avant qu’une mesure de renvoi ne soit prise. Si ce règlement n’est pas modifié, les mêmes conséquences (c’est-à-dire une interdiction à vie) continueraient de s’appliquer pour les infractions graves et les infractions moins graves. La prise de mesures de renvoi demeurerait également plus coûteuse pour les infractions simples, puisque l’ASFC doit demander une mesure de renvoi à la SI. Selon un examen manuel des données de 2016 à 2019, en moyenne, 15 cas par année sont transférés à la SI à des fins d’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière.

Scénario d’application des modifications réglementaires

Les modifications réglementaires précisent les infractions énumérées dans le Règlement pour que seules les infractions pouvant être commises à un point d’entrée ainsi que les infractions qui atteignent un certain seuil de gravité y figurent. Cela permet de s’assurer que les infractions relativement mineures ne sont pas traitées de la même façon que les infractions plus graves. En outre, les modifications réglementaires permettent au délégué du ministre de prendre immédiatement des mesures de renvoi dans les cas simples. Il n’est plus nécessaire de transférer le cas à la SI pour attendre la prise d’une mesure de renvoi. À la suite de la mise en œuvre des modifications réglementaires pour transférer au délégué du ministre le pouvoir de prendre des mesures de renvoi pour les infractions prévues, trois cas par année relèveront de la compétence du délégué du ministre et n’auront plus besoin d’être renvoyés à la SI. Cela permettra à l’ASFC de réaliser des économies.

Avantages

Ces modifications améliorent la précision, la clarté et la transparence en ce qui concerne les décisions d’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière rendues par les agents aux points d’entrée.

Plus précisément, les modifications permettront de réduire le nombre de personnes interdites de territoire qui entrent au Canada par les points d’entrée dans le seul but de participer à une enquête et de faire l’objet d’un renvoi subséquent (si la personne est jugée interdite de territoire). Les modifications permettront d’accroître l’efficience et de réaliser des économies de coûts, car elles permettront de renvoyer du Canada une personne interdite de territoire directement à partir du point d’entrée plutôt que de faire entrer la personne au pays avant de la renvoyer. Cela élimine les coûts de détention potentiels ainsi que les coûts liés à l’enquête. Ces modifications permettent également de réduire le risque de fuite, puisque moins de personnes interdites de territoire seront présentes au pays, améliorant ainsi l’intégrité des programmes frontaliers et d’immigration et atténuant davantage les risques pour la sécurité publique. De plus, en désignant certaines infractions, les décisions relatives à cette disposition seront plus uniformes dans l’ensemble du pays, ce qui renforcera l’intégrité des programmes et de l’immigration. Certaines infractions sont également éliminées du cadre d’interdiction de territoire pour criminalité transfrontalière afin de s’assurer que les infractions mineures, comme l’omission de déclarer des produits alimentaires, ne soient pas considérées comme des actes criminels. Les modifications réglementaires permettent de concentrer les ressources de l’ASFC sur les activités suspectes à la frontière les plus graves. En outre, les modifications répondent partiellement à certaines des préoccupations soulevées dans le rapport du Comité permanent et le rapport du BVG de 2020 concernant la nécessité d’assurer des renvois en temps opportun, et comblent les lacunes restantes dans la capacité de l’ASFC de gérer efficacement la frontière.

Grâce à la diminution du nombre d’enquêtes requises, les modifications entraîneront des économies de coûts pour l’ASFC et la CISR. En termes de valeur actuelle (exercice 2024-2025), il est attendu que ces modifications permettront à l’ASFC d’économiser environ 152 439 $ sur 10 ans (prix de l’année de référence 2023) et à la CISR d’économiser environ 27 391 $.

Coûts

Bien que les modifications entraîneront des avantages généraux et des économies de coûts, il y aura des coûts mineurs associés à cette proposition.

L’ASFC assumera des coûts mineurs liés aux activités de mise en œuvre, de communication et de sensibilisation nécessaires à la suite des modifications réglementaires (par exemple mise à jour des notes de service et des instruments de travail de l’Agence, réponse aux demandes d’orientation fonctionnelle et mise à jour du contenu de la page Web de l’ASFC).

Lentille des petites entreprises

L’analyse selon la lentille des petites entreprises a permis de conclure que les modifications n’ont aucune incidence sur les petites entreprises canadiennes. Les modifications n’ont d’incidence que sur les ressortissants étrangers qui ont commis une infraction à leur entrée au Canada et qui doivent faire l’objet d’une mesure de renvoi.

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s’applique pas, étant donné que les modifications n’entraînent pas de changement progressif du fardeau administratif des entreprises et qu’aucun titre réglementaire n’est abrogé ou adopté.

Coopération et harmonisation en matière de réglementation

Les modifications ne s’appliquent qu’au processus décisionnel relatif à l’interdiction de territoire entrepris par les agents et les représentants de l’ASFC, d’IRCC et de la CISR. Il n’existe aucun conflit réglementaire avec d’autres administrations devant être réglé ni aucune exigence d’harmonisation entre les provinces ou les territoires du Canada, les États-Unis, l’Union européenne ou des organisations internationales.

Évaluation environnementale stratégique

Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a permis de conclure qu’une évaluation environnementale stratégique n’est pas requise. Les modifications n’ont d’incidence que sur le processus décisionnel relatif à l’interdiction de territoire pour les ressortissants étrangers qui sont présumés interdits de territoire au Canada pour des motifs de criminalité transfrontalière.

Analyse comparative entre les sexes plus

Une analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) a été menée relativement à ces modifications et il a été déterminé qu’aucun groupe n’est touché de manière disproportionnée par le projet.

