Vol. 148, no 6 — Le 12 mars 2014

Enregistrement

DORS/2014-35 Le 28 février 2014

LOI SUR LA PROTECTION DE L’INFORMATION

Décret modifiant l’annexe de la Loi sur la protection de l’information

C.P. 2014-165 Le 28 février 2014

Attendu que le gouverneur en conseil estime que les fonctions de tout ou partie des ministères, secteurs ou organismes de l’administration publique fédérale visés aux articles 2 à 4 du décret ci-après sont principalement liées aux questions de sécurité et de renseignement,

À ces causes, sur recommandation du ministre de la Justice et en vertu de l’article 9 (voir référence a) de la Loi sur la protection de l’information (voir référence b), Son Excellence le Gouverneur général en conseil prend le Décret modifiant l’annexe de la Loi sur la protection de l’information, ci-après.

DÉCRET MODIFIANT L’ANNEXE DE LA LOI SUR LA PROTECTION DE L’INFORMATION

MODIFICATIONS

1. L’annexe de la Loi sur la protection de l’information (voir référence 1) est modifiée par suppression de ce qui suit :

Programme des missions de protection de la GRC

Protective Operations Program of the R.C.M.P.

2. Dans l’annexe de la même loi, la mention

Direction des télécommunications du Conseil national de recherches

Communication Branch of the National Research Council

est remplacée par ce qui suit :

Direction des télécommunications du Conseil national de recherches (telle que la direction existait avant le 1er avril 1975, date du transfert de ses responsabilités au ministère de la Défense nationale)

Communications Branch of the National Research Council (as that Branch existed before April 1, 1975, when control and supervision of the Branch was transferred to the Department of National Defence)

3. Dans l’annexe de la même loi, la mention

Programme des opérations techniques de la GRC

Technical Operations Program of the R.C.M.P.

est remplacée par ce qui suit :

Programme des opérations techniques de la GRC, à l’exclusion de la Sous-direction du service de l’air

Technical Operations Program of the R.C.M.P., excluding the Air Services Branch

4. L’annexe de la même loi est modifiée par adjonction, selon l’ordre alphabétique, de ce qui suit :

ENTRÉE EN VIGUEUR

5. Le présent décret entre en vigueur à la date de son enregistrement.

RÉSUMÉ DE L’ÉTUDE D’IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION

(Ce résumé ne fait pas partie du Décret.)

Enjeux

Des modifications à l’annexe de la Loi sur la protection de l’information (voir référence 2) (la Loi) sont nécessaires afin de protéger les intérêts du Canada en matière de sécurité nationale et les renseignements gouvernementaux les plus sensibles sur le plan opérationnel. Les modifications donnent des assurances supplémentaires aux partenaires et alliés internationaux du Canada que les renseignements opérationnels spéciaux qu’ils partagent avec le Canada seront protégés.

Contexte

La partie 2 de la Loi antiterroriste, qui est entrée en vigueur le 24 décembre 2001, a modifié la Loi sur les secrets officiels et lui a conféré un nouveau titre, soit la Loi sur la protection de l’information.

Le Parlement a établi un régime aux articles 8 à 15 de la Loi afin de protéger des « renseignements opérationnels spéciaux » définis au paragraphe 8(1) de la Loi de la divulgation non autorisée. Il s’agit des renseignements du gouvernement les plus sensibles ayant trait à l’essence même des intérêts du Canada en matière de sécurité nationale. Par conséquent, seul un nombre limité de personnes a accès à ce genre de renseignements. Ce sont, essentiellement, certains membres ou employés — actuels ou anciens — du secteur de la sécurité et du renseignement. Pour être assujettis au régime de la Loi, ces individus doivent être désignés spécifiquement comme des « personnes astreintes au secret à perpétuité », parce que seules les personnes incluses dans cette définition peuvent être poursuivies aux termes des infractions prévues aux articles 13 et 14 de la Loi.

L’article 13 de la Loi crée une infraction criminelle pour une personne astreinte au secret à perpétuité qui, intentionnellement et sans autorisation, communique ou confirme des renseignements qui, s’ils étaient vrais, seraient des renseignements opérationnels spéciaux, tandis que l’article 14 crée quant à lui une infraction criminelle pour une telle personne qui, intentionnellement et sans autorisation, communique ou confirme des renseignements opérationnels spéciaux.

Des personnes astreintes au secret à perpétuité qui commettent des infractions aux termes des articles 13 ou 14 de la Loi peuvent être condamnées à une peine d’emprisonnement maximale de cinq ans moins un jour ou à une peine d’emprisonnement maximale de quatorze ans, respectivement. Toutefois, l’article 15 prévoit un moyen de défense fondé sur l’intérêt public grâce auquel nul ne peut être déclaré coupable d’une infraction prévue aux articles 13 ou 14 s’il établit qu’il a agi dans l’intérêt public.

