Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus : DORS/2022-58
La Gazette du Canada, Partie II, volume 156, numéro 7
Enregistrement
DORS/2022-58 Le 16 mars 2022
LOI SUR LES MESURES ÉCONOMIQUES SPÉCIALES
C.P. 2022-255 Le 16 mars 2022
Attendu que la gouverneure en conseil juge que les actions du Bélarus constituent une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales qui entraîne ou est susceptible d’entraîner une grave crise internationale,
À ces causes, sur recommandation de la ministre des Affaires étrangères et en vertu des paragraphes 4(1) référence a, (1.1) référence b, (2) et (3) de la Loi sur les mesures économiques spéciales référence c, Son Excellence la Gouverneure générale en conseil prend le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus, ci-après.
Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus
Modifications
1 L’alinéa 3e) du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus référence 1 est remplacé par ce qui suit :
- e) de rendre disponibles des biens ou de fournir des services financiers ou connexes à une personne dont le nom figure sur la liste ou à son bénéfice.
2 La partie 1.1 de l’annexe 1 du même règlement est modifiée par adjonction, après l’article 19, de ce qui suit :
- 20 Oleg Leonidovich VOINOV (né en 1967)
- 21 Dmitry Anatolievich MIHOLAP (né en 1974)
- 22 Anatoliy Anatolievich BULAVKO (né en 1969)
- 23 Victor Vladimirovich SOYKO (né en 1971)
- 24 Vadim Anatolyevich LUKASHEVICH
- 25 Dmitry Alexandrovich ZABROTSKY (né en 1971)
- 26 Oleg Nikolayevich KOPYL
- 27 Leonid Viktorovich KASINSKY (né le 29 juin 1972)
- 28 Igor Vladimirovich MOZHILOVSKY (né en 1971)
- 29 Sergei Anatolievich SAUTA
- 30 Dmitri Ivanovich SUROVICH
- 31 Ivan Josephovich BOGUSLAVSKY (né le 4 août 1968)
- 32 Yuri Mikhailovich PEYGANOVICH
- 33 Alexander Ivanovich BAS (né le 17 août 1971)
- 34 Dmitry Leontievich BEKREN (né en 1979)
- 35 Vadim Evgenievich SHADURA
- 36 Vitaly Fridrikhovich KILCHEVSKY (né en 1978)
- 37 Valery Ivanovich YANUSHKEVICH
- 38 Sergey Nikolayevich GRINYUK (né le 11 mai 1971)
- 39 Vyacheslav Aleksandrovich LENKEVICH
- 40 Aleksandr Viktorovich NAUMENKO
- 41 Vladimir Vladimirovich KULAZHIN
Antériorité de la prise d’effet
3 Pour l’application de l’alinéa 11(2)a) de la Loi sur les textes réglementaires, le présent règlement prend effet avant sa publication dans la Gazette du Canada.
Entrée en vigueur
4 Le présent règlement entre en vigueur à la date de son enregistrement.
RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION
(Le présent résumé ne fait pas partie du Règlement.)
Enjeux
Le Bélarus supporte la violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine par la Fédération de Russie.
Contexte
Le 9 août 2020, la République du Bélarus a tenu des élections présidentielles entachées de nombreuses irrégularités. Sous la direction du président au pouvoir Alexandre Loukachenko, le gouvernement du Bélarus a mené une campagne de répression systématique pendant la période précédant le vote et pendant le déroulement de l’élection elle-même, et a utilisé la violence soutenue par l’État contre le peuple bélarussien afin de réprimer les manifestations antigouvernementales. Human Rights Watch, Amnistie internationale, le Bureau du commissaire aux droits de l’homme des Nations Unies, le Viasna Human Rights Centre, ainsi que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), ont tous signalé de nombreuses violations des droits de la personne. Depuis lors, plusieurs organisations renommées des droits de la personne, incluant le Viasna Human Rights Centre, ont été contraintes de fermer.
