La Gazette du Canada, Partie I, volume 149, numéro 15 : Règlement modifiant le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition
Le 11 avril 2015
Fondement législatif
Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition
Ministère responsable
Ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile
RÉSUMÉ DE L'ÉTUDE D'IMPACT DE LA RÉGLEMENTATION
(Ce résumé ne fait pas partie du Règlement.)
Enjeux
De nouvelles dispositions de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (« la Loi ») permettent au Service correctionnel du Canada (SCC) d'imposer un nouveau régime de surveillance électronique (SE) aux délinquants. Toutefois, avant que la SE puisse être mise en œuvre, plusieurs modifications doivent être apportées au Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (« le Règlement »), pour les deux raisons suivantes : (1) désigner le responsable du SCC auprès de qui un délinquant peut présenter des observations au sujet de la durée de la période pendant laquelle il doit porter un dispositif de SE; (2) autoriser le commissaire du SCC à établir les conséquences potentielles d'un refus de porter le dispositif de surveillance à distance ou de son altération.
Contexte
Le SCC administre les peines d'emprisonnement de deux ans ou plus imposées aux délinquants par des tribunaux. Dans la plupart des cas, les délinquants sous responsabilité fédérale sont libérés avant la fin de leur peine. À titre d'exemple, si l'on établit que les délinquants ne représentent pas un risque élevé pour la sécurité du public, ils doivent être libérés après avoir purgé les deux tiers de leur peine; cette mise en liberté est appelée « libération d'office ». Les délinquants peuvent également présenter une demande de libération conditionnelle (semi-liberté ou libération conditionnelle totale), qui peut leur être accordée s'ils ne présentent pas un risque inacceptable pour la société et si l'on juge que leur mise en liberté facilitera leur réinsertion dans la collectivité.
Les délinquants peuvent également s'absenter temporairement d'un pénitencier pour diverses raisons, comme pour assister aux funérailles d'un membre de leur famille ou pour se rendre à un rendez-vous chez le médecin. Cela s'appelle une « permission de sortir » et, selon le risque pour la sécurité que présente la personne et le moment au cours de la peine, cette permission peut être accordée « avec escorte » ou « sans escorte ».
Un autre type de libération est le placement à l'extérieur. Le programme de placement à l'extérieur permet aux détenus de travailler dans la collectivité, habituellement pendant une période maximale de 60 jours. Les détenus dits « à sécurité moyenne » ou « à sécurité minimale » demandent habituellement ce type de libération six mois après le début de leur peine ou, si cette période est plus longue, après avoir purgé un sixième de la peine. Cependant, seuls les détenus qui ne présentent pas un risque inacceptable de récidive peuvent participer à ce type de programme. Un placement à l'extérieur est accordé par le responsable de l'établissement carcéral.
En règle générale, la mise en liberté des détenus avant la fin de leur peine vise à permettre leur réinsertion graduelle dans la collectivité pendant qu'ils sont sous la surveillance du SCC. Ils améliorent ainsi leurs chances de réussir leur réinsertion sociale.
Lorsque les délinquants sont mis en liberté dans la collectivité, ils continuent de purger leur peine sous la surveillance du SCC jusqu'à ce que leur peine prenne fin, et le SCC est alors dégagé de la responsabilité à leur égard. Il y a toutefois une exception, celle des délinquants pour qui, au moment de la détermination de la peine, une ordonnance de surveillance de longue durée (OSLD) a été émise. Une OSLD, qui est imposée par un juge, exige que le SCC surveille le délinquant au sein de la collectivité pendant une période déterminée pouvant aller jusqu'à 10 ans après la fin de la peine.
Chaque fois qu'un délinquant est surveillé dans la collectivité, peu importe son type de libération, il doit respecter certaines conditions. Il peut se voir imposer une heure de rentrée ou encore il peut devoir habiter dans une maison de transition, demeurer à l'intérieur de certaines frontières géographiques et se tenir loin de certaines personnes.
Le SCC utilise un certain nombre de moyens pour surveiller les délinquants sous sa responsabilité pendant qu'ils effectuent leur transition vers la collectivité (par exemple une communication régulière avec la famille, les voisins ou l'employeur du délinquant, ou la prise et l'analyse d'échantillons d'urine pour veiller à ce que le délinquant respecte la condition lui interdisant de consommer de l'alcool ou des drogues). Le SCC envisage actuellement l'utilisation de la SE.