La Loi prévoit deux méthodes pour astreindre les individus au secret à perpétuité. D’abord, l’article 10 permet la désignation par avis écrit et signé par l’administrateur général approprié et signifié à la personne visée. Deuxièmement, l’article 9 prévoit la désignation à l’annexe du nom de tout ou partie d’un ministère, d’un secteur ou d’un organisme de l’administration publique fédérale — ancien ou actuel — dont les fonctions sont ou étaient principalement liées aux questions de sécurité et de renseignement. Toute personne qui travaille ou a travaillé pour une entité nommée dans l’annexe est réputée avoir été astreinte au secret à perpétuité.

De temps en temps, l’annexe doit être mise à jour. Par exemple, en 2006, l’annexe a été modifiée par décret afin d’ajouter trois commissions d’enquêtes : la Commission d’enquête sur les actions des responsables canadiens relativement à Maher Arar, la Commission d’enquête relative aux mesures d’investigation prises à la suite de l’attentat à la bombe commis contre le vol 182 d’Air India et l’Enquête interne sur les actions des responsables canadiens relativement à Abdullah Almalki, Ahmad Abou-Elmaati et Muayyed Nureddin.

En 2002, un an après l’adoption de la Loi, des consultations ont été tenues au sein du milieu de la sécurité et du renseignement pour vérifier que l’annexe était à jour et contenait seulement des entités dont le mandat exigeait de telles mesures. Ceci a mené à la publication préalable du Décret modifiant l’annexe de la Loi sur la protection de l’information dans la Partie I de la Gazette du Canada (voir référence 3) le 12 mars 2005 (Décret de 2005). Ce décret proposait l’ajout de 14 entités à l’annexe.

Objectifs

Le Décret appuie l’engagement que le gouvernement a pris dans le discours du Trône du 3 mars 2010 de « prendre des mesures pour assurer la sécurité nationale du Canada […] (et de) moderniser les outils judiciaires utilisés pour lutter contre le terrorisme ». Cet engagement a été réitéré dans le discours du Trône du 3 juin 2011 : « Il n’y a pas de devoir plus fondamental pour le gouvernement du Canada que de garantir la sécurité de ses citoyens et de contrer les menaces à la sécurité nationale ». Enfin, le discours du Trône du 16 octobre 2013 a indiqué que « [l]a principale obligation du gouvernement est de protéger la souveraineté du Canada et d’assurer la sécurité des citoyens ».

Description

Le Décret modifie la portée de deux entités courantes et abroge une autre entité de l’annexe. Les modifications ajoutent également à l’annexe les 12 entités suivantes qui ont (ou avaient) des fonctions principalement liées aux questions de sécurité et de renseignement :

Sept de ces 12 entités existent encore, tandis que cinq d’entre elles sont maintenant dissoutes :

Règle du « un pour un »

La règle du « un pour un » ne s’applique pas à cette proposition, puisque cette annexe ne concerne pas les entreprises.

Lentille des petites entreprises

La lentille des petites entreprises ne s’applique pas à cette proposition, puisque l’annexe visée par ces modifications ne concerne pas les petites entreprises.

Consultation

Consultations et modifications au Décret suivant la publication préalable en 2005

Le Décret de 2005 a été suivi par une période de 30 jours permettant au public de présenter leurs commentaires. Une association représentant la presse a signalé diverses préoccupations et a conclu en encourageant le ministère de la Justice à retarder la prise du Décret jusqu’à ce que de plus amples discussions publiques aient eu lieu.

L’association a soulevé les six préoccupations suivantes :

  1. La mesure proposée est draconienne.
  2. La durée de l’astreinte au secret est trop extrême.
  3. Afin de déterminer les exceptions permises, il faudrait examiner la possibilité d’avoir recours au principe de la primauté de l’intérêt public, à des dispositions créant des exceptions ou à un processus d’arbitrage indépendant.
  4. Il y a un risque d’entraver le processus des plaintes du public ou des enquêtes publiques, et cette question devrait être pleinement examinée.
  5. Les modifications proposées devraient être soumises à davantage de consultations publiques.
  6. Les obligations liées au secret violent la Charte canadienne des droits et libertés et il incombe au gouvernement de présenter des preuves pour justifier ces mesures.