Depuis les élections présidentielles de 2020, le gouvernement du Bélarus continue de commettre des violations flagrantes et systématiques des droits de la personne. Celles-ci comprennent des détentions arbitraires prolongées, la brutalité, l’intimidation et l’usage excessif de la force contre des manifestants pacifiques. Les arrestations arbitraires se poursuivent. De plus, il existe des restrictions indues aux droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et à la liberté d’association. Les observateurs des droits de la personne ont identifié une escalade de l’ampleur de la répression contre les journalistes indépendants en 2021, notamment des détentions arbitraires, l’imposition d’amendes et de peines de prison, la perte d’accréditations médiatiques et des descentes de police. Le 23 mai 2021, le gouvernement du Bélarus a orchestré un événement qui a constitué une escalade importante et dangereuse de ses attaques contre les voix de l’opposition. Le vol Ryanair 4978, volant entre Athènes (Grèce) et Vilnius (Lituanie), a été dérouté vers l’aéroport national de Minsk à la demande des autorités aéronautiques bélarussiennes. Le détournement a été demandé sur la base d’une éventuelle menace à la bombe à bord, qui n’a pas été corroborée. À l’atterrissage à Minsk, deux passagers, le journaliste et militant bélarussien Roman Protasevich et sa compagne russe Sofia Sapega, ont été retirés du vol. En date d’octobre 2021, ils demeurent assignés à résidence, en attendant leur procès.
Le Canada s’est fortement engagé dans la situation au Bélarus, tant directement avec le gouvernement du Bélarus et avec des partenaires internationaux, ainsi qu’au sein de forums multilatéraux, tels que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, la Coalition pour la liberté des médias et la Freedom Online Coalition. Jusqu’à maintenant, le Canada a sanctionné 115 individus et 37 entités liés aux événements au Bélarus, incluant l’imposition de restrictions sur certaines activités liées aux valeurs mobilières et aux instruments du marché monétaire, au financement par emprunt, à l’assurance et à la réassurance, aux produits pétroliers, et aux produits à base de chlorure de potassium. Des modifications au Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus (le Règlement) ont été apportées à six reprises distinctes entre 2020 et 2022.
Le Décret concernant l’autorisation, par permis, à procéder à certaines opérations (mesures économiques spéciales — Bélarus), entré en vigueur le 2 octobre 2020, confère au ministre des Affaires étrangères le pouvoir de délivrer à une personne se trouvant au Canada ou à un Canadien se trouvant à l’étranger un permis l’autorisant à exécuter une activité ou une transaction, ou tout autre type d’activités ou de transactions, qui feraient autrement l’objet d’une interdiction en vertu du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus.
Depuis la mi-2021, il y a eu un rapprochement entre le Bélarus et la Russie. La Russie apporte un soutien diplomatique, financier, militaire, aux médias et au renseignement au Bélarus. Le 30 novembre 2021, Loukachenko a mentionné que le territoire de la Crimée occupé par la Russie était légalement devenu une partie de la Russie en 2014, ajoutant qu’il avait planifié de visiter la péninsule avec le président russe Vladimir Poutine. Ceci marque un changement important des déclarations précédentes du Bélarus.
Il y a eu un renforcement significatif des troupes russes (environ 150 000 à 190 000), des équipements militaires et des capacités militaires en Ukraine et dans les environs depuis l’automne 2021, ainsi qu’à des mois d’intensification de la part de la Russie. Ceci inclut les exercices militaires au Bélarus, avec la participation des forces armées du Bélarus. La Russie et le Bélarus ont tenu des exercices militaires anticipés du 10 au 20 février 2022. Toutefois, le 20 février 2022, la Russie a étendu la durée de cet exercice militaire avec le Bélarus et a annoncé que les troupes russes ne quitteraient pas le Bélarus. Les relations du Bélarus avec l’Ukraine, les États-Unis et l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) se sont également détériorées, ce qui a mené à des tensions accrues.
Le 24 février 2022, le président Poutine a annoncé une « opération militaire spéciale » au moment où des forces russes lançaient une invasion à grande échelle contre l’Ukraine. Cette invasion a commencé par des frappes ciblées sur des infrastructures militaires ukrainiennes d’importance, avec des forces russes avançant au nord de l’Ukraine en provenance de la Russie et du Bélarus, à l’est en provenance de la Russie et les régions dites République populaire de Louhansk et République populaire de Donetsk, et au sud en provenance de la Crimée. L’attaque de la Russie contre l’Ukraine est déjà bien avancée. Le 27 février, le régime de Loukachenko a adopté un amendement frauduleux à la Constitution du Bélarus supprimant l’article 18, qui s’engageait à « faire de son territoire une zone dénucléarisée et un État neutre ». Cette décision a ouvert la voie au Bélarus pour accueillir des armes nucléaires russes. À la suite de l’invasion, les forces du Bélarus ont été déployées à la frontière avec l’Ukraine, mais n’ont pas encore pénétré en Ukraine elle-même.