Tel qu’il a été mentionné précédemment, ces modifications comportent deux parties. La première partie consiste à accroître la transparence des infractions qui peuvent rendre une personne interdite de territoire en vertu de cette disposition et à en réduire le nombre. Ces modifications particulières restreignent les pouvoirs des agents en éliminant certaines infractions du champ d’application de l’interdiction de territoire transfrontalière. Par conséquent, on ne s’attend pas à ce que ces modifications réglementaires aient une incidence sur les populations en fonction de l’identité de genre, du sexe, de l’âge, du revenu, des capacités et d’autres facteurs.

La deuxième partie des modifications réglementaires consiste à transférer au délégué du ministre le pouvoir de prendre des mesures de renvoi pour des infractions simples, comme l’importation d’une arme à feu sans permis. Les préoccupations soulevées par les intervenants étaient liées à cette deuxième partie de modifications réglementaires, en partie en raison de préoccupations concernant les préjugés inconscients à l’égard des communautés de personnes autochtones, noires et de couleur. L’ASFC demeure engagée à lutter contre le racisme systémique et les préjugés dans ses politiques et ses programmes. Tous les employés de l’ASFC participent à la formation sur la diversité et les relations raciales qui permet de mieux comprendre et de mieux connaître la gestion de la diversité et des relations raciales, en plus de fournir des stratégies en la matière. La formation vise à examiner l’incidence des stéréotypes, des préjugés, de la discrimination et du parti pris dans les interactions entre diverses cultures.

En outre, tel qu’il est mentionné précédemment, les modifications ne devraient pas avoir de résultats différentiels en ce qui concerne l’application de la loi. À l’heure actuelle, les délégués du ministre sont autorisés à examiner les allégations d’interdiction de territoire en vertu de cette disposition et à renvoyer les allégations bien fondées à la SI en vue d’une enquête. La SI, en droit, n’a pas le pouvoir discrétionnaire de ne pas prendre de mesure de renvoi contre une personne qu’elle juge interdite de territoire. Pour rendre cette décision, la SI ne peut tenir compte que de l’interdiction de territoire elle-même à l’égard des actes de la personne à la frontière. De plus, tel qu’il est mentionné précédemment, le projet de règlement ne modifie pas les voies de recours ou de contrôle judiciaire actuellement offertes ni n’a d’incidence à cet égard. Par conséquent, aucun résultat ni effet différentiel notable n’est attendu.

En ce qui concerne les statistiques de répartition, la majorité des personnes interdites de territoire en vertu de la disposition relative à l’interdiction de territoire transfrontalière sont généralement des hommes. Dans le cadre d’un examen des dossiers effectué entre 2016 et 2019, il a été déterminé que plus de 90 % des cas concernaient des hommes. De plus, l’ASFC ne recueille des données fondées sur la race que dans des contextes limités. Par conséquent, il existe peu de données sur la race des personnes jugées interdites de territoire en vertu de cette disposition.

Les modifications ne devraient pas augmenter (ou réduire) le taux auquel l’ASFC rencontre des populations vulnérables et les mécanismes de facilitation connexes ne sont pas touchés par les modifications. L’ASFC a mis en place des mesures de protection et une formation préexistantes pour gérer les rencontres avec les personnes vulnérables. À titre d’exemple, les agents reçoivent une formation sur la façon d’identifier les personnes vulnérables, comme les mineurs non accompagnés et les personnes incapables de comprendre la nature des instances. Dans ces cas, le délégué du ministre n’a pas compétence pour prendre une mesure de renvoi et le cas est renvoyé à la SI. Ces mesures de protection ne sont pas modifiées dans le présent projet. L’ASFC offre également une formation aux agents qui, dans l’exercice de leurs fonctions, peuvent rencontrer d’autres personnes vulnérables, comme des victimes de la traite de personnes. Ce module offre de l’information sur la manière de venir en aide aux victimes en les aiguillant vers les organismes gouvernementaux appropriés.

Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service

Mise en œuvre

En ce qui concerne les cas visés par les mesures transitoires, tout ressortissant étranger qui était présumé interdit de territoire et qui a par la suite été renvoyé à la SI pour une audience avant l’entrée en vigueur des modifications verra son cas continuer d’être traité dans le cadre du processus d’enquête. Tous les autres cas seront tranchés par le délégué du ministre.

Quand ces modifications entreront en vigueur, la Cour fédérale continuera d’être en mesure d’entreprendre un contrôle judiciaire des décisions rendues en vertu des modifications. Toute personne directement touchée par une décision de la SI et du délégué du ministre peut présenter à la Cour fédérale une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision. La Cour fédérale examinera ensuite la décision pour s’assurer qu’elle était juste, raisonnable et légale. À moins qu’un sursis judiciaire à la mesure de renvoi ne soit accordé par la Cour fédérale, la personne peut tout de même être renvoyée du Canada, avant l’issue du contrôle judiciaire.

L’ASFC appuiera la mise en œuvre des modifications au moyen de la mise à jour des directives sur le terrain (c’est-à-dire bulletins opérationnels et mises à jour des manuels de programmes); ces directives sur le terrain seront mises à la disposition des représentants de l’ASFC et d’IRCC. Les coûts mineurs associés à cette proposition seront absorbés par l’ASFC.

Les modifications réglementaires entrent en vigueur dès leur publication dans la Partie II de la Gazette du Canada.

Personne-ressource

Jeff Robertson
Gestionnaire
Unité de la politique d’interdiction de territoire
Direction générale de la politique stratégique
Agence des services frontaliers du Canada
Courriel : IEPU-UPELI@cbsa-asfc.gc.ca