Bien que ces préoccupations aient été prises très au sérieux, aucune réponse n’a été fournie à l’association en raison de l’examen approfondi de la Loi antiterroriste (les dispositions créant la Loi sur la protection de l’information faisaient partie de la Loi antiterroriste) effectué par des comités de la Chambre des communes et du Sénat a débuté en décembre 2004 et a pris fin en 2007. Chaque comité parlementaire a tenu de vastes audiences et a entendu de nombreux témoins. Aucun de ces deux comités n’a formulé de recommandations fondées sur les opinions exprimées par l’association. D’ailleurs, les trois commissions d’enquête qui ont été ajoutées à l’annexe en 2006 ont pu effectuer leurs travaux efficacement.

Entre 2009 et 2013, de vastes consultations ont été tenues auprès de tous les ministères et les organismes concernés par les modifications proposées à l’annexe de la Loi, menant aux propositions de modifications suivantes :

1. Quatre autres entités ont été ajoutées aux 14 entités initiales qui figuraient dans le Décret de 2005 :

2. Cinq entités qui relèvent des Forces canadiennes et qui faisaient partie du Décret de 2005 ont été retirées, puisque les Forces canadiennes ne font pas partie de l’administration publique fédérale. Ainsi, ces entités des Forces canadiennes ne peuvent pas figurer à l’annexe en vertu du libellé de l’article 9 de la Loi.

3. La Direction générale de la sécurité nationale (DGSN) du ministère du Solliciteur général a également été retirée parce que le ministère de la Sécurité publique a souhaité recourir aux avis individuels.

Consultations et modifications au Décret suivant la publication préalable en 2013

Le Décret a été publié dans la Partie I de la Gazette du Canada le 8 juin 2013, qui a été suivi par une période de 30 jours permettant au public de présenter leurs commentaires. Quatre personnes et une association ont fourni des commentaires. Les commentaires principaux étaient les suivants :

  1. Aucun renseignement du gouvernement ne justifie d’astreindre une personne au secret à perpétuité.
  2. L’assujettissement d’une personne au secret à perpétuité va à l’encontre d’une société libre et ouverte et pourrait priver les Canadiens d’une perspective historique quant aux mesures et aux efforts déployés pour les protéger.
  3. Des préoccupations ont également été soulevées quant à l’effet paralysant de la mesure sur les personnes astreintes au secret à perpétuité dans leurs communications avec les médias; on se demande d’ailleurs si ces mesures pourraient être utilisées pour dissimuler des actes illégaux.

Tous les commentaires ont été soigneusement examinés et pris en considération. S’il est vrai que l’obligation du secret prévue dans le régime des articles 8 à 15 de la Loi vaut à perpétuité, il n’en va pas de même du statut de « renseignement opérationnel spécial » au sens de l’article 8 de la Loi. Cette qualification disparaît lorsque, par exemple, le gouvernement fédéral cesse de prendre des mesures de protection en ce qui concerne les renseignements en question. En outre, il va sans dire que l’obligation de secret à perpétuité ne s’applique pas lorsque la communication de renseignements opérationnels spéciaux a été autorisée et est faite en conséquence.

Le régime qui s’applique aux personnes astreintes au secret à perpétuité prévoit à l’article 15 de la Loi un moyen de défense restreint fondé sur l’intérêt public, au terme duquel une personne n’est pas coupable d’une infraction dans certaines circonstances, c’est-à-dire lorsqu’elle a agi en vue de révéler une infraction à une loi fédérale, lorsque les motifs d’intérêt public en faveur de la divulgation l’emportent sur ceux en faveur de la non-divulgation et lorsqu’elle croit, pour des motifs raisonnables, qu’une infraction a été, est en train ou est sur le point d’être commise par une personne dans l’exercice effectif ou censé de ses fonctions pour le compte du gouvernement fédéral. Les conditions d’application de ce moyen de défense sont énoncées aux paragraphes 15(2) à (6) de la Loi.

Après la publication préalable du Décret dans la Partie I de la Gazette du Canada, le Groupe litiges et conseils en sécurité nationale du ministère de la Justice, une nouvelle entité dont le mandat touche également principalement les questions de sécurité et du renseignement, a été ajouté à la liste des entités.

Justification

Les 12 entités que le Décret ajoute à l’annexe de la Loi ont été soigneusement sélectionnées.

De plus, le Décret précise la portée du renvoi à la Direction des télécommunications du Conseil national de recherches en ajoutant ce qui suit « (telle que la direction existait avant le 1er avril 1975, date du transfert de ses responsabilités au ministère de la Défense nationale) ». La Direction des télécommunications du Conseil national de recherches a été le prédécesseur du Centre de la sécurité des télécommunications, qui a été transféré au ministère de la Défense nationale en 1975. Cette modification empêche toute confusion entre l’ancienne Direction des télécommunications du Conseil national de recherches et l’actuelle Direction des communications et relations du Conseil national de recherches.