Réponse internationale
Depuis le début de la crise actuelle, le Canada et la communauté internationale demandent à la Russie de désamorcer la situation, de poursuivre la voie diplomatique et de faire preuve de transparence dans ses activités militaires. Les négociations diplomatiques se sont déroulées sur plusieurs pistes, notamment par : (1) les pourparlers bilatéraux entre les États-Unis et la Russie (par exemple le Dialogue stratégique sur la stabilité); (2) l’OTAN; (3) l’OSCE; (4) le Format Normandie (Ukraine, Russie, Allemagne, France) pour la mise en œuvre des accords de Minsk.
Le 21 février 2022, les ministres des Affaires étrangères du G7 ont publié une déclaration condamnant la reconnaissance russe des soi-disant régions de la République populaire de Louhansk et de la République populaire de Donetsk, et mentionnant que le G7 s’apprêtait à renforcer ses mesures restrictives en réponse aux actions russes. De plus, les membres ont réaffirmé leur engagement inébranlable envers la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Les ministres des Affaires étrangères du G7 ont également reconfirmé leur soutien à la mise en œuvre intégrale des accords de Minsk pour mettre fin au conflit dans l’est de l’Ukraine. Cette déclaration fait suite à une déclaration similaire faite en décembre 2021 et à celle des ministres des Affaires étrangères de l’OTAN en janvier 2022. Le Canada et le G7 ont aussi appelé le Bélarus à cesser son support pour l’invasion russe.
Le Canada travaille en proche collaboration avec ses alliés. Les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Union européenne, ainsi que d’autres alliés, ont signalé leur support ou ont déjà annoncé des sanctions en réponse à l’attaque militaire en Ukraine de la Russie, dont via le Bélarus.
Objectifs
- Imposer des coûts à l’encontre du Bélarus pour son support à l’invasion non provoquée et injustifiable de la Russie de l’Ukraine;
- Souligner que le Canada ne reconnaît pas l’indépendance et la souveraineté des présumées régions de la République populaire de Louhansk et de la République populaire de Donetsk ou l’annexion illégale de la Crimée et la saisie militaire d’autres régions du pays avec l’aide du Bélarus puisqu’elles font partie intégrante de l’Ukraine.
- Maintenir l’alignement des mesures canadiennes avec celles prises par les partenaires internationaux du Canada pour démontrer la détermination et l’unité des pays alliés et partenaires dans la réponse aux actions de la Russie et du Bélarus en Ukraine.
Description
Le Règlement modifiant le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus (les modifications) ajoute 22 nouveaux individus à la partie 1.1 de l’annexe 1 du Règlement, les soumettant ainsi à une interdiction générale de transactions. Ces individus sont de hauts fonctionnaires du ministère de la Défense du gouvernement du Bélarus.
Élaboration de la réglementation
Consultation
Affaires mondiales Canada mobilise régulièrement les intervenants pertinents, qui incluent des organisations de la société civile, des communautés culturelles, et des représentants d’autres gouvernements aux vues similaires pour discuter de l’approche du Canada relative à la mise en œuvre de sanctions.
Pour ce qui est du processus de modifications des listes de sanctions, il n’est pas approprié d’y inclure des consultations publiques, compte tenu de l’urgence d’imposer ces mesures en réponse à la violation continue de la paix et de la sécurité internationales en Ukraine.
Obligations relatives aux traités modernes et consultation et mobilisation des Autochtones
Une évaluation initiale de la portée géographique des modifications a été effectuée et n’a révélé aucune obligation découlant des traités modernes, puisque les modifications ne prendront pas effet dans une région visée par un traité moderne.
Choix de l’instrument
Au Canada, les règlements sont le seul instrument permettant d’appliquer des sanctions. Aucun autre instrument ne pourrait être considéré.
Analyse de la réglementation
Avantages et coûts
Les sanctions visant des personnes spécifiques ont moins d’impact sur les entreprises canadiennes que les sanctions économiques traditionnelles à grande échelle, et les modifications auront un impact limité sur les citoyens du pays des personnes inscrites sur la liste. Il est probable que les individus désignés ont des liens limités avec le Canada et n’ont donc pas d’activités commerciales importantes pour l’économie canadienne.