Surveillance électronique
La surveillance électronique (SE) est un moyen de plus en plus utilisé en Europe (par exemple le Royaume-Uni, la Suède) et en Amérique du Nord (par exemple de nombreux États américains) pour surveiller les déplacements des délinquants. Elle est utilisée par un certain nombre de systèmes correctionnels provinciaux au Canada pour surveiller les délinquants mis en liberté sous caution et ceux qui sont en probation (c'est-à-dire visés par une décision du tribunal permettant à un délinquant de demeurer au sein de la collectivité à condition de respecter les conditions particulières établies par la cour). Même si différentes technologies sont utilisées, les délinquants portent habituellement un bracelet émetteur, muni d'un récepteur GPS (système mondial de localisation) ou d'une radiofréquence qui indique leur emplacement à un réseau de surveillance.
Au Canada, à l'échelle fédérale, la SE serait un outil additionnel permettant au personnel du SCC (c'est-à-dire les agents de libération conditionnelle) de surveiller la conformité d'un délinquant à ses conditions de mise en liberté en matière d'emplacement géographique. Toute violation apparente des conditions par le délinquant ou toute tentative de celui-ci de retirer son dispositif de SE ou de le manipuler inadéquatement entraînerait sans délai une réévaluation du risque qu'il présente. Cela pourrait mener à la prestation de services de counseling au délinquant, à la délivrance d'un mandat de suspension et au recours à la police.
Jusqu'à récemment, le SCC n'avait pas le pouvoir législatif d'exiger que les délinquants sous responsabilité fédérale portent un dispositif de SE.
Modifications législatives
Les politiques, les opérations, les plans et les priorités du SCC sont régis par la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et par un ensemble de mesures législatives subordonnées, soit le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
Grâce aux modifications à la Loi [paragraphe 57.1(1)] entrées en vigueur le 13 juin 2012, le SCC possède maintenant le pouvoir législatif voulu pour « obliger un délinquant à porter un dispositif de surveillance à distance lorsque la permission de sortir, le placement extérieur, la libération conditionnelle ou d'office ou l'ordonnance de surveillance de longue durée est assorti de conditions interdisant au délinquant l'accès à une personne ou à un secteur géographique ou l'obligeant à demeurer dans un secteur géographique ».
De plus, un délinquant doit également pouvoir présenter à une personne désignée par règlement des observations au sujet de la durée pendant laquelle il doit porter un dispositif de surveillance [paragraphe 57.1(2)]. Enfin, le commissaire du SCC pourrait, si des modifications sont apportées au Règlement, établir des règles concernant les conséquences d'un refus de porter le dispositif de surveillance à distance ou de son altération [alinéa 96m.1)].
Objectifs
Voici les deux objectifs des modifications réglementaires proposées :
- Désigner le responsable du SCC auprès de qui un délinquant peut déposer ses observations relativement à la durée pendant laquelle il doit porter un dispositif de surveillance;
- Permettre au commissaire d'établir les conséquences potentielles d'un refus de porter le dispositif de surveillance à distance par le délinquant ou de son altération.
Description
Cette proposition modifierait le Règlement comme suit :
- (1) Possibilité pour le délinquant de faire valoir son point de vue
- La Loi fait allusion au droit d'un délinquant de faire valoir son point de vue auprès de la « personne désignée par règlement » en ce qui a trait à la durée de l'exigence liée au port d'un dispositif de surveillance. Par « désignée par règlement », on entend « désignée par le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition ». Par conséquent, une nouvelle disposition doit être ajoutée au Règlement afin de désigner ce responsable. On propose que le titre du nouveau poste soit « coordonnateur du dispositif de surveillance ». Le coordonnateur du dispositif de surveillance serait chargé d'examiner les observations présentées par le délinquant, puis de confirmer ou de changer la durée pendant laquelle celui-ci est tenu de porter un dispositif de surveillance.
- Le coordonnateur du dispositif de surveillance ne serait pas davantage désigné dans le Règlement, mais on envisage que ce poste serait tenu par un cadre supérieur, comme un superviseur du bureau de libération conditionnelle chargé de la surveillance du délinquant. Cette exigence sera établie dans une directive du commissaire. Les directives du commissaire sont les politiques ou les « règles » que le commissaire du SCC crée pour l'organisme. Ces documents de politique, qui peuvent être consultés par le public, doivent être conformes à la Loi et au Règlement.