En outre, le Décret remplace la mention « Programme des opérations techniques de la GRC » dans l’annexe par « Programme des opérations techniques de la GRC, à l’exclusion de la Sousdirection du service de l’air ». Cette précision est nécessaire afin de soustraire à l’application du régime spécial des articles 8 à 15 de la Loi les membres ou les employés — actuels ou anciens — de la Sous-direction du service de l’air au sein du Programme des opérations techniques de la GRC, étant donné que les fonctions de cette sous-direction ne sont pas principalement liées aux questions de sécurité et de renseignement.

Enfin, le Décret supprime de l’annexe le « Programme des missions de protection de la GRC ». Cette suppression est conforme à la politique selon laquelle il faut astreindre au secret à perpétuité uniquement les personnes ayant un accès privilégié aux renseignements opérationnels spéciaux. Au besoin, la GRC astreindra au secret à perpétuité sur une base individuelle ces membres ou employées qui doivent l’être en vertu de l’article 10 de la Loi.

Signification personnelle d’un avis

Théoriquement, il n’y a qu’un seul autre moyen qui permettrait d’atteindre les objectifs du Décret, et il s’agit de signifier personnellement un avis à chaque membre ou employé — actuel ou ancien — des 12 entités afin de les désigner comme des « personnes astreintes au secret à perpétuité ».

Toutefois, la signification personnelle d’un tel avis nécessiterait des ressources considérables et entraînerait des coûts et des délais très importants. De plus, identifier et localiser tous les anciens membres ou employés pour leur signifier un avis pourrait s’avérer une tâche presque impossible puisqu’il n’y a aucune raison pour le gouvernement d’avoir des renseignements à jour pour contacter les anciens membres ou employés. Le Décret prévoit une méthode efficace et fiable d’astreindre au secret à perpétuité les membres ou employés — actuels ou anciens — de tout ou partie des 12 entités de l’administration publique fédérale, qui font ou ont fait partie du milieu de la sécurité et du renseignement au Canada.

Partenaires internationaux

Le milieu de la sécurité et du renseignement doit respecter certaines exigences opérationnelles, dont notamment la capacité d’assurer le secret de ses activités et de démontrer qu’il est en mesure de protéger les renseignements qui lui sont confiés.

Le Décret permet au gouvernement du Canada de donner des assurances supplémentaires à ses partenaires et alliés internationaux que les renseignements opérationnels spéciaux partagés avec le Canada seront protégés.

Protection des renseignements personnels

La mesure ne vise pas des renseignements personnels et, par conséquent, n’empiétera pas sur la vie privée des personnes concernées. Le Décret n’entrera pas non plus en conflit avec la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (voir référence 4) (LPFDAR), qui prévoit un mécanisme de divulgation des actes répréhensibles dans le secteur public, y compris la protection des personnes qui divulguent de tels actes. Aux termes de l’article 17 de la LPFDAR, les renseignements opérationnels spéciaux sont exclus de ce mécanisme de divulgation.

Employés

Les employés qui travaillent dans le secteur de la sécurité et du renseignement comprennent généralement que les renseignements opérationnels spéciaux ne peuvent être communiqués ou confirmés sans autorité. Cette obligation est antérieure à l’annexe et s’applique à une catégorie très limitée de renseignements tels qu'ils sont définis dans la Loi. La Loi prévoit également à l’article 15 un moyen de défense restreint fondé sur l’intérêt public relativement aux infractions prévues aux articles 13 et 14 de la Loi.

Presse

Il y aurait une incidence minime sur la presse, qui ne devrait pas avoir accès sans autorisation aux renseignements opérationnels spéciaux. Les renseignements opérationnels spéciaux constituent une catégorie de renseignements très limitée telle qu'elle est définie dans la Loi.

Mise en œuvre, application et normes de service

En plus des infractions commises au Canada, prévues aux articles 13 et 14 de la Loi, l’article 26 prévoit certaines situations où une infraction à la Loi commise à l’étranger pourra être jugée au Canada. Il est important de souligner qu’aucune poursuite ne peut être intentée pour une infraction à la Loi sans le consentement du procureur général du Canada, conformément à l’article 24 de la Loi.

Enfin, la Norme opérationnelle de la Loi sur la protection de l’information (voir référence 5) établit des procédures administratives pour les ministères et les organismes à la fois pour les entités mentionnées à l’annexe de la Loi et pour la désignation sur une base individuelle par avis écrit des personnes astreintes au secret à perpétuité.

Personne-ressource

Dorette Pollard
Avocate
Section de la politique en matière de droit pénal
Ministère de la Justice
284, rue Wellington
Ottawa (Ontario)
K1A 0H8
Téléphone : 613-948-3478
Télécopieur : 613-957-3738