Les banques et les institutions financières canadiennes sont tenues de se conformer aux sanctions. Elles le feront en ajoutant les nouveaux individus désignés à leurs systèmes de surveillance existants, ce qui pourrait entraîner un coût de mise en conformité mineur.
Les modifications entraîneront des coûts supplémentaires pour les entreprises qui cherchent à obtenir des permis qui les autoriseraient à effectuer des activités ou des transactions spécifiques qui sont autrement interdites.
Lentille des petites entreprises
Les modifications pourraient entraîner des coûts supplémentaires pour les petites entreprises qui chercheront à obtenir des permis qui les autoriseraient à effectuer des activités ou des transactions spécifiques qui sont autrement interdites. Cependant, les coûts seront probablement faibles, car il est peu probable que les petites entreprises canadiennes aient ou auront des relations avec les individus nouvellement inscrits. Aucune perte notable d’opportunité pour les petites entreprises n’est prévue en raison des modifications.
Règle du « un pour un »
Puisque les modifications réglementaires n’entraîneront pas de coûts administratifs, la règle du « un pour un » ne s’applique pas.
Coopération et harmonisation en matière de réglementation
Bien que les modifications ne soient pas liées à un plan de travail ou à un engagement dans le cadre d’un forum officiel de coopération réglementaire, elles s’alignent sur les mesures prises par des partenaires aux vues similaires.
Évaluation environnementale stratégique
Il est peu probable que les modifications entraînent des effets importants sur l’environnement. Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une analyse préliminaire a permis de conclure qu’une évaluation environnementale stratégique n’est pas nécessaire.
Analyse comparative entre les sexes plus (ACS+)
Le sujet des sanctions économiques a déjà fait l’objet d’une analyse des effets sur le genre et la diversité dans le passé. Bien qu’elles visent à encourager un changement de comportement en exerçant une pression économique sur des individus et entités à l’étranger, les sanctions prises en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales peuvent néanmoins avoir une incidence involontaire sur certains groupes et certaines personnes vulnérables. Les sanctions ciblées n’auront pas d’effet sur le Bélarus dans son ensemble, mais plutôt sur des individus et entités soupçonnés de mener des activités qui soutiennent, facilitent ou financent, directement ou indirectement, une violation de la souveraineté ou de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, ou y contribuent. Par conséquent, ces sanctions économiques n’auront probablement pas d’incidence importante sur les groupes vulnérables, en comparaison aux larges sanctions traditionnelles, et leurs effets collatéraux se limiteront aux personnes qui dépendent des personnes ciblées.
Justification
Les modifications sont une réponse directe à l’implication du Gouvernement du Bélarus et des forces armées du Bélarus dans l’invasion de l’Ukraine du 24 février 2022, laquelle constitue une violation flagrante de la Russie et du Bélarus de l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine, et du droit et des principes internationaux. Le Bélarus s’est rendu complice de ses actions par le biais de son support à la Russie. En coordination avec les actions menées par les alliés du Canada, les modifications visent à imposer des coûts économiques directs sur le Bélarus et signalent la condamnation ferme par le Canada de l’implication du Bélarus dans les dernières violations russes de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Ukraine.
Mise en œuvre, conformité et application, et normes de service
Les noms des individus inscrits seront mis en ligne pour que les institutions financières puissent les examiner et seront ajoutés à la Liste consolidée des sanctions autonomes canadiennes. Cela contribuera à faciliter la conformité aux modifications.
Les règlements de sanctions canadiennes sont appliqués par la Gendarmerie royale du Canada et l’Agence des services frontaliers du Canada. Conformément à l’article 8 de la Loi sur les mesures économiques spéciales, quiconque contrevient sciemment au Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus est passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’une amende maximale de 25 000 $ ou d’une peine d’emprisonnement maximale d’un an, ou d’une combinaison des deux; ou encore, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, d’une peine d’emprisonnement maximale de cinq ans.
Personne-ressource
Andrew Turner
Directeur
Direction de l’Europe de l’Est et de l’Eurasie
Affaires mondiales Canada
125, promenade Sussex
Ottawa (Ontario)
K1A 0G2
Téléphone : 343‑203‑3603
Courriel : Andrew.Turner@international.gc.ca