- (2) Conséquences d'un refus de porter le dispositif de surveillance à distance ou de son altération
- La Loi autorise le gouverneur en conseil à prendre des règlements autorisant le commissaire du SCC, par directive du commissaire, à établir des règles au sujet des conséquences d'un refus de porter le dispositif de surveillance à distance ou de son altération. Une modification doit donc être apportée au Règlement afin d'autoriser le commissaire, dans une directive du commissaire, à déterminer ces conséquences potentielles.
- Par exemple, une directive du commissaire sur la surveillance électronique pourrait préciser que les conséquences associées à l'altération du dispositif de surveillance ou le refus de le porter pourraient signifier pour le délinquant la possibilité de suivre des séances de counseling, la mise en œuvre de stratégies ou d'interventions additionnelles en matière de surveillance ou l'annulation ou la suspension de sa mise en liberté. Il est important de retenir que ces conséquences proposées seraient adaptées à la nature et au niveau du risque que présente le délinquant, et qu'elles seraient semblables à celles qui s'appliquent dans d'autres situations où l'on détermine que le délinquant présente un niveau de risque plus élevé (par exemple un test d'urine positif indiquant que le délinquant a consommé de l'alcool ou des drogues).
Règle du « un pour un »
La règle du « un pour un » ne s'applique pas à la présente proposition, car il n'y a aucune modification relative aux coûts administratifs des entreprises.
Lentille des petites entreprises
La lentille des petites entreprises ne s'applique pas à la présente proposition, car il n'y a pas de coûts liés à ces modifications réglementaires pour les petites entreprises.
Consultation
En plus de mener une consultation interne approfondie, les responsables du SCC ont rencontré des représentants du Bureau de l'enquêteur correctionnel, le 19 décembre 2012, afin de les consulter sur les modifications réglementaires proposées. Aucune préoccupation n'a été exprimée par rapport aux modifications proposées.
En avril 2013, le SCC a sollicité les commentaires des intervenants additionnels suivants au sujet des modifications réglementaires proposées :
- la Société John Howard
- la Société Elizabeth Fry
- les six syndicats du SCC
- l'Association canadienne des chefs de police
- la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC)
- des groupes de détenus et délinquants dans la collectivité
- des comités consultatifs de citoyens
La CLCC n'a exprimé aucune préoccupation à l'égard des modifications réglementaires proposées. Toutefois, elle a mis le SCC en garde contre un « fardeau inutile » qui serait créé si le Service devait informer la Commission chaque fois qu'un délinquant refuse de porter un dispositif de surveillance à distance ou l'altère (même lorsque le SCC n'effectue pas d'aiguillage vers la Commission aux fins de prise de décisions).
Un grand nombre de délinquants ont exprimé leur opinion sur les avantages et les inconvénients généraux de la SE, et ils ont demandé à recevoir davantage de détails sur la façon dont celle-ci serait mise en œuvre et gérée.
Le SCC élabore actuellement une directive du commissaire sur la SE ainsi que des lignes directrices connexes. Une version provisoire de ces deux documents sera fournie aux groupes de détenus, ainsi qu'à d'autres intervenants, afin de recueillir leurs commentaires avant la rédaction de la version définitive. Ces documents de politique traiteront des nombreux détails opérationnels complexes entourant la mise en œuvre de la SE, dont la préoccupation susmentionnée exprimée par la CLCC, qui sortent du cadre des modifications réglementaires proposées.
Les autres intervenants (la Société John Howard, la Société Elizabeth Fry, les syndicats du SCC, l'Association canadienne des chefs de police et les comités consultatifs de citoyens du SCC) n'ont exprimé aucune préoccupation à l'égard des modifications réglementaires proposées.
Enfin, le SCC a effectué une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée en vue de la mise en œuvre de la SE, qui doit avoir lieu une fois les modifications réglementaires apportées. (Une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée est un processus qui aide à déterminer si les initiatives nécessitant l'utilisation de renseignements personnels augmentent les risques d'entrave à la vie privée, qui mesure, décrit et quantifie ces risques, et qui propose des solutions pour les éliminer ou les atténuer à un niveau acceptable.)
L'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée a été présentée au Commissariat à la protection de la vie privée (CPVP) du Canada à l'été 2012. Le CPVP a posé des questions et formulé des recommandations au sujet du partage, de la collecte et du stockage des données sur la SE. Le SCC a répondu en expliquant le pouvoir législatif lié à l'échange de renseignements avec les organismes d'application de la loi, ainsi qu'en expliquant plus en profondeur le processus établi pour la collecte et le stockage de données, conformément aux politiques gouvernementales. En avril 2013, le CPVP a indiqué dans une lettre officielle adressée au commissaire du SCC qu'il était satisfait des stratégies d'atténuation du SCC et qu'il fermait le dossier de l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée liée à la SE.
Justification
Depuis les récentes modifications apportées à la Loi, le SCC possède le pouvoir législatif d'exiger que les délinquants portent un dispositif de SE. Afin que le SCC puisse exercer ce nouveau pouvoir législatif pour surveiller électroniquement les délinquants sous responsabilité fédérale, quelques modifications relativement mineures susmentionnées doivent être apportées au Règlement.
La charge de travail liée aux deux nouvelles activités (c'est-à-dire prendre en considération les points de vue des délinquants et y donner suite, et réévaluer les risques et en administrer les conséquences) est jugée minime et ne nécessitera pas le recours aux services de personnel additionnel. Aucun poste ne devra être créé pour gérer la charge de travail supplémentaire découlant de ces modifications réglementaires. Les coûts liés à l'achat des dispositifs de surveillance et à la mise en œuvre du régime de SE seront assumés par le SCC.
Mise en œuvre, application et normes de service
Quand le Règlement sera modifié, la SE deviendra l'un des outils que le personnel du SCC pourra utiliser pour surveiller les délinquants afin de veiller à ce qu'ils respectent leurs conditions de mise en liberté. Une nouvelle directive du commissaire ainsi que des lignes directrices seraient élaborées par le SCC, en collaboration avec les intervenants internes et externes, pour établir une orientation en ce qui a trait à la SE des délinquants, y compris, possiblement, la mise en œuvre d'un projet pilote de SE. Les vérifications internes, les évaluations, les outils de mesure du rendement, les rapports réguliers et les autres mécanismes que le SCC utilise pour s'assurer du respect de ses politiques de gestion des délinquants s'appliqueront également à la SE.
Personnes-ressources
Jack Botwinik
Gestionnaire de portefeuille
Politique stratégique
Service correctionnel du Canada
340, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)
K1A 0P9
Téléphone : 613-943-5355
Courriel : Jack.Botwinik@csc-scc.gc.ca
Phil Higo
Directeur
Politique stratégique
Service correctionnel du Canada
340, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)
K1A 0P9
Téléphone : 613-943-5299
Courriel : Phil.Higo@csc-scc.gc.ca
PROJET DE RÉGLEMENTATION
Avis est donné que le gouverneur en conseil, en vertu des alinéas 96m.1) (voir référence a), z.11) et z.12) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (voir référence b), se propose de prendre le Règlement modifiant le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, ci-après.
Les intéressés peuvent présenter leurs observations au sujet du projet de règlement dans les trente jours suivant la date de publication du présent avis. Ils sont priés d'y citer la Partie I de la Gazette du Canada, ainsi que la date de publication, et d'envoyer le tout à Jack Botwinik gestionnaire de portefeuille, Politique stratégique, Service correctionnel du Canada, 340, avenue Laurier Ouest, Ottawa (Ontario) K1A 0P9 (tél. : 613-943-5355; téléc. : 613-943-0715; courriel : Jack.Botwinik@csc-scc.gc.ca).
Ottawa, le 31 mars 2015
Le greffier adjoint du Conseil privé
JURICA ČAPKUN
RÈGLEMENT MODIFIANT LE RÈGLEMENT SUR LE SYSTÈME CORRECTIONNEL ET LA MISE EN LIBERTÉ SOUS CONDITION
MODIFICATION
1. Le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (voir référence 1) est modifié par adjonction, après l'article 162, de ce qui suit :
162.1 Lorsque le Service oblige un délinquant à porter un dispositif de surveillance à distance dans le but de s'assurer du respect des conditions visées au paragraphe 57.1(1) de la Loi, ce dernier est informé de la durée pendant laquelle il devra le porter.
162.2 Pour l'application du paragraphe 57.1(2) de la Loi, la personne désignée est le coordonnateur du dispositif de surveillance à distance.
162.3 Lorsqu'un délinquant présente les observations visées au paragraphe 57.1(2) de la Loi, le coordonnateur du dispositif de surveillance à distance les examine et confirme ou modifie, selon le cas, la durée requise du port du dispositif.
162.4 Le commissaire est autorisé à établir des règles, par directive, sur les conséquences du refus de porter le dispositif de surveillance à distance ou de son altération.
ENTRÉE EN VIGUEUR
2. Le présent règlement entre en vigueur à la date de son enregistrement.
[15-1-o]